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de diametre, & de toute la longueur du métier, est nommée ainsi, parce qu’elle enfile les lisses qui font croiser les fils de la chaîne. Elle fait à-peu-près dans le métier de haute-lisse, ce que font les marches dans celui des Tisserands.

Les lisses sont de petites cordelettes attachées à chaque fil de la chaîne avec une espece de nœud coulant aussi de ficelle, qui forme une espece de maille ou d’anneau : elles servent à tenir la chaîne ouverte pour y pouvoir passer les broches qui sont chargées des soies, des laines, ou autres matieres qui entrent dans la fabrique de la haute lisse.

Enfin, il y a quantité de petits bâtons, ordinairement de bois de saule, de diverses longueurs, mais tous d’un pouce de diametre, que le hautelissier tient auprès de lui dans des corbeilles pour s’en servir à croiser les fils de la chaîne, en les passant à-travers, d’où ils sont nommés bâtons de croisure ; & afin que les fils ainsi croisés se maintiennent toûjours dans un arrangement convenable, on entrelace aussi entre les fils, mais au-dessus du bâton de croisure, une ficelle à laquelle les ouvriers donnent le nom de fleche.

Lorsque le métier est dressé & la chaîne tendue, la premiere chose que doit faire le hautelissier, c’est de tracer sur les fils de cette chaîne les principaux traits du dessein qu’il veut qui soit représenté dans sa piece de tapisserie ; ce qui se fait en appliquant du côté qui doit servir d’envers, des cartons conformes au tableau qu’il copie, & puis en suivant leurs contours avec de la pierre noire sur les fils du côté de l’endroit, en sorte que les traits paroissent également & devant & derriere ; & afin qu’on puisse dessiner plus sûrement & plus correctement, on soutient les cartons avec une longue & large table de bois.

A l’égard du tableau ou dessein original sur lequel l’ouvrage doit s’achever, il est suspendu au dos du hautelissier, & roulé sur une longue perche de laquelle on en déroule autant qu’il est nécessaire, & à mesure que la piece s’avance.

Outre toutes les pieces du métier dont on vient de parler, qui le composent, ou qui y sont pour la plûpart attachées, il faut trois principaux outils ou instrumens pour placer les laines ou soies, les arranger & les serrer dans les fils de la chaîne. Les outils sont une broche, un peigne, & une aiguille de fer.

La broche est faite de bois dur, comme de buis ou autre semblable espece : elle est de sept à huit pouces de longueur, de huit lignes environ de grosseur & de figure ronde, finissant en pointe avec un petit manche. C’est sur cet instrument qui sert comme de navette, que sont dévidées les soies, les laines, ou l’or & l’argent que l’ouvrier doit employer.

Le peigne est aussi de bois, de huit à neuf pouces de longueur & d’un pouce d’épaisseur du côté du dos, allant ordinairement en diminuant jusqu’à l’extrémité des dents qui ont plus ou moins de distance les unes des autres, suivant le plus ou le moins de finesse de l’ouvrage.

Enfin l’aiguille de fer, qu’on appelle aiguille à presser, a la forme des aiguilles ordinaires, mais plus grosse & plus longue. Elle sert à presser les laines & les soies, lorsqu’il y a quelque contour qui ne va pas bien : le fil de laine, de soie, d’or ou d’argent, dont se couvre la chaîne des tapisseries, & que dans les manufactures d’étoffes on appelle treme, se nomme assure parmi les hautelissiers françois.

Toutes choses étant préparées pour l’ouvrage, & l’ouvrier le voulant commencer, il se place à l’envers de la piece, le dos tourné à son dessein ; de sorte qu’il travaille, pour ainsi dire, à l’aveugle, ne voyant rien de ce qu’il fait, & étant obligé de se déplacer, & de venir au-devant du métier, quand

il veut en voir l’endroit & en examiner les défauts pour les corriger avec l’aiguille à presser.

