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devient plus legere ; cette opération lui donne aussi un degré de blancheur ; cependant le feu lui laisse des mouches ou taches noires.

La planche premiere de celles qui ont rapport à cet article, montre la coupe d’une mine de calamine.

Sect. II. De la calcination de la calamine. Pour calciner la calamine, on en fait une pyramide, comme on la voit en A, B, C, fig. 2 ; sa base F, G, f, g, est fig. 3. partagée en quatre ouvertures, x, x, x, x, d’un pié ou environ de largeur ; ces ouvertures vont aboutir à une cheminée H, ménagée au centre. Cette cheminée regne tout le long de l’axe de la pyramide, & va se terminer à sa pointe A, fig. 2 ; la base a 10 à 12 piés de diametre ; elle est formée de bois à brûler, posés sur une couche de paille & de même bois. C’est avec le gros bois élevé à dix-huit pouces, que l’on forme les ouvertures x, x, x, x, & les fondemens de la cheminée. On arrose la derniere couche avec du charbon de bois, & l’on place dans la cheminée deux fagots debout.

Cela fait, on forme un lit de calamine de sept à huit pouces d’épaisseur ; sur ce lit, on en forme un de charbon de bois, mais beaucoup moins épais ; il ne faut pas qu’il couvre entierement la surface du lit de la calamine. Sur ce lit de charbon, on en étend un second de calamine, tout semblable au premier ; sur celui-ci, un lit de charbon, & ainsi de suite, jusqu’à ce que le volume que l’on veut calciner soit épuisé. Il faut observer de ménager à-travers ces lits l’ouverture de la cheminée. On calcine communément quatorze à quinze cent pesant de calamine à-la-fois ; on y emploie quatre cordes & demie de bois, & à-peu-près une bonne de charbon, ou une voiture de 25 vaux ou 18 queues, à deux mannes la queue ; ou, pour parler plus exactement, le charbon d’environ six cordes de bois.

La pyramide étant formée, on y met le feu ; il faut veiller à sa conduite : le feu trop poussé, brûle la calamine ou la calcine trop ; pas assez poussé, elle demeure sous forme de minerai. C’est l’habitude d’un travail journalier, qui apprend à l’ouvrier à connoître le vrai point de la calcination. On retire les premiers lits à mesure que le procédé s’avance ; ils ont souffert depuis huit jusqu’à douze heures de feu.

Lorsque la calamine est calcinée & refroidie, on la nettoye, c’est-à-dire qu’on en sépare les pierres & autres substances étrangeres ; on la porte dans un magasin bien sec, d’où on la tire ensuite pour l’écraser & la réduire en poudre.

On voit dans nos Planches, fig. 2. une pyramide de calamine en calcination ; fig. 3, la base de la pyramyde ; fig. 4, de la calamine calcinée ; fig. 1, de la calamine apportée de la mine & prête à être mise en pyramide.

On mêle la calamine de la montagne de Lembourg avec celle de Namur ; la premiere s’achete toute calcinée & nettoyée : elle est plus douce & produit davantage que celle de Landenne ; mais les ouvriers la trouvent trop grasse, défaut qu’ils corrigent par le mélange avec celle de Lembourg. Sans ce correctif, les ouvrages qu’on feroit se noirciroient & se décrasseroient avec peine. Lorsque nous écrivions ce mémoire, la calamine de Lembourg se vendoit 50 s. le cent pesant, ou 25 liv. de France le mille, rendu à Viset où on la mene par charrois, & de Viset 5 liv. le mille pour la transporter par bateau à Namur, où elle revenoit par conséquent à 30 livres de France.

Cette calamine de Namur n’est pas toute ni toûjours de la même qualité ; le fondeur en fait des essais. Pour cet effet, il met sur 60 livres de cala-

mine de Namur, 15 à 20 livres de calamine de

Lembourg ; il fait écraser & passer le tout au blutoir ; il y ajoute 35 livres de rosette ou cuivre rouge, & 35 livres de vieux cuivre ou mitraille ; ce qui doit donner une table de 85 à 87 livres. Dès la premiere fonte, il trouve la proportion qu’il doit garder entre ses calamines, tant que celle de Namur dure.

