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A l’Unité pour masque et pour nom Légion. Un temple voit la nuit où l’autre voit l’aurore ; Chéos adore Ammon que Jagrenat ignore ; Pour Delphe Odin n’est pas ; la solimaniéh Affirme Mahomet par le dolmen nié. La terre crée un monstre et se met sous sa garde ; Et c’est avec stupeur que le grand ciel regarde Croître sur vos fumiers ce misérable Dieu. Nous ne nous mettons pas en peine de si peu, Nous autres les esprits errant dans l’étendue ; Et, sans nous acharner à la lueur perdue, Sans poursuivre l’obscure et pâle vision, Sans exiger de l’ombre une solution,

Nous raillons dans la nuit votre Brahma fétiche, Dieu qui mêle à à sa barbe un infini postiche, Dieu singe pour le nègre et Dieu peste au Thibet ; Bourreau dressant sur l’homme un immense gibet, Bœuf à Memphis, dragon à Tyr, hydre en Chaldée, Chimère et non raison, idole et non idée. Ton globe, vieil enfant, joue avec ce hochet. Homme, esprit fou qu’en vain Diogène cherchait, Homme, tu fais pitié même aux êtres du gouffre, Même à l’obscurité qui frissonne et qui souffre ; Car ton monde étroit rêve un rêve limité ; Il se compose un Dieu de son infirmité ; Et, dans l’abjection de ses passions vaines,