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Allez ! prenez la bêche et bêchez le jardin !
Mongolfier veut l’azur en attendant l’Éden ;
Bien. Et Luther fait bien d’ouvrir l’âme, et Vésale
Éclairant le dedans de la mort colossale,
Fait bien. L’audace est sainte et Dieu bénit l’effort.
Tous les glaives de feu derrière Adam ont tort.

Monte, esprit. Dieu t’attend. Dans ses deux mains de flamme,
Équilibre, il tient l’astre, et, justice, il tient l’âme ;
Et, l’univers ayant ce but : voir et savoir,
Pour l’astre et pour l’esprit rayonner est devoir.
Monte, et ne tremble pas. C’est une âpre montée.
Quelquefois l’âme hésite, à mi-côte arrêtée.
L’esprit humain qui va, voit devant lui l’écueil,
L’escarpement, l’horreur, le chaos, le cercueil ;

Et le sentier toujours plus sinistre et plus roide.
Ce marcheur a le front baigné de sueur froide.
Va, marcheur ! Mal et Bien portent à leurs deux bouts
L’effroi. Souvent, féroce au bonheur des hiboux,
Le, progrès, rudoyant tous les petits bien-êtres,
Vomit tous les rayons dans toutes les fenêtres.
Le bien est sans pitié. Traverse sans trembler
Tout ce que tu verras autour de toi hurler ;
Le progrès a parfois l’allure vaste et fauve ;
Et le bien bondissant effare : ceux qu’il sauve.
Va donc ! Double le pas ! L’horizon s’élargit.