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famille, se hereditatem adeptum esse, sine sacris, effertissimam.

La femme unie juxtà sacratas leges, ou pour m’exprimer avec les jurisconsultes, justis nuptiis, devenoit maîtresse de la famille, comme le mari en étoit le maître.

On sait qu’après la conclusion du mariage la mariée se présentoit sur le seuil de la porte, & qu’alors on lui demandoit qui elle étoit ; elle répondoit à cette question, ego sum Caïa, je suis Caïa, parce que Caïa Cecilia, femme de Tarquin l’ancien, avoit été fort attachée à son mari & à filer ; ensuite on lui présentoit le feu & l’eau, pour lui marquer qu’elle devoit avoir part à toute la fortune de son mari. Plutarque nous apprend encore, dans la troisieme question romaine, que le mari disoit à son épouse, lorsqu’elle le recevoit à son tour chez elle, ego sum Caïus, je suis Caïus, & qu’elle lui repliquoit de nouveau, ego Caïa, & moi je suis Caïa. Ces sortes d’usages peignent les mœurs, ils se sont perdus avec elles. (D. J.)

Lois saintes. Les lois sont ainsi appellées, parce que le respect leur est dû, sub sanctione pœnæ ; c’est pourquoi elles sont mises au nombre des choses que l’on appelle en Droit res sanctæ. Voyez aux instit. le tit. de rev. divis. & les annotateurs. (A)

Loi de saint Benoist ; c’est ainsi que l’on appelle vulgairement dans le pays de Labour le droit que les habitans de chaque paroisse ont de s’assembler pour leurs affaires communes, & de faire des statuts particuliers pour leurs bois padouans & paturages, pourvu que leurs délibérations ne soient pas préjudiciables au bien public & aux ordonnances du roi. Ce droit est ainsi appellé dans les coutumes de Labour, tit. XX. article 4 & 5. Voyez aussi celle de Sole, tit. I. art. 4. & 5 ; & la conférence des eaux & forêts, titre XXV. article 7. (A)

Loi salique, lex salica ou plûtôt pactum legis salicæ, appellée aussi lex Francorum seu francica ; étoit la loi particuliere des Francs qui habitoient entre la Meuse & le Rhin, comme la loi des Ripuaires étoit celle des Francs qui habitoient entre la Loire & la Meuse.

Il y a beaucoup d’opinions diverses sur l’origine & l’étymologie de la loi salique ; nous ne rapporterons ici que les plus plausibles.

Quelques-uns ont prétendu que cette loi avoit été nommée salica, parce qu’elle avoit été faite en Lorraine sur la petite riviere de Scille, appellée en latin Salia, laquelle se jette dans la Moselle.

Mais cette étymologie ne peut s’accorder avec la préface de la loi salique, qui porte qu’elle avoit été écrite avant que les Francs eussent passé le Rhin.

Ceux qui l’attribuent à Pharamond, disent qu’elle fut nommée salique de Salogast, l’un des principaux conseillers de ce prince, ou plûtôt duc ; mais du Tillet remarque que Salogast n’étoit pas un nom propre, que ce mot signifioit gouverneur des pays saliens. On tient donc que cette loi fut d’abord rédigée l’an 422 en langue germanique, avant que les Francs eussent passé le Rhin ; mais cette premiere rédaction ne se trouve plus.

D’autres veulent que le mot salica vienne de sala, qui signifie maison, d’où l’on appella terre salique celle qui étoit autour de la maison, & que la loi dont nous parlons ait pris le surnom de salica, à cause de la disposition fameuse qu’elle contient au sujet de la terre salique, & qui est regardée comme le titre qui assure aux mâles la couronne à l’exclusion des femelles.

D’autres encore tiennent, & avec plus de raison, que la loi salique a été ainsi nommée, comme étant la loi des Francs Saliens, c’est-à-dire de ceux qui ha-

bitoient le long de la riviere de Sala, fleuve de l’ancienne

Germanie.

