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toutes desertes, grandes & petites. C’est cependant par elles que Christophe Colomb découvrit le nouveau monde ; il les appella Lucayes, parce qu’il apprit que leurs habitans se nommoient ainsi. Les Espagnols les ont dépeuplées par la rage funeste de s’enrichir, employant ces malheureux insulaires a l’exploitation des mines de Saint-Domingue.

LUCAYONEQUE, (Géogr.) l’une des grandes îles Lucayes dans l’Amérique septentrionale. Elle est deserte, toute entourée d’écueils au nord, à l’orient & au couchant. Long. 300. lat. 26. 27. (D. J.)

LUCCIOLE, s. f. (Hist. nat. Insectiolog.) mouche luisante ; il y en a une prodigieuse quantité près de Samagia, les haies en sont couvertes ; elles en font comme des buissons ardens. Elles sont à-peu-près de la forme des hannetons, mais plus petites : l’endroit brillant est sous le ventre ; c’est un petit poil velouté de couleur citron, qui s’épanouit à chaque coup d’aîle, & qui jette en même tems un trait de lumiere.

LUCE, eau de, (Chimie & Mat. med.) l’eau de luce est une liqueur laiteuse, volatile, très-pénétrante, formée par la combinaison de l’esprit volatil de sel ammoniac, avec une petite portion d’huile de karabé.

Cette eau, dont feu M. du Balen, apoticaire de Paris, a eu seul le secret pendant long-tems, a excité la curiosité des Chimistes. Quelques-uns ne connoissant cette nouvelle liqueur que par réputation, l’ont confondue avec une autre eau volatile de couleur bleue qui a fait du bruit à Paris, sous le nom du sieur Luce, apoticaire de Lille en Flandre ; les autres, plus à portée d’analyser l’eau de luce du sieur du Balen, en ont d’abord reconnu les principes constitutifs.

Il seroit trop long de faire ici l’énumération de tous les procédés que l’envie de découvrir le mystere de cette préparation a fait imaginer ; il suffit de rappeller que tous ces procédés se réduisent à trouver un intermede qui rende miscible l’esprit de sel ammoniac à l’huile de karabé. Celui que M. de Machi vient de rendre public, est un des plus raisonnables & des plus ingénieux : l’eau de luce qui en résulte est blanche, pénétrante, & paroît avoir toutes les qualités de l’eau de luce du sieur du Balen. Malgré ces avantages, nous sommes fondés à avancer que le procédé de M. de Machi n’est pas le plus simple qu’il soit possible d’employer, puisqu’il se sert de l’intermede de l’esprit-de-vin pour combiner l’esprit volatil avec l’huile, & que tout intermede devient inutile pour cette combinaison, puisqu’elle peut s’exécuter par le seul rapport de ces deux principes : elle s’execute en effet par le procédé suivant.

Mettez dans un flacon de crystal quelques gouttes d’huile blanche de karabé rectifiée, versez dessus le double de bon esprit volatil de sel ammoniac ; bouchez le flacon avec son bouchon de crystal, & portez-le pendant quelques jours dans la poche de la culotte, la plus grande partie de l’huile se dissoudra. Ajoutez pour lors une pareille quantité du même esprit volatil ; & après avoir laissé le tout en digestion à la même chaleur pendant quelques jours encore, vous trouverez l’huile entierement combinée avec l’alkali volatil, sous la forme & la consistence d’un lait clair de couleur jaunâtre. Ce produit n’est proprement qu’une espece de savon ressout. Conservez-le dans le même flacon exactement fermé.

Il est essentiel, pour le succès de ce procédé, de n’exposer à l’action de l’alkali volatil que trois ou quatre gouttes d’huile de karabé ; si on emploie cette derniere matiere jusqu’à la quantité d’un gros, le procédé ne réussit point.

