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(Il recommença à se frapper le front avec un de ses poings, à se mordre la lèvre, et rouler au plafond ses yeux égarés, ajoutant) : — Mais c’est une affaire faite. J’ai mis quelque chose de côté ; le temps s’est écoulé, et c’est toujours autant d’amassé.

MOI. — Vous voulez dire de perdu ?

LUI. — Non, non, d’amassé. On s’enrichit à chaque instant : un jour de moins à vivre, ou un écu de plus, c’est tout un ; le point important est d’aller librement à la garde-robe. Voilà le grand résultat de la vie dans tous les états. Au dernier moment tous sont également riches ; et Samuel Bernard, qui, volant, pillant, faisant banqueroute, laisse vingt-sept millions en or, et Rameau qui ne laisse rien, et à qui la charité fournira la

    n’ont point quitté le Café de la Régence, ni même la salle de jeu où ils se sont rencontrés à la seconde page. Quant à la circonstance aggravante du clavecin, elle ne peut s’expliquer que par une erreur de lecture qui aura fait croire à l’éditeur que Rameau se mettait réellement au clavecin, quand Diderot nous dit, quelques lignes plus bas : Le voilà donc assis, etc. Il est évident que Rameau mime son morceau de clavecin comme il a déjà mimé son air de violon. Nous croyons donc que cette indication immotivée, et d’ailleurs incertaine, peut et doit être supprimée.