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On a peur quand l’aube qui s’éveille
Fait une plaie au bas des cieux, rouge et vermeille ;
On a peur quand la bise épand son long frisson ;
On a peur quand on voit, vague, à fleur d’horizon,
Montrant, dans l’étendue au crépuscule ouverte,
Son dos mystérieux d’or et de nacre verte,
Ramper le scarabée effroyable du soir.
On a peur quand minuit sur les monts vient s’asseoir.
Pourtant, dans cette masse informe et frémissante,
Il semble par moments qu’on saisisse et qu’on sente
Comme un besoin d’hymen et de paix émouvant,
Toutes ces profondeurs de nuée et de vent ;
Tout cherche à se parler et tout cherche à s’entendre ;
La terre, à l’océan jetant un regard tendre,
Attire à son flanc vert ce sombre apprivoisé
Mais l’eau quitte e bord après l’avoir baisé,
Et retombe, et s’enfonce, et redevient, tourmente ;
Il n’est rien qui n’hésite et qui ne se démente ;
Le bien prête son voile au mal qui vient s’offrir ;
Hélas ! l’autre côté de savoir, C’est souffrir ;
Aube et soir, vie et deuil ont les mêmes racines ;
Le sort fait la recherche et l`angoisse voisines ;
D’où jaillit le regard on voit sortir le pleur ;
Et, si l’œil dit Lumière, il dit aussi Douleur.
Tout est morne. Il n est pas d’objet qui ne paraisse