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Vous qui ne pouvez voir que-la forme et le lieu,
Justice est le profil de la face de Dieu.
Vous voyez un côté, vous ne voyez pas l’autre.
Le bon, c’est le martyr ; le juste n’est qu’apôtre ;
Et votre infirmité, c’est que votre raison
De l’horizon humain conclut l’autre horizon.
Limités, vous prenez Dieu pour l’autre hémisphère.
Mais lui, l’être absolu, qu’est-ce qu’il pourrait faire
D’un rapport ?.L’innombrable est-il fait pour chiffrer ?
Non, tout dans sa bonté sombre vient s’engouffrer.
 On ne sait où l’on vole, on ne sait où l’on tombe,
On nomme cela mort, néant, ténèbres, tombe,
Et, sage, fou, riant, pleurant, tremblant, moqueur,
On s’abîme éperdu dans cet immense cœur !
Dans cet azur sans fond la clémence étoilée
Elle-même s’efface, étant d’ombre mêlée !

L’être pardonné garde un souvenir secret,
Et n’ose aller trop haut ; le pardon semblerait
Reproche à la prière, et Dieu veut qu’elle approche ;
N’étant jamais tristesse, il n’est jamais reproche,
Enfants ; et maintenant, croyez si vous voulez !

Devant le sacrifice et les cieux constellés,
Devant l’aigle effaré ; devant les forêts vertes,
Devant les profondeurs dans tout être entr’ouvertes,
Hommes, on peut nier, mais l’inconvénient
C’est que l’esprit décroît et noircit en niant.
L’être fait pour l’extase et la soif infinie
Devient sarcasme, rire, ignorance, ironie ;