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FORÊT D’HIVER
A Albert Mèrat.

 
Seront-ils toujours là quand nous disparaîtrons ?
Les voilà, roidissant leurs vénérables troncs
Qui des vents boréens ont lassé les colères.
Eux, les arbres, longs murs de héros séculaires
Durcis aux noirs assauts des hivers meurtriers.
Inexpugnable bloc d’impassibles guerriers
Qui sous le choc prochain des rafales nocturnes
Pour un instant se font tout à coup taciturnes,
Solennels et géants, horribles et nombreux,
Et défiant la mort comme les anciens preux !
Chênes, Trembles, Bouleaux, Sapins, Hêtres et Charmes
Semblent marcher par rangs de squelette en armes
Dont l’âme rude a fait d’invincibles remparts ;
Et du sol reluisant de leurs débris épars
Ils se dressent humant le parfum des batailles,
Tout cuirassés d’écorce ou pourfendus d’entailles
Où demain viendront boire et chanter les ramiers,
Et leur cime s’emmêle en d’immenses cimiers !