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L’ibis mangeur de vers ; le rat mangeur de crabes ;
Les musquas rongeurs pris au fond des lacs vitreux
Par la glace et l’hiver, se dévorant entr’eux,
Et les boas nageurs et les boas énygres,
Et les vipères, sœurs du crâne plat des tigres,
Le mulot, la bigaille, et, sortant du ruisseau,
L’horrible caïman à tête de pourceau,
Méduse, cachalot, orphe, requin, marbrée,
Baleine à la mâchoire infecte et délabrée,
Mouches s’engloutissant au gouffre engoulevent,
L’unau, le fourmilier traître, lent et bavant,
L’once au jurement fauve, aux moustaches roidies,
Bêtes de l’ombre errant comme des Canidies,
Tout souffre ; grand, petit, le hardi, le prudent,
Tout rencontre un chasseur, une griffe, une dent !
Une sorte d’horreur implacable enveloppe
L’aigle et le colibri, le tigre et l’antilope.
L’eau noire fait songer le grave pélican.
Partout la gueule s’ouvre à côté du volcan ;
Partout les bois ont peur partout la bête tremble
D’un frisson de colère ou d’épouvante ; il semble
À celui qui ne voit l’être que d’un côté
Qu’une haine inouïe emplit l’immensité.

Hommes, les animaux, confuses multitudes ;
Saignent dans vos cités et dans leurs solitudes ;
La bête pleure, rampe, agonise. Pourquoi ?.
Et si le lion dit : qu’est-ce que j’ai fait, moi ?
Que pourras-tu répondre à ce montagnard triste ?