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Oh ! l’eau terrible ayant des rumeurs de tonnerre !
Les sourds chuchotements du vent sous l’horizon !
Entre le jour et nous quelle épaisse cloison !
Ténèbres. Pourquoi tout parle-t-il à voix basse ?
Tout visage qui rit a, dans l’horrible espace,
Derrière lui pour ombre une tête de mort.
Naître ! mourir ! On entre, entrez. — Sortez, on sort ! —
Et je songe à jamais ! à jamais mon œil sombre
Voit aller et venir l’onde énorme de l’ombre !
À quoi bon ? et vous tous, à quoi bon ? vous vivez ;
Vivez-vous ? et d’ailleurs, pourquoi ? pensez, rêvez,
Mourez ! heurtez vos fronts à la sourde clôture !
Qu’est-ce que le destin ? qu’est-ce que la nature ?
N’est-ce qu’un même texte en deux langues traduit ?
N’est-ce qu’un rameau double ayant le même fruit ?
Le lierre qui verdit à travers le décombre,
La mer par le couchant chauffée au rouge sombre,
Les nuages ayant les cimes pour récifs,
Les tourmentes volant en groupes convulsifs,
La foudre, les Etnas jetant des pierres ponces,
Les crimes s’envoyant les fléaux pour réponses,

L’antre surnaturel, l’étang plein de typhus,
Les prodiges hurlant sous les chênes touffus,
La matière, chaos, profondeur où s’étale
L’air furieux, le feu féroce, l’eau brutale ;
La nuit, cette prison, ce noir cachot mouvant
Où l’on entend la sombre évasion du vent,
Tout est morne.