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Comptant les grands palais en flamme, et distinguant
Dans la profonde nuit le glaive nu d’Egysthe ?
Parle. Es-tu plein du gouffre ? Es-tu le trismégiste,
Marches-tu de plain-pied avec les cieux, disant

Aux douze heures : venez me parler, à présent
Que vous voilà sur terre, ayant en vous chacune
La gaîté du soleil ou l’horreur de la lune ?
As-tu vécu parmi les bêtes dans les bois,
Le tigre t’indiquant la source, et disant : bois !
Et, lorsque tu songeais la face contre terre,
Un ange, qu’adoraient le lynx et la panthère,
T’a-t-il jeté, de l’ombre écartant les rideaux,
Quelque effrayant manteau d’étoiles sur le dos ?
Pour parler de la sorte, es-tu celui qui lie
Et qui délie ? As-tu le double esprit d’Elie ?
Qu’es-tu ? Dis-moi ton nom. Les prophètes jadis,
À l’heure où, sur les monts par la brume engourdis ;
La large lune d’or surgissait comme un dôme,
Faisaient sur l’horizon des gestes de fantôme,
Dialoguaient avec les vents, et grands, et seuls,
Ils secouaient les nuits ainsi que des linceuls ;
Car le désert, prenant de graves attitudes,
Jadis parlait a l’homme, et l’homme aux solitudes ;
La mer ouvrant son gouffre et l’aigle ouvrant son bec
Entendaient les devins, dans Endor, dans Balbeck,
Faire des questions aux ténèbres, et l’ombre
Donner aux noirs devins l’explication sombre.
Es-tu de ceux-la ? Non ! Tu serais le dernier
Que tu ne serais pas si fou de le nier.

Serais-tu par hasard, ô parleur dérisoire,