Avant de placer ses soies ou ses laines, le hautelissier se tourne & regarde son dessein ; ensuite dequoi ayant pris une broche chargée de la couleur convenable, il la place entre les fils de la chaîne qu’il fait croiser avec les doigts par le moyen des lisses attachées à la perche ; ce qu’il recommence chaque fois qu’il change de couleur. La soie ou la laine étant placée, il la bat avec le peigne ; & lorsqu’il en a mis plusieurs rangées les unes sur les autres, il va voir l’effet qu’elles font pour en réformer les contours avec l’aiguille à presser, s’il en est besoin.

Quand les pieces sont larges, plusieurs ouvriers y peuvent travailler à la fois : à mesure qu’elles s’avancent, on roule sur l’ensuble d’en-bas ce qui est fait, & on déroule de dessus celle d’en-haut autant qu’il faut de la chaîne pour continuer de travailler ; c’est à quoi servent le grand & petit tentoy. On en fait à proportion autant du dessein que les ouvriers ont derriere eux. Voyez nos Pl. de Tapiss. & leur expl.

L’ouvrage de la haute-lisse est bien plus long à faire que celui de la basse-lisse, qui se fait presque deux fois aussi vîte. La différence qu’il y a entre ces deux tapisseries, consiste en ce qu’à la basse-lisse il y a un filet rouge, large d’environ une ligne qui est mis de chaque côté du haut en-bas, & que ce filet n’est point à la haute-lisse. Dict. du Com. & Chambers.

Lisse, (Tapissier.) les Tapissiers de haute-lisse & de basse-lisse, les Sergiers, les Rubaniers, ceux qui fabriquent des brocards, & quelques autres ouvriers, nomment lisse, ce qu’on appelle chaîne dans les métiers de Tisserans & des autres fabriquans de draps & d’étoffes, c’est-à-dire les fils étendus de long sur le métier, & roulés sur les ensubles, à-travers desquels passent ceux de la treme. Voyez Chaîne.

Haute-lisse, c’est celle dont la lisse ou chaîne est dressée debout & perpendiculairement devant l’ouvrier qui travaille ; la basse-lisse étant montée sur un métier posé parallelement à l’horison, c’est-à-dire, comme le métier d’un tissérand. Voyez Haute-lisse & Basse-lisse.

Lisses. Les Haute-lissiers appellent ainsi de petites ficelles ou cordelettes attachées à chaque fil de la chaîne de la haute lisse avec une espece de nœud coulant en forme de maille ou d’anneau aussi de ficelle. Elles servent à tenir la chaîne ouverte, & on les baisse ou on les leve par le moyen de ce qu’on appelle la perche de lisse, où elles sont toutes enfilées. Voyez Haute-lisse.

Lisse haute, (Tapissier.) ce sont des étoffes dont la chaîne est purement de soie & la treme de laine, ou qui sont toutes de soie, comme les serges de Rome, les dauphines, les étamines, les férandines & burats, les droguets de soie. Ou leur donne le nom d’hautelisse dans la sayetterie d’Amiens.

LISSÉ, adj. (Jardinage.) il se dit d’un fruit qui a l’écorce toute unie, tel que le marron, la châtaigne dépouillés de leur premiere cosse.

Lissé, grand lissé, c’est, parmi les Confiseurs, du sucre cuit assez pour former un filet assez fort pour ne point se rompre en ouvrant les deux doigts qu’on y a trempés, & pour prendre ainsi une assez grande étendue.

Lissé, petit, c’est quand le sucre fait entre les deux doigts un filet imperceptible & très-aisé à être rompu pour peu qu’on écarte les doigts.

LISSER, v. act. c’est passer ou polir à la lisse. Voyez l’article Lisse.

Lisser, perche à, terme de Cartier, c’est une perche de bois suspendue au plancher par un anneau de fer, & qui par l’autre bout descend sur l’établi du lisseur. Cette perche a à son extrémité une entaille dans la-