Trituration de la calamine. Cette opération se fait par le moyen d’un moulin ; ce moulin est composé de deux meules roulantes I, L, fig. 5. Pl. II. dont les essieux sont fixés à l’arbre vertical M, N, qu’un cheval dont on masque la vûe fait mouvoir. Ces meules portent sur un gros bloc de pierre P, qui est enterré ; ce bloc est revétu sur son pourtour de douves de bois S, S, S, arrêtées avec des cerceaux de fer, & des appuis de bois R, le tourillon d’en-bas N, tourne dans une crapaudine de fonte, enchâssée en un marbre quarré, placé au centre du bloc ; le tourillon d’en-haut M, se meut en un sommier du bâtiment, & est arrêté en V, par deux boulons qui traversent le sommier.

L’ouvrier employé au moulin remue continuellement la calamine avec une pelle, & la chasse sous les meules : le cheval doit faire quatre tours par minutes, & moudre 20 mesures par jour ; chaque mesure de 15 pouces 6 lignes de diametre en-haut, & de 13 pouces 6 lignes dans le fonds, sur 13 pouces de hauteur. Cette mesure ou espece de baquet cerclé de fer, contient 150 liv. & les 20 mesures font 3000 liv. ce poids est le travail ordinaire.

Le même moulin mout quatre de ces mesures de terre à creuset dans une heure, & trois mesures de vieux creusets, matiere cuite & plus dure. On écrase aussi six mannes de charbon de bois dans le même intervalle de tems ; & ces six mannes se réduisent à trois mannes de charbon pulvérisé. Les pierres qui forment ce moulin sont tirées des carrieres voisines de Namur ; elles sont très-dures, d’un grain fin & bien piqué ; les meules s’usent peu : bien choisies & bien travaillées, elles servent 40 à 50 ans. Le bloc sur lequel elles portent & qui fait la plate-forme, dure beaucoup moins.

Bluttage de la calamine. La calamine & le charbon étant écrasés au moulin, on les passe au blutoir A, B, fig. 6. Pl. II. C’est un cylindre construit de plusieurs cerceaux assemblés sur un arbre, & couverts d’une étamine de crin ; il est enfermé dans une caisse C, D, posée sur des traverses & incliné de A, en E. Il a une manivelle qui le fait mouvoir ; le son ou les parties grossieres qui peuvent passer au-travers de l’étamine tombent en F, & le gros & le fin séparés, s’amassent dessous le blutoir ; la matiere à tamiser est en G, & l’ouvrier qui est au blutoir la fait tomber d’une main dans la trémie H, qui la conduit dans le blutoir, tandis que de l’autre main il meut la manivelle. Les deux fonds du tambour étant ouverts, le gros descend vers la planche E, d’où on le ramasse pour le reporter au moulin ; la calamine passée au blutoir est en poudre très-fine.

La calamine de Lembourg passée au blutoir & pressée dans un cube d’un pouce, a pesé 1 once 1 gros 19 grains ; & la même quantité de Namur, a pesé 1 once 0 gros 24 grains ; leur différence étoit de 67 grains ; celle de Lembourg étoit d’un jaune fort pâle, & celle de Namur d’un jaune tirant sur le rouge, toutes les deux pulvérisées.

De l’alliage de 60 liv. de calamine avec 35 liv. de vieux cuivre & 35 liv. de rosette, il provient 15 à 17 livres d’augmentation, non compris l’arco, matiere qu’on sépare des cendres par des lessives, comme on le dira ci-après.

Sect. III. Fonderie. Une fonderie est ordinairement composée de trois fourneaux A, B, C, fig. 7. Pl. I.