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Tout est dérision. Vénus étreint Psyché.
Achille meurt par où sa mère l’a touché.
Oh ! les mères ! Cherchez les fils, cherchez la joie !
Niobé devient pierre et nuit ; Hécube aboie.

Être chaste. À quoi bon ? Vivre austère. Pourquoi ?
Plus de vertu contient plus d’ombre et plus d’effroi.
Les assassins, creuseurs de fosses à la hâte,
Le voleur, écoutant à la, porte qu’il tâte,
Ne sont pas plus troublés qu’Œdipe au front pieux.
Comme le sanglier s’abat sous les épieux.
L’homme tombe percé par les carquois célestes.
Les grands sont les maudits, les bons sont les funestes.
Le ciel sombre est croulant sur les hommes ; l’autel,
Calme et froid, à celui qui l’embrasse est mortel,
Une Eurydice dort sur les marches du temple ;
Le meilleur, si le sort veut en faire un exemple,
N’a plus de cœur ; n’a plus d’entrailles, n’a plus d’yeux,
Ploie et meurt sous le poids formidable des dieux.
Les générations s’envolent dissipées.
Les jours passent ainsi que des lueurs d’épées.
Au-dessus des vivants le sort lève le doigt.
Nul ne fait ce qu’il fait ; nul ne voit ce qu’il ; voit.
Nais : la main du sort s’ouvre. Expire : elle se ferme.
Nul ne sait rien de plus. Guerres sans but, sans terme,
Sans conscience, écume aux dents, et glaive au poing !
La bouche mord l’oreille et ne lui parle point
Le sourd étreint l’aveugle ; on lutte, on se dévore
On se prend ; on se quitte, on se reprend encore ;
Et nul n’est jamais libre un instant sous les cieux ;
Ce que le destin lâche est repris par les dieux ;