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Me Jean Pitard, chirurgien du roi juré au châtelet de Paris & par ses successeurs. Les récipiendaires devoient prêter serment entre les mains du prevôt de Paris.

Le roi Jean ordonna la même chose au mois d’Avril 1352, avec cette différence seulement que l’inspection sur les Chirurgiens de la ville & vicomté de Paris étoit alors confiée à deux chirurgiens du roi jurés au châtelet.

Ailleurs les Chirurgiens étoient examinés par des maîtres en présence du juge. Cela fut ainsi ordonné par des lettres du roi Jean du 27 Décembre 1362, adressées au sénéchal de Beaucaire, concernant les Juifs qui se mêloient d’exercer la Chirurgie, auxquels il est défendu d’exercer la Physique ni la Chirurgie envers les Chrétiens ni aucuns d’eux, qu’ils n’eussent été examinés en présence du sénéchal ou autres gens de ladite sénéchaussée par des maîtres ou autres Chrétiens experts èsdites sciences.

Dans d’autres endroits ces Chirurgiens faisoient membres des universités, & y étoient admis à la maîtrise en présence du recteur : c’est ce qui a été observé en Provence jusqu’au rétablissement des lieutenans du premier chirurgien du roi.

En 1655 les maîtres en l’art & science de Chirurgie de Paris, connus pour lors sous le nom de Chirurgiens de robe longue, s’étant réunis avec la communauté des Chirurgiens-Barbiers ; & peu de tems après, le sieur Felix, premier chirurgien, ayant aussi acquis la charge de premier valet-de-chambre barbier, les deux places & les deux états de Chirurgiens se confondirent en un seul, & demeurerent soumis au même chef premier chirurgien du roi. Le sieur Felix obtint au mois d’Août 1668, un arrêt du conseil & des lettres patentes, par lesquels les droits & privileges, auparavant attribués à la charge de premier barbier du roi, furent unis à celle de premier chirurgien, ensorte que depuis ce tems la jurisdiction du premier chirurgien du roi s’étend non seulement sur les Chirurgiens, Sage-femmes & autres, mais aussi sur les Barbiers-Perruquiers, Baigneurs-Etuvistes.

Quoique les Barbiers-Perruquiers forment présentement un corps entierement distinct & séparé de celui des Chirurgiens ; & que par la déclaration du 23 Avril 1743, les Chirurgiens de Paris ayent été rétablis dans leurs anciens droits & privileges, cette déclaration a néanmoins conservé au premier chirurgien l’inspection sur ces deux corps, avec le titre de chef de la Chirurgie pour ce qui concerne les Chirurgiens, & celui d’inspecteur & directeur général commis par sa Majesté en ce qui regarde la barberie & la profession de perruquier, avec injonction de veiller à ce qu’aucun desdits corps n’entreprenne sur l’autre.

Le premier chirurgien du Roi exerce cette jurisdiction à Paris & dans toutes les communautés de Chirurgiens & de Perruquiers du royaume par des lieutenans qu’il commet à cet effet, & auxquels il donne des provisions.

Dans les communautés de Chirurgiens, les lieutenans doivent être choisis dans le nombre des maîtres de la communauté. Ils jouissent des exemptions de logemens de gens de guerre, de guet & garde, collecte, tutelle, curatelle, & autres charges de ville & publiques.

L’établissement de ces lieutenans remonte à plusieurs siecles ; ils furent néanmoins supprimés dans les villes de province seulement par l’édit du mois de Février 1692, portant création d’offices formés & héréditaires de Chirurgiens-jurés royaux commis pour les rapports, auxquels S. M. attribua les mêmes droits dont avoient joui jusques-là les lieutenans du premier chirurgien. Comme ceux auxquels

ces offices passoient à titre d’hérédité étoient souvent incapables d’en remplir les fonctions, on ne fut pas long-tems à s’appercevoir des abus & des inconvéniens qui résultoient de ce nouvel arrangement, & de la nécessité de rétablir les lieutenans du premier chirurgien, ce qui fut fait par édit du mois de Septembre 1723.

Les lieutenans du premier chirurgien subsistent donc depuis ce tems, à la satisfaction & au grand avantage des communautés, par l’attention que les premiers chirurgiens ont de ne nommer à ces places que les sujets qui sont les plus propres pour les remplir.

Les lieutenans du premier chirurgien, dans les communautés de Perruquiers sont également chargés de faire observer les réglemens de cette profession au nom du premier chirurgien. Ceux-ci acquierent par leur nomination le droit d’exercer le métier de perruquier sans qu’ils ayent besoin d’être préalablement admis à la maîtrise dans ces communautés.

Le premier chirurgien commet aussi des greffiers dans chacune de ces communautés pour tenir les registres & écrire les délibérations. Voy. Greffier du premier chirurgien.

J’ai profité pour cet article & pour quelques autres qui y ont rapport, des mémoires & instructions que M. d’Olblen, secrétaire de M. le premier-chirurgien du Roi a eu la bonté de me fournir. (A)

Jurisdiction civile. Voyez Justice civile.

Jurisdiction coactive est celle qui a le pouvoir de faire exécuter ses jugemens. Les arbitres n’ont point de jurisdiction coactive ; leur pouvoir se borne à juger : On dit aussi que l’Eglise n’a point par elle-même de jurisdiction coactive, c’est à dire qu’en vertu de la jurisdiction spirituelle qu’elle tient de droit divin, elle ne peut se faire obéir que par des censures, sans pouvoir exercer aucune contrainte extérieure sur les personnes ni sur les biens ; elle ne peut même pour la jurisdiction qu’elle tient du prince, mettre ses jugemens à exécution ; il faut qu’elle implore l’ordre du bras séculier, parce qu’elle n’a point de territoire. Voyez Jurisdiction ecclésiastique. (A)

Jurisdiction commise est celle dont le magistrat commet l’exercice à une autre personne.

On confond souvent la jurisdiction commise avec la jurisdiction déléguée ; on faisoit cependant une différence chez les Romains, inter eum cui mandata erat jurisdictio, celui auquel la jurisdiction étoit entierement commise, & judicem datum qui n’étoit qu’un délégué spécial, & souvent qu’un subdélégué pour le jugement d’une certaine affaire.

Celui auquel la jurisdiction étoit commise, avoit toute l’autorité de la justice ; il prononçoit lui-même ses sentences, & avoit le pouvoir de les faire exécuter, au lieu que le simple délégué ou subdélégué n’avoit simplement que le pouvoir de juger. Sa sentence n’étoit que comme un avis, jusqu’à ce que le magistrat l’eût approuvée, soit en la prononçant lui-même, pro tribunali, soit en décernant la commission pour l’exécuter.

Parmi nous il n’est pas permis aux magistrats de commetre entierement à d’autres personnes la jurisdiction qui leur est confiée ; ils peuvent seulement commettre l’un d’entr’eux pour certaines fonctions qui concernent l’instruction des affaires, mais non pas pour les décider : s’ils renvoyent quelquefois devant des avocats, ou devant d’autres personnes, pour en passer par leur avis ; ce n’est que sous la condition que ces avis seront homologués, sans quoi on ne peut les mettre à exécution.

Mais les cours supérieures peuvent commettre un juge inférieur au lieu d’un autre, pour connoître