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gré extrème d’acidité de ces sucs concourant avec leur plus grande abondance, il n’y a jamais eu dans les premieres voies de quoi saturer dix grains de magnésie ; & quand même on pourroit supposer qu’il s’y en trouvât quelquefois de quoi en saturer deux gros, cette quantité devroit être la dose extrème, & tout ce qu’on pourroit en donner au-delà seroit inutile. Or il est cependant prouvé par l’expérience que dans tous les cas l’activité de la magnésie est proportionnelle à sa dose : une once purge plus que demi-once. 3o. C’est gratuitement au-moins qu’on estime la nature du sel neutre formé dans les premieres voies par celles de celui qui résulte de la combinaison de l’acide vitriolique avec la même base. 4o. Enfin la diversité d’action reconnue même par Hoffman entre la magnésie blanche & les autres absorbans, prouve sans doute qu’il n’est point permis de considérer la magnésie comme un simple absorbant. On a presque regret au tems qu’on emploie à réfuter de pareilles spéculations ; mais comme ce sont principalement les théories arbitraires & frivoles dont la Medecine est inondée, qui deshonorent l’art aux yeux des bons juges, & que celle que nous venons de discuter est défendue par l’appareil des principes chimiques exacts & lumineux en soi, & par une simplicité apparente qui séduit toujours les demi-savans, & dont les vrais connoisseurs se méfient toujours au contraire ; pour toutes ces considérations, dis-je, on s’est permis d’attaquer ce préjugé plus sérieusement & avec plus de chaleur qu’il n’en mérite dans le fond.

Quant à l’utilité absolue de la magnésie, il est sûr que l’usage fréquent qu’elle a chez nous depuis quelque tems, a été principalement une affaire de mode, & qu’il a été soutenu principalement par l’avantage d’être un remede moins dégoûtant que les autres purgatifs. On doit pourtant convenir qu’on l’emploie avec assez de succès pour purger dans les affections hypocondriaques, & toutes les fois qu’on a à remplir la double indication d’absorber & de purger, comme dans la toux stomachale & l’asthme humide, & quelque cas même d’asthme convulsif. Elle est très-utile aussi dans la constipation qu’occasionne quelquefois le lait, voyez Lait. Hoffman remarque & l’observation journaliere confirme que cette poudre est sujette à causer des ventosités & de l’irritation dans les intestins, si on en fait un trop fréquent usage.

On la donne dans de l’eau, du bouillon, des infusions ou décoctions de plantes laxatives, dans des sucs de plantes émollientes, dans une émulsion, &c. (b)

Magnésie opaline, (Chimie.) ou Rubine d’antimoine. Ce n’est autre chose qu’une espece de foie d’antimoine qui ne differe du foie d’antimoine ordinaire (voyez foie d’antimoine au mot Antimoine) qu’en ce qu’on a fait entrer dans sa préparation au lieu des deux ingrédiens ordinaires, savoir l’antimoine crud & le nitre employés à parties égales, l’antimoine crud, le nitre & le sel marin employés aussi à parties égales.

Le nom de magnésie opaline lui vient de sa couleur ; elle prouve par sa différence d’avec celle du foie d’antimoine ordinaire, que le sel marin a influé réellement sur le changement que le régule d’antimoine a subi dans cette opération : car d’ailleurs on ignore encore parfaitement la théorie de l’action du sel marin dans cette préparation & dans celle des régules medicinaux préparés avec ce sel. Voyez régule d’antimoine medicinal au mot Antimoine.

