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Oh ! n’est-il pas plutôt le vide où tout s’achève ;
L’éclat de rire vague et sinistre du rêve ?
Cependant il faut bien un axe à ce qu’on voit ;
Et, quelque chose étant ; il faut que quelqu’un soit.
Haine ou sagesse, joie ou deuil, paix ou colère,
Il faut la clef de voûte et la pierre, angulaire ;
Il faut le point d’appui, le pivot, le milieu.
À la roue univers il faut bien un essieu.
Croyons ! croyons ! Sans voir la source, on peut conclure
De l’œuvre à l’ouvrier, et de la chevelure
À la tête, et du ercle au centre d’où : tout part,
Et du parfum partout à la fleur quelque part.
Homme, l’Etre doit être. Homme, il n’est pas possible
Que la flèche esprit vole et n’ait pas une cible.
Il ne se peut, si vain et si croulant que soit

Ce monde où l’on voit fuir tout ce qu’on aperçoit ;
Il ne se peut, ô tombe ! ô nuit ! que la nature
Ne soit qu’une inutile et creuse couverture,
Que le fond soit de l’ombre aveugle, que le bout
Soit le vide, et que Rien ait pour écorce Tout.
Il ne se peut qu’avec l’amas crépusculaire
De ses grands bas-reliefs qu’un jour lugubre éclaire,
Avec son bloc de nuit, de brume et de clarté,
La création soit, devant l’immensité,
Un piédestal ayant le néant pour statue.
Croyons. En disant non, l’esprit se prostitue.
L’Être a beau se cacher, tout nous dit : le voilà !