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de quel cratère
Du vieux volcan chaos ; sous l’énigme englouti,
Ce monde, éruption sinistre, est-il sorti ?
Quelqu’un a-t-il soufflé sur ses torrents funèbres :
Pour en faire la pierre énorme des ténèbres ?
Quelqu’un l’a-t-il vu lave avant qu’il fût granit ?,
Qui donc, sur le versant monstrueux du zénith,
Figea cette coulée effrayante d’étoiles ?
Est-il ? S’il est, qu’il parle ! Oh ! dis-moi qui tu voiles ;
Ciel morne ! L’être est-il parce que la vue est ?
Je sens sous l’infini ce fantôme muet :
Je le sens ; mais est-il ? Et j’ai beau le poursuivre ;
L’ombre incommensurable et fuyante m’enivre.
Toute ma découverte est, cendre et chute. Ô deuil !
Le strabisme effrayant du doute est dans mon œil !
Le fil de l’infini devant moi se dévide.
Que la création soit une chose vide,
Cela ne se peut pas. Où serait la raison ?

Mais d’un autre côté, dans le vaste horizon
Tout souffre ; et tout répond aux questions : je pleure !
L’esprit comme la chair, le siècle comme l’heure,
Le colosse et l’atome infinitésimal.
Ô nuit ! pourquoi le vide ? Oui, mais pourquoi le mal ?
Oh ! si je trouvais Dieu ! Si je pouvais, à force
D’user ma griffe obscure à saisir cette écorce,
Déchirer l’ombre ! voir ce front, et le voir nu !