D’autres enfin croient que les François Saliens du nom desquels fut surnommée la loi salique, étoient une milice ou faction de Francs qui furent appellés Saliens à saliendo, parce que cette milice ou nation faisoit des courses imprevûes hors de l’ancienne France sur la Gaule. Et en effet, les François Saliens étoient cités par excellence, comme les peuples les plus legers à la course, suivant ce que dit Sidon Apollinaire, sauromata clypeo, salius pede, falce gelonus.

Quoi qu’il en soit de l’étymologie du nom des Saliens, il paroît certain que la loi salique étoit la loi de ce peuple, & que son nom est dérivé de celui des Saliens ; c’étoient les plus nobles des Francs, lesquels firent la conquête d’une partie des Gaules sur les Romains.

Au surplus, telle que soit aussi l’étymologie du surnom de salique donné à cette loi, on entend par loi salique la loi des Francs ou premiers François, ce qui se prend en deux sens, c’est-à-dire ou pour le droit public de la nation qui comprend, comme disent les Jurisconsultes, tout ce qui sert à conserver la religion & l’état ; ou le droit des particuliers, qui sert à régler leurs droits & leurs différends les uns par rapport aux autres.

Nous avons un recueil des lois de nos premiers ancêtres : il y en a deux textes assez différens pour les termes, quoiqu’à peu de chose près les mêmes pour le fond ; l’un encore à moitié barbare, est celui dont on se servoit sous la premiere race, l’autre réformé & publié par Charlemagne en 798.

Le premier texte est celui qui nous a d’abord été donné en 1557 par Herold, sur un manuscrit de la bibliotheque de Fuld, qui, au jugement d’Herold, avoit 700 ans d’antiquité ; ensuite en 1720 par M. Eccard, sur un manuscrit de la bibliotheque du duc de Volfenbutel, écrit au commencement de la seconde race. Enfin, en 1727 par Schelter, sur un manuscrit de la bibliotheque du Roi, n°5189. Ce texte a 80 articles, ou plûtôt 80 titres dans le manuscrit de M. Fuld, 94 dans le manuscrit de Volfenbutel, 100 dans le manuscrit du Roi.

Le second texte est celui que nous ont donné du Tillet, Pithou, Goldast, Lindenbrog, le célebre Bignon & Baluse, qui l’avoit revû sur onze manuscrits. Il n’a que 71 articles, mais avec une remarque que ce nombre varie beaucoup dans divers exemplaires.

Goldast a attribué ce recueil à Pharamond, & a supposé en conséquence le titre qu’il lui a donné dans son édition. M. Eccard rejette avec raison cette opinion, qui n’est fondée sur aucune autorité : car l’auteur même des Gestes qui parle de l’établissement de cette loi, après avoir rapporté l’élection de Pharamond, ne la lui attribue pas, mais aux chefs de la noblesse & premiers de la nation. Quæ consiliarii eorum priores gentiles, ou, suivant une autre leçon, quæ eorum priores gentiles tractaverunt ; & de la façon dont sa narration est disposée, il fait entendre que l’élection de Pharamond & l’institution des lois, se firent en même tems. Après la mort de Sunnon, dit-il, ils résolurent de se réunir sous le gouvernement d’un seul roi, comme étoient les autres nations ; ce fut aussi l’avis de Marchomir ; & ils choisirent Pharamond son fils. C’est aussi alors qu’ils commencerent à avoir des lois qui furent dressées par leurs chefs & les premiers de la nation, Salogan, Bodogan & Widogan, au-delà du Rhin à Salehaim, Bodehaim & Widehaim. Cette loi fut dressée dans l’assemblée des états de chacune de ces provinces, c’est pourquoi elle n’est pas intitulée lex simplement, mais pactum legis salicæ.

L’ancienne préface du recueil, écrite à ce qu’il