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langue, que vous appelez, je crois, vous autres savants, des… aidez-moi donc, des…

MOI. — Idiotismes.

LUI. — Tout juste. Eh bien ! chaque état a ses exceptions de la conscience générale, auxquelles je donnerais volontiers les noms d’idiotismes de métier.

MOI. — J’entends. Fontenelle parle bien, écrit bien, quoique son style fourmille d’idiotismes français.

LUI. — Et le souverain, le ministre, le financier, le magistrat, le militaire, l’homme de lettres, l’avocat, le procureur, le commerçant, le banquier, l’artisan, le maître à chanter, le maître à danser, sont de fort honnêtes gens, quoique leur conduite s’écarte en plusieurs points de la conscience générale, et soit remplie d’idiotismes moraux. Plus l’institution des choses est ancienne, plus il y a d’idiotismes ; plus les temps sont malheureux, plus les idiotismes se multiplient. Tant vaut l’homme, tant vaut le métier, et réciproquement. À la fin, tant vaut le métier, tant vaut l’homme. On fait donc valoir le métier tant qu’on peut.

MOI. — Ce que je conçois clairement à tout cet