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Je tressaillis. L’oiseau poursuivit :

J’en frissonne

À jamais, dans ce gouffre où j’erre plein d’effroi !
Dans cette Obscurité personne ne dit : moi !
Noire ébauche de rien que personne n’achève !
L’univers est un monstre et le ciel est un rêve ;
Ni volonté, ni loi, ni pôles, ni milieu ;
Un chaos composé de néants ; pas de Dieu.
Dieu, pourquoi ? L’idéal est absent. Dans ce monde,
La naissance est obscène et l’amour est immonde.
D’ailleurs, est-ce qu’on naît ? est-ce qu’on vit ? quel est
Le vivant, le réel, le certain, le complet ?
Les penseurs, dont la nuit je bats les fronts moroses,
Questionnent en vain la surdité des choses ;
L’eau coule, l’arbre croît, l’âne brait, l’oiseau pond,
Le loup hurle, le ver mange ; rien ne répond.
La profondeur sans but, triste, idiote et blême ;
Quelque chose d’affreux qui s’ignore soi-même ;