La magnésie opaline est regardée comme moins émétique que le foie d’antimoine ordinaire, mais cela ne dépend point de la différence reconnue de l’action du nitre sur le régule dans l’une & dans l’autre opération ; car il n’est pas connu que le sel ma-

rin affoiblisse cette action du nitre qui est employé

en même proportion dans les deux opérations. (b)

Magnésie, (Géog. anc.) province de la Macédoine, annexée à la Thessalie ; elle s’étendoit entre le golfe de Thermée & le golfe Pélasgique, depuis le mont Ossa jusqu’à l’embouchure de l’Amphrise. Sa ville capitale portoit le nom de la province, ainsi que son principal promontoire, qu’on appelle à présent Cabo S. Gregorio. Les monts Olympe, Ossa, & Pélion, sont connus des gens les moins lettrés. Aujourd’hui cette province de Magnésie est une presqu’île de la Janna, entre les golfes de Salonique & de Volo. (D. J.)

Magnésie, (Géog. anc.) ville de la Macédoine, dans la province de Magnésie. Pline l’a nommée Pegaza, Pégase, parce qu’elle s’accrut des ruines de cet endroit. Elle étoit située au pié du mont Pélée. Pausanias la met au nombre des trois villes qu’on appelloit les trois clés de la Grece. Philippe s’en empara, en assurant qu’il la rendroit, & se promettant bien de la garder. Le D. d’Albe disoit à un autre Philippe, que les princes ne se gouvernoient point par des scrupules ; & cet autre Philippe prouva, par sa conduite, que cette maxime lui plaisoit. (D. J.)

Magnésie sur le Méandre, (Géog. anc.) ville de l’Asie mineure, dans l’Ionie ; son surnom ad Moeandrum, la distinguoit de Magnésie, ville de Lydie, au pié du mont Sipyle : cependant on l’appelloit aussi Magnésie tout court, parce qu’elle étoit beaucoup plus considérable que Magnésie ad Sipylum, qui avoit besoin de ce surnom. C’est de cette maniere qu’on en a usé dans les médailles qui appartiennent à ces deux villes. Strabon, liv. XIV. pag. 647. nous apprend que la Magnésie d’Ionie n’étoit pas précisément sur le Méandre, & que la riviere Léthée en étoit plus près que ce fleuve, vicinior urbi amnis Lethœus. Scylax donne à Magnésie Ionienne, le titre de ville grecque. Paterculus l’estime une colonie de Lacédémoniens ; & Pline la regarde comme colonie des Magnésiens de Thessalie. Elle a été épiscopale sous la métropole d’Ephese : on la nomme à présent Gusetlissar. (D. J.)

Magnésie ad Sipylum, (Géog. anc.) autrement dite Manachie (on l’appelloit encore Héraclée, selon dionysius dans Eustathe) ville de l’Asie mineure en Lydie, au pié du mont Sipyle, dans un pays assez plat, terminée par une grande plaine, qui mérite un article à part. La victoire que les Romains y remporterent sur Antiochus, rendit célebre cette plaine & la ville, & la montagne au bas de laquelle elle est située. Sous l’empereur Tibere, & du tems de Strabon, la ville fut ruinée par des tremblemens de terre, & rétablie à chaque fois. Elle avoit déjà été pillée antérieurement par Gygès, roi de Lydie, & par les Scythes, qui traiterent les habitans avec la derniere inhumanité : voici la suite de ses autres vicissitudes.

Après la prise de Constantinople par le comte de Flandres, Jean Ducas Vatatze, successeur de Théodore Lascaris, regna dans Magnésie pendant trente-trois ans. Les Turcs s’en rendirent maîtres sous Bajazet ; mais Tamerlan qui le fit prisonnier à la fameuse bataille d’Angora, vint à Magnésie, & y transporta toutes les richesses des villes de Lydie.

Roger de Flor, vice-roi de Sicile, assiégéa cette place sans succès : Amurat y passa à la fin de ses jours. Mahomet II. son fils, forma des environs de Magnésie une petite province, & le grand Soliman II. y résida jusqu’à la mort de son pere. C’est un monsselin & un sardar qui commandent à présent dans Magnésie. Elle n’est pas plus grande que la moitié de la Prusse ; il n’y a ni belles églises, ni beaux caravansérais ; on n’y trafique qu’en coton.