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honnêtes gens font ce qu’ils doivent, les espèces aussi ; et c’est vous qui avez tort de les accueillir. Si Bertin vivait doucement, paisiblement avec sa maîtresse ; si par l’honnêteté de leurs caractères ils s’étaient fait des connaissances honnêtes ; s’ils avaient appelé autour d’eux des hommes à talent, des gens connus dans la société par leur vertu ; s’ils avaient réservé pour une petite compagnie éclairée et choisie les heures de distraction qu’ils auraient dérobées à la douceur d’être ensemble, de s’aimer, de se le dire dans le silence de la retraite, croyez-vous qu’on en eût fait ni bons ni mauvais contes ? Que leur est-il donc arrivé ? ce qu’ils méritaient ; ils ont été punis de leur imprudence, et c’est nous que la Providence avait destinés de toute éternité à faire justice des Bertins du jour, et ce sont nos pareils d’entre nos neveux qu’elle a destinés à faire justice des M*** et des B*** à venir. Mais, tandis que nous exécutons ses justes décrets sur la sottise, vous qui nous peignez tels que nous sommes, vous exécutez ses justes décrets sur nous. Que penseriez-vous de nous si nous prétendions avec des mœurs honteuses jouir de la considération publique ? Que nous sommes des insensés. Et ceux qui