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autre cachet ou petit cachet du roi, qui est celui dont ces sortes de lettres sont présentement fermées ; c’est pourquoi on les a appellées lettres de cachet ou de petit cachet. Ce cachet du roi étoit autrefois appellé le petit signet : le roi le portoit sur soi, à la différence du scel secret, qui étoit porté par un des chambellans. Le roi appliquoit quelquefois ce petit signet aux lettres-patentes, pour faire connoître qu’elles étoient scellées de sa volonté. C’est ce que l’on voit dans des lettres de Philippe VI. du 16 Juin 1349, adressées à la chambre des comptes, à la fin desquelles il est dit : & ce voulons être tenu & gardé.... sans rien faire au contraire pour quelconques prieres que ce soit, ne par lettres se notre petit signet que nous portons n’y étoit plaqué & apparent. On trouve dans les ordonnances de la troisieme race deux lettres closes ou de cachet, du 19 Juillet 1367, l’une adressée au parlement, l’autre aux avocat & procureur général du roi pour l’exécution de lettres patentes du même mois. Ces lettres de cachet qui sont visées dans d’autres lettres patentes du 27 du même mois, sont dites signées de la propre main du roi, sub signeto annuli nostri secreto. Ainsi le petit signet ou cachet, ou petit cachet du roi, étoit alors l’anneau qu’il portoit à son doigt.

L’ordonnance de Charles V. du dernier Février 1378, porte que le roi aura un signet pour mettre ès-lettres, sans lequel nul denier du domaine ne sera payé.

Il est aussi ordonné que les assignations d’arrérages, dons, transports, aliénations, changemens de terre, ventes & compositions de ventes à tems, à vie, à héritage ou à volonté, seront signées de ce signet, & autrement n’auront point d’effet.

Que les gages des gens des comptes seront renouvellés par chacun an par mandement & lettres du roi, signées de ce signet, & ainsi seront payés & non autrement.

Les lettres que le roi adresse à ses cours concernant l’administration de la justice, sont toûjours des lettres patentes & non des lettres closes ou de cachet, parce que ce qui a rapport à la justice, doit être public & connu de tous, & doit porter la marque la plus authentique & la plus solemnelle de l’autorité du roi.

Dutillet, en son recueil des ord. des rois de France, part. I. p. 416. parle d’une ordonnance de Philippe-le-Long, alors régent du royaume, faite à S. Germain-en-Laie au mois de Juin 1316. (cette ordonnance ne se trouve pourtant pas dans le recueil de celles de la troisieme race) après avoir rapporté ce qui est dit par cette ordonnance sur l’ordre que l’on devoit observer pour l’expédition, signature, & sceau des lettres de justice : il dit que « de cette ordonnance est tirée la maxime reçue, qu’en fait de justice on n’a regard à lettres missives, & que le grand scel du roi y est nécessaire non sans grande raison ; car les chanceliers de France & maîtres des requêtes sont institues à la suite du roi, pour avoir le premier œil à la justice de laquelle le roi est débiteur ; & l’autre œil est aux officiers ordonnés par les provinces pour l’administration de ladite justice mêmement souveraine, & faut pour en acquitter la conscience du roi & des officiers de ladite justice, tant près la personne dudit roi, que par ses provinces, qu’ils y apportent tous une volonté conforme à l’intégrité de ladite justice, sans contention d’autorité, ne passion particuliere qui engendrent injustice, provoquent & attirent l’ire de Dieu sur l’universel. Ladite ordonnance, ajoute du Tillet, étoit sainte ; & par icelle les rois ont montré la crainte qu’ils avoient qu’aucune injustice se fît en leur royaume, y mettant l’ordre

susdit pour se garder de surprise en cet endroit, qui est leur principale charge ».

Il y a même plusieurs ordonnances qui ont expressément défendu à tous juges d’avoir aucun égard aux lettres closes ou de cachet qui seroient accordées sur le fait de la justice.

La premiere est l’ordonnance d’Orléans, art. 3.

La seconde est l’ordonnance de Blois, art. 281.

La troisieme est l’ordonnance de Moulins, qui est encore plus générale & plus précise sur ce sujet ; sur quoi on peut voir dans Néron les remarques tirées de M. Pardoux du Prat, savoir que pour le fait de la justice, les lettres doivent absolument être patentes, & que l’on ne doit avoir en cela aucun égard aux lettres closes. Voyez aussi Theveneau, lib. III. tit. 15. article 2.

On trouve néanmoins quelques lettres de cachet registrées au parlement ; mais il s’agissoit de lettres qui ne contenoient que des ordres particuliers & non de nouveaux réglemens. On peut mettre dans cette classe celle d’Henri II. du 3 Décembre 1551, qui fut registrée au parlement le lendemain, & dont il est fait mention dans le traité de la police, tome I. livre I. chap. ij. page 133. col. premiere. Le roi dit dans cette lettre, qu’ayant fait examiner en son conseil les ordonnances sur le fait de la police, il n’avoit rien trouvé à y ajouter ; il mande au parlement d’y tenir la main, &c.

La déclaration du roi, du 24 Février 1673, porte que les ordonnances, édits, déclarations, & lettres patentes, concernant les affaires publiques, soit de justice ou de finances, émanées de la seule autorité & propre mouvement du roi, sans parties qui seront envoyées à son procureur général avec ses lettres de cachet portant ses ordres pour l’enregistrement, seront présentées par le procureur général en l’assemblée des chambres avec lesdites lettres de cachet.

Lorsqu’un homme est détenu prisonnier en vertu d’une lettre de cachet, on ne reçoit point les recommandations que ses créanciers voudroient faire, & il ne peut être retenu en prison en vertu de telles recommandations. (A)

Lettres canoniques, étoient la même chose que les lettres commendatices ou pacifiques. Voyez ci-après ces deux articles. (A)

Lettres de Cession, sont celles qu’un débiteur obtient en chancellerie pour être reçu à faire cession & abandonnement de biens à ses créanciers ; & par ce moyen se mettre à couvert de leurs poursuites. Voyez Abandonnement, Bénéfice de cession, Cession. (A)

Lettres de Chancellerie, qu’on appelle aussi lettres royaux, sont toutes les lettres émanées du souverain, & qui s’expédient en la chancellerie en France : il y en a de plusieurs sortes ; les unes qui s’expédient en la grande chancellerie de France, & que l’on appelle par cette raison lettres de grande chancellerie, ou lettres du grand sceau ; les autres qu’on appelle lettres de petite chancellerie, ou du petit sceau, lesquelles s’expédient dans les chancelleries établies près les cours ou près des présidiaux.

Toutes les lettres de grande ou de petite chancellerie, sont de justice ou de grace. Elles sont réputées surannées un an après la date de leur expédition. Voyez Surannation. (A)

Lettre de Change, est une espece de mandement qu’un banquier, marchand ou négociant donne à quelqu’un pour faire payer dans une autre ville à celui qui sera porteur de ce mandement la somme qui y est exprimée.

Pour former une lettre de change, il faut que trois choses concourent.

1°. Que le change soit réel & effectif, c’est-à-dire, que la lettre soit tirée d’une place pour être