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Sylvain des bois, Triton des eaux, Vulcain des forges ;

Pan contemple effaré la nudité des gorges ;
L’arbre est un faune ardent qu’on ne peut assoupir,
Et les antres sont pleins d’un immense soupir,
Dans l’orageux banquet des thyrses et des lyres,
Et de toutes les soifs buvant tous les délires,
Bacchus, environné de tigres, chante et rit ;
Et, dégorgeant au fond des cerveaux qu’il flétrit,
Sa fumée âcre où vont et viennent des fantômes,
Spectres bleus de l’éther, larves des noirs royaumes,
Les cris, les coups, la rage et le baiser lascif,
Le vin cynique emplit les coupes d’or massif.
On fait un nid de l’ombre, un lit de la matière.
Se ruant les seins nus sur la nature entière,
Étonnés, hérissés, debout, couchés, assis,
Les mages de Cybèle et les mages d’Isis,
L’éphèbe au front charmant, les vierges, les prêtresses ;
Les bacchantes livrant aux vents leurs folles tresses,
Naïades, chèvre-pieds, kabyres, ægipans,
Et les hommes chevaux et les femmes serpents,
Les prêtres qu’en passant, bouc rêveur, tu salues,
Les troglodytes roux aux poitrines velues,
Polyphème, Astarté, Cerbère, Hylas, Atys,
Toutes les passions et tous les, appétits,
S’accouplent, Évohé ! rugissent, balbutient,
Et sous l’œil du destin calme et froid, associent
Le râle et le baiser, la morsure et le chant,
La cruauté joyeuse et le bonheur méchant,
Et toutes les fureurs que la démence invente ;
Et célèbrent, devant l’esprit qui s’épouvante,
Devant l’aube, devant l’astre, devant l’éclair,
Le mystère splendide et hideux de la chair ;