Pour faire l’eau de luce, il suffit de verser quelques gouttes du savon que nous venons de décrire sur de

l’esprit volatil de sel ammoniac bien vigoureux : on en ajoute plus ou moins à une quantité donnée d’esprit volatil, suivant le degré de blancheur & d’odeur de karabé qu’on veut donner à son eau de luce. Extrait de deux écrits de M. Betbeder, medecin de Bordeaux, insérés dans le recueil périodique d’observations de Medecine, &c. l’un au mois d’Octobre 1756, & l’autre au mois de Mai 1757.

Le procédé de M. de Machi dont il a été fait mention au commencement de cet article, est rapporté dans le même ouvrage périodique au mois de Juin 1756 : voici ce procédé.

Prenez un gros d’huile de succin extrèmement blanche, faites-la dissoudre dans suffisante quantité d’esprit-de-vin : il en faudra bien près de deux onces. Ajoutez-y deux autres onces d’esprit-de-vin, & servez-vous de cette dissolution pour préparer le sel volatil ammoniac suivant la méthode ordinaire ou celle qu’on emploie pour les esprits ou les sels volatils aromatiques huileux. Cette liqueur vous servira à blanchir de bon esprit volatil préparé avec la chaux vive, & la liqueur blanche ne sera sujette à aucun changement ; elle sera toujours laiteuse, ne fera jamais de dépôt, & remplira par conséquent toutes les conditions desirées pour faire une bonne eau de luce. Quelques gouttes de la premiere liqueur suffisent, mais on ne craint rien de la surabondance : l’auteur en a mélangé presque à partie égale d’esprit volatil, & la liqueur étoit seulement plus épaisse & plus blanche, à-peu-près comme est du bon lait de vache, & sans qu’il ait paru le plus leger sédiment.

L’eau de luce n’a de vertus réelles que celles de l’esprit volatil de sel ammoniac, tant dans l’usage intérieur que dans l’usage extérieur. La très-petite portion d’huile de succin qu’elle contient, ne peut être comptée pour rien dans l’action d’un remede aussi efficace. Voyez Sel ammoniac & Sel volatil. (b)

LUCENSES, (Géog. anc.) peuple ancien d’Italie au pays des Marses, selon Pline, liv. III. ch. xij. édition du P. Hardouin. Ce peuple tiroit son nom du bourg Lucus, & ce bourg tiroit le sien d’un bois, le même que Virgile nomme Angitiæ nemus.

LUCERA, (Géog.) c’est la Lucéria des Romains, ancienne ville d’Italie au royaume de Naples, dans la Capitanate, avec un évêché suffragant de Bénevent. Les Italiens la nomment Lucera delli pagani ; ce surnom lui vient de ce que l’empereur Constance l’ayant ruinée, Frédéric II. en fit présent aux Sarrazins pour demeure, à condition de la réparer ; mais ensuite Charles II. roi de Naples les en chassa. Elle est à 8 lieues S. O. de Manfrédonia. Long. 32. 59. lat. 41. 28. (D. J.)

LUCERES, s. m. pl. (Littér.) nom de la troisieme tribu du peuple romain, au commencement de la fondation. Romulus, dit Varron de ling. lat. lib. IV. divisa les habitans de la nouvelle ville en trois tribus ; la premiere fut appellée les Tatiens, qui prirent ce nom de Tatius ; la seconde les Rhamnes, ainsi nommés de Romulus ; & la troisieme les Luceres, qui tiroient leur nom de Lucumon. (D. J.)

LUCÉRIE, Luceria, (Géogr. anc.) aujourd’hui Lucera, étoit une ville considérable d’Italie dans la Pouille daunienne, aux confins des Hirpins, avec le titre de colonie romaine. C’est la Nuceria Apulorum de Ptolomée liv. III. ch. j. Ses peuples sont nommés Lucerini dans Tite-Live. Ses paturages passoient pour excellens : les laines de ses troupeaux, au rapport de Strabon, quoiqu’un peu moins blanches que celles de Tarente, étoient plus fines, plus douces & plus estimées. Horace, ode 15. liv. III. assure Chloris qu’elle n’a point de graces à jouer du luth & à se couronner de roses, & qu’elle n’est propre qu’à filer des laines de Lucerie.