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chose, ou que nous ne déterminions rien sur leur état à venir, il ne sera ni meilleur ni pire. Les imbécilles sont entre les mains d’un créateur plein de bonté, qui ne dispose pas de ses créatures suivant les bornes étroites de nos opinions particulieres, & qui ne les distingue point conformément aux noms, & aux chimères qu’il nous plaît de forger. (D. J.)

* IMBIBER, verb. act. & pass. (Gramm.) on dit imbiber, & s’imbiber. L’éponge s’imbibe d’eau. On imbibe d’huile une meche. La maniere physique dont se fait l’imbibition ne nous est pas toujours distinctement connue. Par quel méchanisme, si un fil trempe d’un bout dans un verre plein d’eau, & tombe de l’autre bout au-dehors du verre, fera-t-il fonction de siphon ; s’imbibera-t-il sans cesse d’eau, & en vuidera-t-il le verre ? Si ces petits phénomenes étoient bien expliqués, on en appliqueroit bien-tôt la raison à de plus importans. L’action d’imbiber ou de s’imbiber s’appelle imbibition, terme que les Alchimistes ont transportés dans leur art, où il n’a aucune acception claire.

IMBIBITION, s. f. (Chimie.) c’est une espece ou une variété de la macération, dont le caractere distinctif consiste en ce que le liquide appliqué à une substance concrete, est absorbé tout entier, ou presque entier par cette substance ; c’est ainsi qu’une éponge est imbibée d’eau, &c. Cette opération est peu en usage dans les travaux ordinaires de la Chimie. On l’emploie dans quelques arts chimiques ; par exemple, dans la préparation de l’orseil, du tournesol, & de quelques autres fécules colorées, dans laquelle on imbibe avec de l’urine les plantes desquelles on travaille à les extraire. (b)

IMBLOCATION, subst. m. (Hist. des Coûtum.) terme consacré chez les écrivains du moyen âge, pour désigner la maniere d’enterrer les corps morts des personnes excommuniées ; cette maniere se pratiquoit en élevant un monceau de terre ou de pierres sur leurs cadavres, dans les champs, ou près des grands chemins, parce qu’il étoit défendu de les ensevelir, & à plus forte raison de les mettre en terre sainte. Imblocation est formé de bloc, amas de pierres. Voyez du Cange, Glossaire latin, au mot imblocatus. (D. J.)

* IMBRICÉ, adj. (Art.) c’est par cette épithete qu’on distingue les tuiles concaves des tuiles plates. On prétend que la couverture avec des tuiles imbricées dure plus ; mais il est sûr qu’elle charge davantage. Imbricé vient d’imbricatus, fait en gouttiere.

IMBRIM, s. m. (Hist. nat.) nom que l’on donne dans les îles de Feroe ou Farroe à un oiseau de la grosseur d’une oie, qui, dit-on, ne sort jamais de l’eau. Cet oiseau a le cou fort long ainsi que le bec ; ses plumes sont grises sur le dos & blanches sur la poitrine ; son cou est tout gris à l’exception d’un cercle blanc qui forme comme une espece de collier. Il vit dans l’eau parce que ses piés sont placés en arriere, & sont d’ailleurs si foibles qu’ils ne pourroient point soutenir son corps ; & ses aîles sont trop petites pour qu’il puisse voler. Sous chaque aîle il a un creux capable de contenir un œuf, & l’on croit que c’est là qu’il tient ses œufs cachés & qu’il les couve ; d’autant plus qu’on a remarqué que l’imbrim ne fait jamais éclore que deux petits. Ces oiseaux paroissent sur les côtes à l’approche des tempêtes. On les a mal-à-propos confondus avec les alcyons, dont ils different suivant la description qui vient d’être donnée. Voyez Acta Hafniensia, ann. 1671 & 72, observ. 49.

IMBRIKDAR-AGA, subst. m. (Hist. mod.) nom d’un officier de la cour du sultan, dont la fonction est de lui donner l’eau pour les purifications ordonnées par la loi mahométane.

