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Ô déités, tenant, les noires et la blonde,
Les entrailles, le cœur et le cerveau du monde,
Et toute la nature attachée à trois fils !
Les astres sont leurs yeux, les nuits sont leurs profils.
Rien ne peut les fléchir ; c’est en vain qu’on réclame ;
Le sort est tigre, Hécate est sphynx, Vénus est femme.

Une cariatide immense porte tout
Tellus en deuil, Neptune amer, Pluton qui bout,
Arbres, moissons, déserts, flots confus, rocs inertes,

Fleuves laissant traîner leurs longues barbes vertes,
Hommes et champs d’où sort un bruit sourd, tournoiements
Des nuages, de jour ou d’orage écumants,
Et Pan, qui, dérangeant les branchages des ormes,
Apparaît vaguement au fond des bois énormes.

Tout est un groupe obscur d’aspects fallacieux ;
Les astres font un bruit de lyres dans les cieux ;
Le porche sidéral, antre du sort, gouverne
Ce monde triple, ciel, terre en fleurs, rouge Averne.
Une grâce lugubre est mêlée à l’effroi.
Partout quelque chaos, dont quelque monstre est roi,
Obéit, dans l’écume ou la flamme ou l’épine,
Aux yeux d’une Amphitrite ou d’une Proserpine
Ou de quelque Cybèle au front blond et serein.
Partout se croisent l’eau, le feu, l’autan sans frein,
Les satyres dansants, les nymphes chasseresses,
Et dans le sombre azur des essors de déesses.
Et, tour à tour, et l’un après l’autre, au plus noir