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par leur date, mais par le plus ou moins de faveur que mérite la cause dont ils procedent ; ce qui est fondé sur la loi 32. au digeste de rebus autor. jud. possid. (A)

Hypotheque simple est opposée à hypotheque privilégiée. Voyez ci-devant Hypotheque privilegiée. (A)

Hypotheque spéciale est opposée à hypotheque générale. Voyez ci-devant Hypotheque générale.

Hypotheque staende seker est une espece singuliere d’hypotheque usitée dans la Flandre flamande, qui se donne provisionnellement pour sûreté de la dette, sans qu’il soit dû aucun droit seigneurial qu’après deux termes de trois ans chacun. Ces deux termes écoulés, la sûreté provisionnelle passe en hypotheque absolue, & il en est dû un droit seigneurial, suivant le placard du 21 Janvier 1621, qui est au second volume des placards de Flandres, fol. 443. Il est parlé de cette sûreté provisionnelle au livre des partages du Franc de Bruges, art. lxiij. & ibi Vanden-Hanc in notis. Il cite Rypæus in not. jur. belg. de reditibus, n°. 29.

On a douté si cette sûreté devoit être renouvellée au bout des trois premieres années, mais le bureau des Finances de Lille l’a ainsi décidé le 23 Juillet 1734. Voyez l’Inst. au droit belgique, part. II. tit. V. §. 9. n°. 17. (A)

Hypotheque tacite est celle qui a lieu sans convention expresse, ainsi l’hypotheque légale est une hypotheque tacite. On donne aussi ce nom à l’hypotheque résultante d’un acte authentique, lorsque l’hypotheque n’y est pas stipulée.

Voyez ci-devant Hypotheque conventionnelle, & Hypotheque légale. (A)

HYPOTHENAR, s. m. (Anatomie.) nom d’un muscle situé sous le thenar ; il prend ses attaches du ligament circulaire interne, un peu plus en-dedans de la main que le thenar de l’os du carpe qui soutient le pouce & se termine à l’os sesamoïde externe & à la partie inférieure de la premiere phalange du pouce.

HYPOTHESE, s. f. (Métaphysiq.) c’est la supposition que l’on fait de certaines choses pour rendre raison de ce que l’on observe, quoique l’on ne soit pas en état de démontrer la vérité de ces suppositions. Lorsque la cause de certains phénomenes n’est accessible ni à l’expérience, ni à la démonstration, les Philosophes ont recours aux hypotheses. Les véritables causes des effets naturels & des phénomenes que nous observons, sont souvent si éloignées des principes sur lesquels nous pouvons nous appuyer, & des expériences que nous pouvons faire, qu’on est obligé de se contenter de raisons probables pour les expliquer. Les probabilités ne sont donc pas à rejetter dans les sciences ; il faut un commencement dans toutes les recherches, & ce commencement doit presque toûjours être une tentative très imparfaite, & souvent sans succès. Il y a des vérités inconnues, comme des pays, dont on ne peut trouver la bonne route qu’après avoir essayé de toutes les autres ; ainsi, il faut que quelques-uns courent risque de s’égarer, pour montrer le bon chemin aux autres.

Les hypotheses doivent donc trouver place dans les sciences, puisqu’elles sont propres à faire découvrir la vérité & à nous donner de nouvelles vûes ; car une hypothese étant une fois posée, on fait souvent des expériences pour s’assûrer si elle est bonne. Si on trouve que ces expériences la confirment, & que non-seulement elle rende raison du phénomene, mais encore que toutes les conséquences qu’on en tire s’accordent avec les observations, la probabilité croît à un tel point, que nous ne

pouvons lui refuser notre assentiment, & qu’elle équivaut à une démonstration. L’exemple des Astronomes peut servir merveilleusement à éclaircir cette matiere ; il est évident que c’est aux hypotheses, successivement faites & corrigées, que nous sommes redevables des belles & sublimes connoissances, dont l’Astronomie & les sciences qui en dépendent sont à présent remplies. Par exemple, c’est par le moyen de l’hypothese de l’ellipticité des orbites des planetes, que Kepler parvint à découvrir la proportionalité des aires & des tems, & celle des tems & des distances, & ce sont ces deux fameux théorèmes, qu’on appelle les analogies de Kepler, qui ont mis M. Newton à portée de démontrer que la supposition de l’ellipticité des orbes des planetes s’accorde avec les lois de la Méchanique, & d’assigner la proportion des forces qui dirigent les mouvemens des corps célestes. C’est de la même maniere que nous sommes parvenus à savoir que Saturne est entouré d’un anneau qui réfléchit la lumiere, & qui est séparé du corps de la planete, & incliné à l’écliptique ; car M. Huyghens, qui l’a découvert le premier, ne l’a point observé tel que les Astronomes le décrivent à présent ; mais il en observa plusieurs phases, qui ne ressembloient quelquefois à rien moins qu’un anneau, & comparant ensuite les changemens successifs de ces phases, & toutes les observations qu’il en avoit faites, il chercha une hypothese qui pût y satisfaire, & rendre raison de ces différentes apparences ; celle d’un anneau réussit si bien, que par son moyen, non-seulement on rend raison des apparences, mais on prédit encore les phases de cet anneau avec précision.

Il y a deux excès à éviter au sujet des hypotheses, celui de les estimer trop, & celui de les proscrire entierement. Descartes, qui avoit établi une bonne partie de sa philosophie sur des hypotheses, mit tout le monde savant dans le goût de ces hypotheses, & l’on ne fut pas long-tems sans tomber dans celui des fictions. Newton & sur-tout ses disciples, se sont jettés dans l’extrémité contraire. Dégoutés des suppositions & des erreurs, dont ils trouvoient les livres de philosophie remplis, ils se sont élevés contre les hypotheses, ils ont taché de les rendre suspectes & ridicules, en les appellant le poison de la raison & la peste de la philosophie. Cependant, ne pourroit-on point dire qu’ils prononcent leur propre condamnation, & le principe fondamental du Newtonianisme sera-t-il jamais admis à titre plus honorable que celui d’hypothese ? Celui-là seul qui seroit en état d’assigner & de démontrer les causes de tout ce que nous voyons, seroit en droit de bannir entierement les hypotheses de la Philosophie.

Il faut que l’hypothese ne soit en contradiction avec aucun des premiers principes qui servent de fondement à nos connoissances ; il faut encore se bien assûrer des faits qui sont à notre portée, & connoître toutes les circonstances du phénomene que nous voulons expliquer.

L’écueil le plus ordinaire, c’est de vouloir faire passer une hypothese pour la vérité elle-même, sans en pouvoir donner des preuves incontestables. Il est très-important pour le progrès des sciences, de ne se point faire illusion à soi-même & aux autres sur les hypotheses que l’on a inventées. La plûpart de ceux qui depuis Descartes ont rempli leurs écrits d’hypotheses, pour expliquer des faits que bien souvent ils ne connoissoient qu’imparfaitement, ont donné contre cet écueil, & ont voulu faire passer leurs suppositions pour des vérités, & c’est-là en partie la source du dégoût que l’on a pris pour les hypotheses ; mais en distinguant entre leur bon & leur mauvais usage, on évite d’un côté les fictions