Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/709

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ut, &c. comme de agere cum patre, sic ut : or ce dernier tour est d’usage, & on lit dans Nepos (Cimon. 1.) egit cum Cimone ut eam sibi uxorem daret.

Il résulte donc de tout ce qui précede, que l’infinitif est un mode du verbe qui exprime l’existence sous un attribut d’une maniere abstraite, & comme l’idée d’une nature commune à tous les individus auxquels elle peut convenir ; d’où il suit que l’infinitif est tout-à-la-fois verbe & nom : & ceci est encore un paradoxe.

On convient assez communément que l’infinitif fait quelquefois l’office du nom, qu’il est nom si l’on veut, mais sans être verbe ; & l’on pense qu’en d’autres occurrences il est verbe sans être nom. On cite ce vers de Perse (sat. I. 25.) Scire tuum nihil est nisi te scire hoc sciat alter, où l’on prétend que le premier scire est nom sans être verbe, parce qu’il est accompagné de l’adjectif tuum, & que le second scire est verbe sans être nom, parce qu’il est précédé de l’accusatif te, qui en est, dit-on, le sujet. Mais il n’y a que le préjugé qui fonde cette distinction. Soyez conséquent, & vous verrez que c’est comme si le poëte avoit dit, nisi hoc scire tuum sciat alter, ou comme le dit le P. Jouvency dans son interprétation, nisi ab aliis cognoscatur ; ensorte que la nature de l’infinitif, telle qu’elle résulte des observations précédentes, indique qu’il faut recourir à l’ellipse pour rendre raison de l’accusatif te, & qu’il faut dire, par exemple, nisi alter sciat hoc scire pertinens ad te, ce qui est la même chose que hoc scire tuum.

N’admettez sur chaque objet qu’un principe : évitez les exceptions que vous ne pouvez justifier par les principes nécessairement reçus ; ramenez tout à l’ordre analytique par une seule analogie : vous voilà sur la bonne voie, la seule voie qui convienne à la raison, dont la parole est le ministre & l’image. (B. E. R. M.)

INFIRMER, v. act. (Jurisprud.) signifie casser, annuller une sentence ou un contrat ou un testament.

Ce terme est sur-tout usité pour les sentences qui sont corrigées par le juge d’appel. Le juge qui infirme, si c’est un juge inférieur, dit qu’il a été mal jugé par la sentence, bien appellé ; émendant, il ordonne ce qui lui paroît convenable. Lorsque c’est une cour souveraine qui infirme la sentence, elle met l’appellation & sentence dont a été appellé au néant, émendant : & néanmoins dans les matieres de grand criminel, les cours prononcent sur l’appel par bien ou mal jugé, & non par l’appellation au néant, ou l’appellation & sentence au néant. (A)

INFIRMERIE, s. f. (Architect.) c’est dans les communautés un lieu, un appartement, un bâtiment particulier destiné pour les malades.

Infirmerie, (Jardin.) est un lieu destiné aux arbres en caisses qui sont languissans, ainsi que ceux qui sont nouvellement plantés, & aux fleurs empotées du jour ; ce n’est autre chose qu’un abri qu’on leur choisit à l’ombre, comme une allée ou un bois, où ils soient préservés des vents & du gros soleil.

INFIRMIER, s. m. (Medec. Chirurg.) est un employé subalterne dans les hôpitaux, préposé à la garde & au soulagement des malades ; il est dans les hôpitaux & maisons de charité ce que parmi le peuple on nomme trivialement garde-malade. Cet emploi est aussi important pour l’humanité, que l’exercice en est bas & répugnant ; tous sujets n’y sont pas également propres, & les administrateurs des hôpitaux doivent, autant par zèle que par motif de charité, se rendre difficiles sur le choix de ceux qui s’y destinent, puisque de leurs soins dépend souvent la vie des malades : un infirmier doit être patient, modéré, compatissant ; il doit conso-

ler les malades, prévenir leurs besoins & supporter

leurs impatiences.

Les devoirs domestiques des infirmiers sont, d’allumer le matin les feux dans les salles & de les entretenir pendant le jour ; de porter & distribuer les portions de vivres, la tisanne & les bouillons aux malades ; d’accompagner les medecins & chirurgiens pendant les pansemens ; d’enlever après, les bandes, compresses & autres saletés ; de balayer les salles & d’entretenir la propreté dans l’hôpital, parmi les malades, dans les choses qu’ils leur distribuent & sur leurs propres personnes ; de vuider les pots-de-chambre & chaises-percées, de sécher & changer le linge des malades ; d’empêcher le bruit, les querelles & tout ce qui pourroit troubler leu repos ; d’avertir l’aumônier de ceux qu’ils apperçoivent en danger ; de transporter les morts & de les ensevelir ; d’allumer les lampes le soir, de visiter les malades pendant la nuit ; enfin de veiller continuellement sur eux, de leur donner tous les secours que leur état exige, & de les traiter avec douceur & charité. Voilà en général leurs obligations ; les officiers des hôpitaux doivent donner leur attention à ce qu’ils les remplissent exactement, & les punir s’ils s’en écartent.

Voici quelques dispositions qui les regardent dans la direction & la discipline d’un hôpital militaire.

Ils y sont aux ordres du commissaire des guerres chargé de la police de l’hôpital, aux gages de l’entrepreneur, & nourris aux frais du Roi, à la même portion que les soldats malades.

Le nombre en est fixé à un pour vingt malades, ou douze blessés, ou dix vénériens, ou deux officiers : en cas de maladie ils sont traités dans l’hôpital sur le même pié que les soldats malades, mais aux frais de l’entrepreneur, qui ne peut les renvoyer qu’après leur guérison & du consentement du commissaire des guerres : le directeur ne doit dans aucun cas se servir de soldats pour infirmier.

Tout infirmier qui sort de l’hôpital sans permission, ou qui y rentre ivre, qui est convaincu d’avoir vendu des alimens aux malades, ou retranché quelque chose de leur portion pour en augmenter la sienne, est puni d’amende pour la premiere fois, & chassé de l’hôpital en cas de récidive.

Celui qui est convaincu de vol, friponnerie ou malversation, est châtié sévérement pour l’exemple, & même livré à la justice, si le cas le requiert.

Les infirmiers sont responsables des effets gardés par les défunts, qui se trouveroient avoir été détournés.

Celui qui étant de garde pendant la nuit, est surpris endormi, doit être puni d’amende, & chassé s’il a abandonné la salle.

Celui qui est convaincu d’avoir traité les malades avec négligence, dureté ou mépris, d’avoir négligé de les changer de linge après des sueurs, ou de leur avoir refusé d’autres secours nécessaires, doit être chassé & puni suivant l’exigence du cas.

Ces dispositions sont tirées pour la plûpart des réglemens concernant les hôpitaux militaires, du premier Janvier 1747, époque du rétablissement de la regle & du bon ordre dans l’administration de cette partie difficile & intéressante du service.

Dans les hôpitaux bourgeois & maisons de charité, ce sont des femmes ou des sœurs hospitalieres qui y sont chargées des fonctions des infirmiers, & l’on est généralement content de la maniere dont elles s’en acquittent. On ne peut nier que les femmes ne soient plus propres à ces fonctions que les hommes ; en effet, par la sensibilité & la douceur naturelle à leur sexe, elles sont plus capables qu’eux de ces soins touchans, de ces attentions délicates, si consolantes pour les malades, & si propres à hâter leur