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Qui lutte avec la terre et tombe exténué ?
Et l’algébriste exact, par l’espace hué,
Que dit-il, ce berger des chiffres indociles ?
Que dit le devin, roi des stryges et des psylles,
Poussant vers l’inconnu qu’à ton vol tu soumets,
Quelque système aveugle ou boîteux qui jamais
N’arrive au bout d’un fait sans trouble et sans encombre ?
Que dit le philosophe, aventurier de l’ombre ?
Et le poète ami des cieux où l’aube point ?
Que disent, frémissants, pâles, la pioche au poing,
Tous ces noirs fossoyeurs de la fosse Science ?
Homme ! ils disent tous : nuit, misère, imprévoyance,
Erreur, néant, fumée, imbécillité, deuil.
Et c’est avec cela que tu fais ton orgueil !
Jour coudoie ignorance en ton savoir hybride.
Tu ne sais pas tenir ta fantaisie en bride.
Tu vas, tu vas, tu vas ! Où vas-tu ?
Vanité !
Tu crois qu’en te créant Dieu t’a mis de côté,
Que ton berceau contient toutes les origines,
Et que tout se condense en toi ; tu t’imagines
Qu’à mesure que tout naissait et surgissait,
L’Éternel t’en donnait quelque chose ; et que c’est
Sous ton crâne que Dieu pensif traça l’épure
De ce monde qu’emplit son auréole pure.
Tu dis : j’ai la raison, la vertu, la beauté.
Tu dis : Dieu fut très las pour m’avoir inventé,

Et tu crois l’égaler chaque fois que tu