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Les lourds typhons d’en bas, le peuple hydre et géant,
Pullulant, fécondant, multipliant, créant,
Frémissant d’approcher peut-être de leur mère,
Fixent leurs fauves yeux sur l’obscène chimère !
Et l’écume embrassant le roc sauvage et brut,
Les baisers de l’orage et des vagues en rut,
L’entourent ; et son souffle émeut la bête immonde ;
Et, sans cesse, à jamais, dans l’air, la flamme et l’onde,
À travers l’éternelle et livide vapeur,
La prunelle des nuits regarde avec stupeur,
Et l’ouragan flagelle, et l’océan caresse
La prostitution de la sombre déesse !
C’est ainsi que tout vit et tout meurt, haletant.
L’astre est une étincelle et le siècle un instant.
Le souffle de la mort couvre à chaque rafale
D’ombres le fleuve Styx, d’oiseaux le lac Stymphale,
Et la guerre aux longs cris plane, et les pestes vont
S’accoupler pêle-mêle au bas du ciel profond,
Elles se dressent, sœurs du meurtre et de l’envie,
Et leurs regards de larve épouvantent la vie.
Et l’on entend, au fond des brouillards soucieux,
Hurler la bête fauve effrayante des cieux,
Le Tonnerre, et, troublés, et prêts à se dissoudre,
Les mers, les bois, les monts, sous les pas de la foudre,
Tremblent, et le vent jette à travers ses éclats
Les imprécations du portefaix Atlas.

Car tout pèse sur lui. Je te l’ai dit, le monde,
Avec l’air bleu, le feu vermeil, l’eau verte et ronde,