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Et quant à tes cités, Babels de monuments
Où parlent à la fois tous les événements,
Qu’est-ce :que cela pèse ? arches, tours, pyramides,
Je serais peu : surpris qu’en ses rayons humides,
L’aube les emportât pêle-mêle un matin
Avec les gouttes d’eau de la sauge et du thym.
Et ton architecture étagée et superbe
Finit par n’être plus qu’un tas de pierre et d’herbe
Où, la tête au soleil, siffle l’aspic subtil :
Ton marbre, dont tu fais des dieux, que devient-il ?
Le temps court, et monnoye en courant tes statues ;
Ton bronze qu’à tes rois guerriers tu prostitues,
On en fait des liards qui valent les héros.
Ton marbre, chaux et plâtre, emplit les tombereaux.
Homme, le papillon qui vit une semaine,
Le puceron qu’un jour crée et qu’un jour remmène,
L’éphémère, enviant cette longévité,
Égalent ton granit devant l’immensité.

Ah ! tes œuvres, vraiment, parlons-en. Meurtre, envie,
Sang ! Tu construis la mort quand Dieu sème la vie !
Et, pendant que Dieu fait les chênes sur les monts,
Les baobabs pareils à des pieds de mammons,
L’arbre a pain, le palmier splendide, les mélèzes,
D’où sort un chant pareil à la voix des falaises,
L’olivier, le figuier, le cèdre, le nopal,
Tu fais l’arbre gibet, l’arbre croix, l’arbre pal,
L’affreux arbre supplice, énorme, vaste, infâme,
Cyprès dont les rameaux, faisant la nuit sur l’âme,