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roi moins un demi-pouce. Voyez Sen, Voua, Ken, &c. Dictionn. de commerce.

JODELLE, (Hist. nat.) Voyez Poule d’eau.

JODUTTE, s. f. (Myth.) idole des Saxons ; ce fut d’abord une statue que Lothaire, duc de Saxe, avoit fait placer aux environs de la forêt de Welps, après la victoire qu’il remporta en 1115 sur Henri V. Cette statue étoit un homme tenant de la main droite une massue, & de la gauche un bouclier rouge, & assis sur un cheval blanc.

JOEKUL, (Hist. nat.) nom que l’on donne en Islande aux hautes montagnes perpétuellement couvertes de glaces & de neiges dont le pays est rempli ; le mont Hecla est dans ce cas, ainsi que les autres volcans qui s’y trouvent, & lorsqu’il leur arrive des éruptions, les neiges & les glaçons en se fondant, causent aux environs des débordemens épouventables. Voyez Horrebon, Description d’Islande.

JOERKAU ou BORECK, (Géograp.) ville de Bohème dans le cercle de Satz, renommée par sa biere.

JOGUE, s. m. (Théolog.) espece de religieux payens dans les Indes orientales qui ne se marient jamais, ne possedent rien en propre, mais vivent d’aumônes & pratiquent de grandes austérités.

Ils sont soumis à un général qui les envoie prêcher d’un lieu à l’autre. Ce sont proprement une espece de pelerins que l’on croit être une branche des anciens Gymnosophistes. Voyez Gymnosophystes.

Ils fréquentent sur-tout les lieux consacrés par la dévotion du peuple, & prétendent pouvoir passer plusieurs jours sans manger & sans boire. Après avoir gardé la continence pendant un certain tems, ils s’estiment impeccables, & croyent que tout leur est permis, ce qui fait qu’ils se plongent dans les débauches les plus infames.

JOHANSBURG, (Géog.) ville de Pologne dans la Sudavie, canton de la Prusse ducale, avec une citadelle sur la Pysch. Long. 40. 34. latitude 53. 15. (D. J.)

JOIE, s. f. (Philos. morale.) émotion de l’ame causée par le plaisir ou par la possession de quelque bien.

La joie, dit Locke, est un plaisir que l’ame goûte, lorsqu’elle considere la possession d’un bien présent ou à venir comme assurée ; & nous sommes en possession d’un bien, lorsqu’il est de telle sorte en notre puissance que nous pouvons en jouir quand nous voulons. Un homme blessé ressent de la joie lorsqu’il lui arrive le secours qu’il desire, avant même qu’il en éprouve l’effet. Le pere qui chérit vivement la prospérité de ses enfans, est en possession de ce bien aussi longtems que ses enfans prosperent ; car il lui suffit d’y penser pour ressentir de la joie.

Elle differe de la gaieté, voyez Gaieté. On plaît, on amuse, on divertit les autres par sa gaieté ; on pame de joie, on verse des larmes de joie, & rien n’est si doux que de pleurer ainsi.

Il peut même arriver que cette passion soit si grande, si inespérée, qu’elle aille jusqu’à détruire la machine ; la joie a étouffé quelques personnes. L’histoire grecque parle d’un Policrate, de Chilon, de Sophocle, de Diagoras, de Philippides, & de l’un des Denis de Sicile, qui moururent de joie.

L’histoire romaine assure la même chose du consul Manius Juventius Thalna, & de deux femmes de Rome, qui ne purent soutenir le ravissement que leur causa la présence de leur fils après la déroute arrivée au lac de Trasymène ; mes garans sont Aulugelle, liv. III. chap. xv. Valere Maxime, liv. IX. chap xij. Tite-Live, liv. XXII. chap. vij. Pline, liv. VII. chap. liij. & Ciceron dans ses Tusculanes.

L’histoire de France nomme la dame de Château-

briant que l’excès de joie fit expirer tout d’un coup,

en voyant son mari de retour du voyage de Saint Louis.

J’ai lu d’autres exemples semblables dans les écrits des Médecins, comme dans les Mémoires des curieux de la nature, Décur. 2. ann. 9, observ. 22 ; dans Kornman, de mirac. mortuor. part. IV. cap. cvj. & dans le Journal de Leipsick, année 1686. p. 284.

Mais sans m’arrêter à des faits si singuliers, & peut-être douteux en partie, il y a dans les Actes des Apôtres un trait plus simple qui peint au naturel le vrai caractere d’une joie subite & impétueuse. Saint Pierre ayant été tiré miraculeusement de prison, vint chez Marie mere de Jean, où les fideles étoient assemblés en prieres ; quand il eut frappé à la porte, une fille nommée Rhode, ayant reconnu sa voix, au lieu de lui ouvrir, courut vers les fideles avec des cris d’allégresse, pour leur dire que saint Pierre étoit à la porte.

Si la gaieté est un beau don de la nature, la joie a quelque chose de céleste ; non pas cette joie artificielle & forcée, qui n’est que du fard sur le visage ; non pas cette joie molle & folâtre dont les sens seuls sont affectés, & qui dure si peu ; mais cette joie de raison, pure, égale, qui ravit l’ame sans la troubler ; cette joie douce qui a sa racine dans le cœur, enfin cette joie délectable qui a sa source dans la vertu, & qui est la compagne fidelle des mœurs innocentes ; nous ne la connoissons plus aujourd’hui, nous y avons substitué un vernis qui s’écale, un faux brillant de plaisir ; & beaucoup de corruption. (D. J.)

Joie, Gaieté, (Synon.) ces deux mots marquent également une situation agréable de l’ame, causée par le plaisir ou par la possession d’un bien qu’elle éprouve ; mais la joie est plus dans le cœur, & la gaieté dans les manieres ; la joie consiste dans un sentiment de l’ame plus fort, dans une satisfaction plus pleine ; la gaieté dépend davantage du caractere, de l’humeur, du tempérament ; l’une sans paroître toujours au dehors, fait une vive impression au dedans ; l’autre éclate dans les yeux & sur le visage : on agit par gaieté, on est affecté par la joie. Les degrés de la gaieté ne sont ni bien vifs, ni bien étendus ; mais ceux de la joie peuvent être portés au plus haut période ; ce sont alors des transports, des ravissemens, une véritable ivresse. Une humeur enjouée jette de la gaieté dans les entretiens ; un évenement heureux répand de la joie jusques au fond du cœur ; on plaît aux autres par la gaieté, on peut tomber malade & mourir de joie. (D. J.)

JOIEUX AVENEMENT, (Jurisprud.) ou droit de joïeux avenement à la couronne, se dit de certains droits dont le roi jouit à son avenement. Ces droits sont de deux sortes ; les uns utiles, les autres honorifiques.

Les droits utiles sont des sommes de deniers que le roi leve sur certains corps & autres personnes.

Cet usage est fort ancien, puisqu’on voit qu’en 1383 les habitans de Cambray offrirent à Charles VI. 6000 l. lors de son joïeux avenement dans cette ville. En 1484 les états généraux assemblés à Tours accorderent à Charles VIII. deux millions cinq cent mille livres, & 300 mille livres pour son joyeux avenement, ce qui fut réparti sur la noblesse, le clergé & le peuple.

Le droit de confirmation des offices & des privileges accordés soit à des particuliers, soit aux communautés des villes & bourgs du royaume, aux corps des marchands, arts & métiers où il y a jurande, maîtrise & privilege, est un des plus anciens droits de la couronne, & a été payé dans tous les tems, à l’avenement des nouveaux rois. François I. par différentes déclarations & lettres-patentes de