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Les Sports athlétiques

Je les classe en trois catégories : les passifs, les affectifs et les intellectuels. J’emprunte ces termes au docteur Tissié et je suis heureux de me servir de cette jolie étiquette. Mais je les définirai autrement : les affectifs, c’est vous, Mesdames. Le plus grand ennemi des sports, c’est la mère. Combien ai-je entendu de mères me dire : « Et surtout que mon fils ne joue pas au football !

— Madame, votre fils vous appartient et il n’y jouera pas, si vous le défendez. Mais pourquoi le défendez-vous ? Vous êtes calme en ce moment, causons. — Vous voulez donc que mon fils se casse une jambe, un bras, qu’il meure ? — Non, Madame, je veux qu’il vive ; et si on lui casse une jambe, nous la lui raccommoderons. (On rit.) — Ah ! vous voilà bien ! — Ne savez-vous pas qu’une jambe raccommodée est beaucoup plus solide qu’une neuve ? » (Hilarité. Vifs applaudissements.)

Vous voyez quelle est la résistance du sentiment. Et, à ce propos, je me rappelle un mot de Claude Bernard, dont j’ai suivi les cours autrefois. Il s’agissait alors de la vivisection et les affectifs étaient en mouvement. Toujours les sentimentaux !

Les Anglaises avaient fondé une Ligue contre la vivisection, et Claude Bernard faisait remarquer qu’on ne pouvait pas discuter avec les sentimentaux, parce qu’une raison, même la meilleure, ne peut pas mordre sur un sentimental. Le sentiment ne se laisse jamais persuader. « Comment ! vous allez disséquer vivants mon chat, mon chien, mon petit lapin », disaient les membres de la Ligue contre la vivisection !

Et Claude-Bernard faisait cette réflexion dans sa raison supérieure : J’admire comment ces êtres de sentiment, si pleins de compassion pour les bêtes, en ont si peu pour la pauvre humanité ! « Comment apprendre à la guérir, si ce