IMBROS, (Géog.) île vers la Quersonnèse de Thrace, séparée par un petit trajet de mer de la

Thessalie. Philippe de Macédoine s’en rendit maître, & y exerça un pouvoir absolu. Le géographe Etienne place une ville de même nom dans cette île de l’Archipel, & dit qu’elle étoit consacrée à Cérès & à Mercure ; quoi qu’il en soit, l’île d’Imbros se nomme aujourd’hui l’île de Lembro. Voyez Lembro. (D. J.)

IMI, s. m. (Commerce.) mesure de liquides en usage dans le duché de Wirtemberg, qui tient environ onze pintes.

IMIRETTE, (Géog.) petit royaume d’Asie entre les montagnes qui séparent la mer Caspienne & la mer Noire. Il est enfermé entre le mont Caucase, la Colchide, la mer Noire, la principauté de Garcil, & la Géorgie. Sa longueur est de six vingt mille stades, sa largeur de soixante mille. Les peuples du mont Caucase, avec qui l’Imirette confine, sont les Géorgiens & les Turcs au midi ; au septentrion, ces Caracioles ou Circassiens noirs, que les Européens ont appellé Huns, & qui firent tous les ravages en Italie & dans les Gaules, dont parlent les historiens, & Cédrénus en particulier.

L’Imirette est un pays de bois & de montagnes, comme la Mingrélie, mais il y a de plus belles vallées & de plus délicieuses plaines. Il s’y trouve des minieres de fer ; l’argent y a cours, & l’on y bat monnoie. Quant aux mœurs & aux coûtumes, c’est la même chose qu’en Mingrélie, qui a été autrefois sous sa domination, ainsi que les peuples du Guriel ; ils sont tous aujourd’hui tributaires du Turc. Le tribut du meppe, c’est-à-dire du roi d’Imirette est de 80 enfans, filles & garçons, depuis dix ans jusqu’à vingt ; il envoie son tribut au pacha d’Akalziche, & dans les lettres qu’il fait expédier, il se nomme le roi des rois : qu’est donc le pacha du grand-seigneur vis-à-vis de lui ?

La Turquie ne s’est point souciée de s’emparer de tous ces pays limitrophes, où il est impossible d’observer le Mahométisme, parce qu’ils n’ont rien de meilleur que le vin & le cochon, défendus par la loi mahométane ; outre que le peuple y est épars, errant & vagabond : de sorte que les Turcs se sont contentés de faire en sorte que toutes ces provinces leur servissent de pepinieres d’esclaves. On dit qu’ils en tirent six ou sept mille chaque année.

Des égards & des obstacles à peu près semblables, empêchent encore apparemment les Turcs d’incorporer à leur empire les vastes plaines de Tartarie & de Scythie, & les pays immenses du mont Caucase. C’est une observation remarquable que cet ancien usage de tribut d’enfans pour esclaves. La Colchide le payoit à la Perse dès les premiers âges du monde ; c’est une autre chose bien singuliere, que dans tous les siecles, ces régions maritimes de la mer Noire, aient produit de si beau sang, & en si grande quantité. (D. J.)

IMITATIF, adj. (Gramm.) qui sert à l’imitation ; c’est le nom général que l’on donne aux verbes adjectifs qui renferment dans leur signification un attribut d’imitation.

Ces verbes dans la langue greque, sont dérivés du nom même de l’objet imité, auquel on donne la terminaison verbale ίζειν pour caractériser l’imitation : ἀττικίζειν, de ἀττικός ; σικελίζειν, de σικελός ; βαρϐαρίζειν, de βάρϐαρος, &c. La terminaison ίζειν pourroit bien venir elle-même de l’adjectif ἴσος, pareil, semblable, qui semble se retrouver encore à la terminaison des noms terminés en ἴσος, que les Latins rendent par ismus, & nous par ismes, comme archaïsme, néologisme, hellénisme, &c. Il me semble par cette raison même, que l’on pourroit les appeller aussi des noms imitatifs.

Nous avons conservé en françois la même terminaison imitative, en l’adaptant seulement au génie de notre langue, tyranniser, latiniser, franciser. An-