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Voit la couleuvre et bêle avec terreur ; l’orfraie
S’agite dans l’effroi du problème inconnu ;
Sur le crâne pelé du mont sinistre et nu
Le trou de l’aigle est plein de carnage et de fiente ;
La chouette, en qui vit la nuit terrifiante,
Tout en broyant du bec le rat qu’elle surprit,

Songe ; le vautour blanc lui prend sa proie, et rit ;
L’éléphant marche avec un fracas d’épouvante ;
L’affreux jararrara, comme une onde vivante,
Autour des hauts bambous et des joncs tortueux
Se roule, et les roseaux deviennent monstrueux ;
Le museau de la fouine au poulailler se plonge ;
Sur la biche aux yeux bleus le léopard s’allonge ;
Le bison sur son dos emporte le couquard
Qui lui suce le sang pendant qu’il fuit hagard ;
La baudroie erre et semble un monstre chimérique ;
Quand le grand-duc cornu dans les bois d’Amérique
Plane, l’essaim fuyant des ramiers prend son vol.
Vois. L’oblique hibou guette le rossignol.
Le loup montre sa gueule et l’homme son visage,
Le désert frémit. Vois, les pigeons de passage
Qui vont ; pillant le houx et le genévrier,
L’ours qui sort de son antre au mois de février,
Le phoque au poil luisant qui semble frotté d’huile,
Tout le fourmillement des brutes, le reptile,
L’autour, le scorpion tapi dans les lieux frais,
Le renard, le puma, ce grand chat des forêts
Qui fait en miaulant le bruit d’un bœuf qui gronde,
Le lynx, l’impur condor à la prunelle ronde,
Brigands que la nuit cache en son vaste recel,
Le jaguar à l’affût près, des sources de sel,
Les files de chameaux des horizons arabes,