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brin dans deux mailles de la lisse, pour être susceptibles de ce double mouvement.

Lisses, Hautes, Voyez Lisses : les hautes lisses enlisseronnées sont au nombre de vingt-quatre & quelquefois davantage ; elles sont suspendues dans le châtelet, elles portent jusqu’à deux cents mailles chacune ; de sorte, que si l’on ne vouloit passer qu’une seule rame dans chaque maille, les hautes lisses en porteroient 4800, elles peuvent cependant en porter davantage au moyen de l’emprunt. Voyez Emprunt. Elles servent par le secours des retours à faire hausser les rames qu’elles contiennent, passées suivant l’ordre du patron, pour operer la levée de chaîne nécessaire au passage de la navette.

Lisses, (Manufact. en soie) ce sont des boucles de fil entrelacées, dans lesquelles on passe les fils de la chaîne pour les faire lever ou baisser ; il y en a de diverses sortes.

Les lisses à grand colisse servent à passer les fils de poil dans les étoffes riches. Elles sont composées d’une maille haute & d’une maille basse alternativement, de façon que le colisse a environ 3 pouces de longueur. L’action de ces lisses est de faire baisser ou hausser le fil, selon que l’ouvriere l’exige.

Les lisses à petit-colisse, sont à petites boucles, arrêtées par un nœud ; elles ne servent qu’aux étoffes unies. On donne le même nom à celles dont la maille est alternativement, l’une sur une ligne plus basse que l’autre, afin que les fils disposés sur une hauteur inégale, ne se frottent pas, comme il arriveroit s’ils étoient sur une même ligne.

Les lisses de rabat, ce sont celles sous la maille desquelles les fils sont passés pour les faire baisser.

Les lisses de liage, ce sont celles sous lesquelles les fils qui doivent lier la dorure dans les étoffes sans poil, sont passés pour les faire baisser.

Lisse basse, (Tapissier) espece de tissu ou tapisserie de soie ou de laine, quelquefois rehaussée d’or & d’argent, où sont représentées diverses figures de personnages, d’animaux, de paysages ou autres semblables choses, suivant la fantaisie de l’ouvrier, ou le goût de ceux qui les lui commandent.

La basse-lisse est ainsi nommée, par opposition à une autre espece de tapisserie qu’on nomme haute-lisse ; non point de la différence de l’ouvrage, qui est proprement le même, mais de la différence de la situation des métiers sur lesquels on les travaille ; celui de la basse-lisse étant posé à plat & parallelement à l’horison, & celui de la haute-lisse étant dressé perpendiculairement & tout de bout.

Les ouvriers appellent quelquefois basse-marche, ce que le public ne connoît que sous le nom de basse-lisse ; & ce nom de manufacture lui est donné, à cause des deux marches que celui qui les fabrique a sous les piés, pour faire hausser & baisser les lisses, ainsi qu’on l’expliquera dans la suite, en expliquant la maniere d’y travailler. Voyez Haute-lisse.

Fabrique de basse-lisse. Le métier sur lequel se travaille la basse-lisse est assez semblable à celui des tisserans. Les principales pieces sont les roines, les ensubles ou rouleaux ; la camperche, le cloud, le wich, les tréteaux ou soutiens, & les arcs-boutans. Il y en a encore quelqu’autres, mais qui ne composent pas le métier, & qui servent seulement à y fabriquer l’ouvrage, comme sont les sautriaux, les marches, les lames, les lisses, &c.

Les roines sont deux fortes pieces de bois, qui forment les deux côtés du chassis ou métier & qui portent les ensuples pour donner plus de force à ces roines ; elles sont non-seulement soutenues par-dessous avec d’autres fortes pieces de bois en forme de tréteaux, mais afin de les mieux affermir, elles sont encore arcboutées au plancher, chacune avec

une espece de soliveau, qui les empêche d’avoir aucun mouvement, bien qu’il y ait quelquefois jusqu’à quatre ou cinq ouvriers appuyés sur l’ensuble de devant qui y travaillent à la fois. Ce sont ces deux soliveaux qu’on appelle les arcs-boutans.

Aux deux extrémités des roines sont les deux rouleaux ou ensuples, chacune avec ses deux tourillons & son wich. Pour tourner les rouleaux, on se sert du clou, c’est-à-dire, d’une grosse cheville de fer longue environ de trois piés.

Le wich des rouleaux est un long morceau, ou plutôt une perche de bois arrondie au tour, de plus de deux pouces de diametre, à peu près de toute la longueur de chaque ensuble ; une rainure qui est creusée tout le long de l’un & l’autre rouleau, enferme le wich qui la remplit entierement, & qui y est affermi & arrêté de distance en distance par des chevilles de bois. C’est à ces deux wichs que sont arrêtées les deux extrémités de la chaîne, que l’on roule sur celui des rouleaux qui est opposé au basselissier ; l’autre sur lequel il s’appuie en travaillant, sert à rouler l’ouvrage à mesure qu’il s’avance.

La camperche est une barre de bois, qui passe transversalement d’une roine à l’autre, presqu’au milieu du mérier, & qui soutient les sautriaux, qui sont de petits morceaux de bois à peu près de la forme de ce qu’on appelle le fléau dans une balance. C’est à ces sautriaux que sont attachées les cordes qui portent les lames avec lesquelles l’ouvrier, par le moyen des deux marches qui sont sous le métier, & sur lesquelles il a les piés, donne du mouvement aux lisses, & fait alternativement hausser & baisser les fils de la chaîne. Voyez Lames, Lisse.

Le dessein ou tableau que les Basselissiers veulent imiter, est placé au-dessous de la chaîne, où il est soutenu de distance en distance par trois cordes transversales, ou même plus s’il en est besoin : les extrémités de chacune aboutissent, & sont attachées des deux côtés aux roines, à une mentonniere qui en fait partie. Ce sont ces cordes qui font approcher le dessein contre la chaîne.

Le métier étant monté, deux instrumens servent à y travailler ; l’un est le peigne, ce qu’en terme de basse-lisse on nomme la flûte.

La flûte tient lieu dans cette fabrique de la navette des Tisserans. Elle est faite d’un bois dur & poli, de trois ou quatre lignes d’épaisseur par les bouts, & d’un peu moins par le milieu. Sa longueur est de 3 ou 4 pouces. Les deux extrémités sont aiguisées en pointe, afin de passer plus aisément entre les fils de la chaîne. C’est sur la flûte que sont dévidées les laines & les autres matieres qu’on veut employer à la tapisserie.

A l’égard du peigne, qui a ordinairement des dents des deux côtés, il est ou de buis ou d’ivoire. Son épaisseur dans le milieu est d’un pouce, qui va on diminuant des deux côtés jusqu’à l’extrémité des dents : sa longueur est de six ou sept pouces. Il sert à serrer les fils de la treme les uns contre les autres à mesure que l’ouvrier les a passés & placés avec la flûte entre ceux de la chaîne.

Lorsque le basselissier veut travailler (ce qui doit s’entendre aussi je plusieurs ouvriers, si la largeur de la piece permet qu’il y en ait plusieurs qui travaillent à la fois), il se met au-devant du métier, assis sur un banc de bois, le ventre appuyé sur l’ensuble, un coussin ou oreiller entre deux ; & en cette posture, séparant avec le doigt les fils de la chaine, afin de voir le dessein, & prenant la flûte chargée de la couleur convenable, il la passe entre ces fils, après les avoir haussés ou baissés par le moyen des lames & des lisses, qui font mouvoir les marches sur lesquelles il a les piés ; ensuite pour serrer la laine ou la soie qu’il a placée, il la frappe avec le peigne, à