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L'homme essayant sa force au seuil des premiers âges,
Libre dans l'univers libre et grand comme lui ;
Défiant l'avenir, et dont l'oeil ébloui
Reflète l'horizon des vierges paysages ;

Plein d'un orgueil sans peur et d'un espoir sans fin ;
Et dans sa beauté fière à qui tout se confie,
Sur la création odorante et ravie
Passant majestueux sous un signe divin ;

C'était l'homme vieilli des races séculaires,
Fils de la lassitude et des labeurs déçus,
Et qui, désabusé des dons qu'il a reçus,
A des printemps plus froids que les hivers polaires ;

Qui, remuant la cendre immense du passé,
Initié tout jeune au mensonge des rêves,
A vu la vanité de ses luttes sans trêves,
Et sans but désormais s'en va le front baissé ;

Qui, ployant sous le poids d'insupportables chaînes,
Se connaît tout entier dans la joie ou les pleurs,
Rassasié du rire autant que des douleurs ;
Sans élans pour le bien, et pour le mal sans haines ;

C'était l'homme rongé par l'angoisse ; vaincu
Sous l'énervant dégoût de sa propre impuissance ;
Et fatal héritier d'une aride science,
Contempteur de la vie avant d'avoir vécu.