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l’inféodation des dixmes ne commença qu’au premier voyage d’outremer, qui fut en 1096. On a même vu, par ce qui a été dit il y a un moment, que l’origine de ces dixmes inféodées remonte beaucoup plus haut.

Il est certain d’ailleurs que sous la seconde race, les ecclésiastiques, aussi bien que les seigneurs & le peuple, faisoient tous les ans chacun leur don au roi en plein parlement, & que ce don étoit un véritable tribut, plutôt qu’une libéralité volontaire ; car il y avoit une taxe sur le pié du revenu des fiefs, aleux & autres héritages que chacun possédoit. Les historiens en font mention sous les années 826 & suivantes.

Fauchet dit qu’en 833 Lothaire reçut à Compiegne les présens que les évêques, les abbés, les comtes & le peuple faisoient au Roi tous les ans, & que ces présens étoient proportionnés au revenu de chacun ; Louis le Débonnaire les reçut encore des trois ordres à Orléans, Vorms & Thionville en 835, 836 & 837.

Chaque curé étoit obligé de remettre à son évêque la part pour laquelle il devoit contribuer à ces dons annuels, comme il paroît par un concile de Toulouse tenu en 846, où il est dit que la contribution que chaque curé étoit obligé de fournir à son évêque, consistoit en un minot de froment, un minot d’orge, une mesure de vin & un agneau ; le tout étoit évalué deux sols, & l’évêque avoit le choix de le prendre en argent ou en nature.

Outre ces contributions annuelles que le clergé payoit comme le reste du peuple, Charles le Chauve, empereur, fit en 877 une levée extraordinaire de deniers, tant sur le clergé que sur le peuple ; ayant résolu, à la priere de Jean VIII. dans une assemblée générale au parlement, de passer les monts pour faire la guerre aux Sarrasins qui ravageoient les environs de Rome & tout le reste de l’Italie, il imposa un certain tribut sur tout le peuple, & même sur le clergé. Fauchet, dans la vie de cet empereur, dit que les évêques levoient sur les prêtres, c’est-à-dire, sur les curés & autres bénéficiers de leur diocèse, cinq sols d’or pour les plus riches, & quatre deniers d’argent pour les moins aisés ; que tous ces deniers étoient mis entre les mains de gens commis par le Roi ; on prit même quelque chose du trésor des églises pour payer ce tribut ; cette levée fut la seule de cette espece qui eut lieu sous la seconde race.

On voit aussi, par les actes d’un synode tenu à Soissons en 853, que nos rois faisoient quelquefois des emprunts sur les fiefs de l’Eglise. En effet, Charles le Chauve, qui fut présent à ce synode, renonça à faire ce que l’on appelloit præstarias, c’est-à-dire, de ces sortes d’emprunts, ou du-moins des fournitures, devoirs ou redevances, dont les fiefs de l’Eglise étoient chargés.

On n’entrera point ici dans le détail des subventions que le clergé de France a fourni dans la suite à nos rois, cela étant déja expliqué aux mots décimes & don gratuit.

Les ecclésiastiques sont exempts comme les nobles de la taille, mais ils payent les autres impositions, comme tous les sujets du roi, telles que les droits d’aides & autres droits d’entrée.

Ils sont exempts du logement des gens de guerre, si ce n’est en cas de nécessité.

On les exempte aussi des charges publiques, telles que celles de tutelle & curatelle, & des charges de ville, comme de guet & de garde, de la mairie & échevinage ; mais ils ne sont pas exempts des charges de police, comme de faire nettoyer les rues au devant de leurs maisons, & autres obligations semblables.

Une des principales immunités dont jouit l’église,

c’est la jurisdiction que les souverains lui ont accordée sur ses membres, & même sur les laïcs dans les matieres ecclésiastiques ; c’est ce que l’on traitera plus particulierement au mot Jurisdiction Ecclésiastique.

L’ordonnance de Philippe-le-Bel en 1302 dit que si on entreprend quelque chose contre les priviléges du clergé qui lui appartiennent de jure vel antiquâ consuetudine, restaurabuntur ad egardum concilii nostri ; on rappelle par là toutes les immunités de l’église aux regles de la justice & de l’équité.

On ne reconnoit point en France les immunités accordées aux églises & au clergé par les bulles des papes, si ces bulles ne sont revêtues de lettres patentes dûment enregistrées.

Les libertés de l’église gallicane sont une des plus belles immunités de l’église de France. Voyez Libertés.

Voyez les conciles, les historiens de France, les ordonnances de la seconde race, les mémoires du clergé.

Voyez aussi les traités de immunitate ecclesiasticâ par Jacob Wimphelingus, celui de Jean Hyeronime Albanus. (A)

Immunité, (Hist. greq.) les immunités que les villes greques, & sur-tout celle d’Athènes, accordoient à ceux qui avoient rendu des services à l’état, portoient sur des exemptions, des marques d’honneurs & autres bienfaits.

Les exemptions consistoient à être déchargés de l’entretien des lieux d’exercices, du festin public à une des dix tribus, & de toute contribution pour les jeux & les spectacles.

Les marques d’honneur étoient des places particulieres dans les assemblées, des couronnes, le droit de bourgeoisie pour les étrangers, celui d’être nourri dans le pritanée aux dépens du public, des monumens, des statues, & semblables distinctions qu’on accordoit aux grands hommes, & qui passoient quelquefois dans leurs familles. Athènes ne se contenta pas d’ériger des statues à Harmodius & à Aristogiton ses libérateurs, elle exempta à perpétuité leurs descendans de toutes charges, & ils jouissoient encore de ce glorieux privilege plusieurs siecles après. Ainsi tout mérite étoit sûr d’être récompensé dans les beaux jours de la Grece ; tout tendoit à faire germer les vertus & à allumer les talens, le desir de la gloire & l’amour de la patrie. (D. J.)

* IMMUTABILITÉ, s. f. (Gramm. & Théologie.) c’est l’attribut de Dieu, considéré en tant qu’il n’éprouve aucun changement. Dieu est immuable quant à sa substance ; il l’est aussi quant à ses idées. Il est, a été, & sera toujours de l’unité la plus rigoureuse.

IMOLA, (Géog.) ville d’Italie & de l’état de l’Eglise dans la Romagne, avec un évêché suffragant de Ravenne. Cette ville est bien ancienne ; Cicéron en parle dans une de ses lettres, liv. XII. épit. 5. Strabon l’appelle Φόρον Κορνήλιον. Le poëte Martial nous dit y avoir fait quelque séjour ; & Prudence nous apprend qu’elle avoit été fondée par Sylla.

Vers la décadence de l’empire, on y bâtit une citadelle nommée Imola, nom qui est resté à cette ville ; elle fut ruinée par Narsès, & réparée par Ivon II. roi des Lombards ; ensuite les Bolonois, les Manfrédi, Galéas Sforce en devinrent les maîtres ; enfin César-Borgia la prit, & la soumit au S. Siege, qui en est demeuré possesseur. Elle est sur le Santerno à trois lieues N. O. de Faenza, huit S. E. de Bologne, neuf S. O. de Ravenne, dix-huit N. E. de Florence, soixante-cinq N. de Rome. Long. 29. 18. lat. 44. 22.

Imola a produit quelques gens de lettres en divers genres, comme le poëte Flaminio, le jurisconsulte Tartagny, & l’anatomiste Valsalva.

Flaminio (Marc Antoine) fut le premier de son