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LE SURVIVANT


Je sors des bois. Je rentre en ma vie. Ô prisons
De nos songes ! Combats ou pleurs que nous taisons !
Le jour s’en va. Le bleu du ciel pâlit. C’est l’heure
Tranquille. — Un souffle ; un seul. — Souffle étrange ! — Il m’effleure
Et s’éteint. — Je soupire et pense à lui. C’était
Un toucher ! — Le soleil s’engouffre. Tout se tait.
L’ombre augmente. La route est longue, la nuit, proche.
Elle arrive. Elle monte en nous, comme un reproche.
Il venait de très loin, ce souffle ! J’en frémis.
Il semblait expirer en moi. Je l’ai transmis ;
Où donc ? Vers qui ? — Mon cœur bat avec violence.
Je n’entends que mes pas. — Quel désert ! Quel silence !
Ce souffle était si faible ! et si doux ! — La forêt
Ne l’a point arrêté pourtant. Il se mourait.
C’est en moi qu’il est mort. Vivait—il ? — Des lumières
S’allument. — Durs travaux des champs ! Pauvres chaumières !
— Ce souffle ! On aurait dit une aile ; un être errant !
Il est tant de secrets ! Hélas ! Qui les comprend ?