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rieure qui s’élevoit sur l’œil. Cela est vrai dans le coq-d’Inde, le coq domestique, la poule, l’oie, le canard, le moineau & le merle ; mais le pigeon, la tourterelle, le serin, & toutes les especes de hibou, ont la paupiere supérieure mobile ; elle se baisse, & va trouver la paupiere inférieure. On ne voit jamais dans le hibou vivant la paupiere inférieure s’élever toute seule pour s’unir à la supérieure ; néanmoins lorsqu’il est mort, c’est la paupiere inférieure qui couvre entierement l’œil, & la paupiere supérieure ne s’est aucunement baissée.

Il faut observer ici que dans les oiseaux morts on trouve toujours la paupiere inférieure relevée, non seulement dans ceux dont la paupiere supérieure ne se baisse point pendant leur vie, comme dans le coq-d’Inde, l’oie, le canard, &c. mais encore dans ceux qui baissent & relevent la paupiere supérieure, comme les hibous, les pigeons, &c.

En regardant la face du hibou, on la trouve applatie, les yeux paroissent placés dans la même direction que ceux de l’homme ; mais après avoir plumé la tête, ils paroissoient être dans une position plus oblique que dans l’homme, & moins cependant que dans les autres oiseaux, qui ne peuvent voir les objets avec précision, que d’un œil, soit du droit, soit du gauche, excepté l’autruche.

Après avoir arraché les plumes de la tête du hibou, on remarque d’abord que son œil a beaucoup de saillie, mais cette saillie est encore bien plus grande après avoir enlevé les paupieres.

Les muscles de l’œil du hibou sont épais, courts, n’occupent que la base de l’œil, & leurs tendons ne s’étendent point jusqu’à la partie antérieure de la sclérotique.

Le mouvement de la paupiere interne, si prompt dans la poule & dans plusieurs autres oiseaux, est extrèmement lent dans toutes les especes de hibou. Le globe de leur œil n’est pas sphérique comme dans la plûpart des animaux ; Sévérinus le fait ressembler à un bonnet antique, & son idée est juste : on pourroit encore le comparer de figure aux chapeaux de paille que portent nos vivandiers, dont la forme est haute, & les bords abaissés.

L’hibou voit la nuit, parce que sa prunelle est susceptible d’une extrème dilatation, par laquelle son œil rassemble une grande quantité de cette foible lumiere, & cette grande quantité supplée à sa force. Peut-être même cet animal a-t-il l’organe de la vue plus fin que le nôtre. Brigs connoissoit un homme qui ne le cédoit point à cet égard au hibou ; il lisoit aisément des lettres dans l’obscurité.

On sait que le bec de cet oiseau est crochu & ordinairement noir ; mais si on le sait tremper dans l’eau pendant vingt-quatre heures, le noir s’enleve facilement comme dans toutes sortes d’oiseaux qui ont le bec de cette couleur. Le trou de ses narines est situé à la partie supérieure du bec, & est rond. La cavité du crane est grande, & contient un grand cerveau ; le trou par où sort la moëlle allongée n’est pas au bas de l’occiput, comme dans le coq-d’Inde, dans l’oie & dans le canard ; il est à la partie inférieure postérieure de la base du crane, comme dans l’homme.

On sait assez que le hibou s’appelle en latin axus, bubo, nicticortis, & peut-être lilith en hébreu ; du moins S. Jérome paroît avoir mal rendu ce dernier mot, par celui de lamie. Isaie, chap. xxxiv. V. 14, dit suivant la Vulgate : « que le pays d’Edom ou des Iduméens, sera réduit en solitude, que la lamie y couchera, & y trouvera son repos » ; mais n’est-il pas vraissemblable que le terme litith désigne plutôt un oiseau nocturne, comme le hibou, la chouette, le chal-huant, la chauve-souris, que le monstre marin qu’on nomme lamie ? d’autant mieux que lilith en

hébreu, signifie la nuit. Les anciens traducteurs de Louvain ont rendu lilith par fée ; on croyoit encore alors dans toute la Flandres à ces sortes de génies imaginaires. (D. J.)

* HIBRIDES, adj. (Gramm.) c’est ainsi qu’on appelle les mots composés de diverses langues, tels que du grec & du latin, du grec & du françois, du françois & du latin, du latin & de l’anglois, &c.

Hibride signifie au propre un animal né de deux animaux de différentes especes, un mulet. Il n’y a presque pas un seul idiome où l’on ne rencontre de ces sortes de monstres : les amateurs de la pureté les rejettent ; ont-ils raison ? ont-ils tort ? Il me semble que c’est à l’harmonie à décider cette question. S’il arrive qu’un composé de deux mots, l’un grec & l’autre latin, rende les idées aussi-bien, & soit d’ailleurs plus doux à prononcer, & plus agréable à l’oreille qu’un mot composé de deux mots grecs ou de deux mots latins, pourquoi préférer celui-ci ?

HIDALGO, s. m. (Hist. d’Espagne.) c’est le titre qu’on donne en Espagne à tous ceux qui sont de familles nobles ; les gentilshommes qui ne sont pas grands d’Espagne, prennent celui-ci.

Quelques-uns croyent que hidalgo veut dire hijo de Godo, fils de Goth, parce que les meilleures familles d’Espagne prétendent descendre des Goths ; mais le plus grand nombre dérivent hydalgo, de hijo d’algo, fils de quelque chose, & même il s’écrit souvent hijo d’algo ; c’est ainsi que pour désigner une personne qui manque de toute qualité, les François disent un homme du néant.

Quoi qu’il en soit, les hidalgo ne sont soumis qu’aux collectes provinciales, & ne payent aucuns impôts généraux ; c’est pourquoi le nom de hidalgos de vengar quinientes sueldos, c’est à-dire nobles vengés des cinq cens sols, leur est donné, parce qu’après la défaite des Maures à la bataille de Clavijo, les gentilshommes vassaux du roi don Bermudo, se déchargerent du tribut de cinq cens sols qu’ils leur payoient précédemment pour les cinquante demoiselles.

Au reste, les fidalgos portugais répondent aux hidalgos espagnols, & même ces derniers prétendent le pas sur tous les ambassadeurs des cours étrangeres auprès du roi de Portugal, quand ils lui font des visites. (D. J.)

* HIDE, ou HYDE, s. f. (Hist. mod.) la quantité de terres qu’une charrue peut labourer par an. Ce mot a passé du saxon dans l’anglois. Les Anglois mesurent leurs terres par hides. Nous disons une ferme à deux, à trois, à quatre charrues, & ils disent une ferme à deux, à trois, à quatre hides. Toutes les terres de l’Angleterre furent mesurées par hides, sous Guillaume le conquérant.

* HIDEUX, adj. (Gramm.) il se dit de tout objet dont la vue inspire l’effroi. On dit des spectres qu’ils sont hideux, lorsque notre imagination nous les montre maigres, secs, pâles, le regard menaçant, les cheveux hérissés. Le P. Daniel disoit de l’auteur des Provinciales, qu’il avoit couvert la doctrine de la société d’un masque hideux, sous lequel il ne la reconnoissoit pas ; ce masque est plus ridicule encore que hideux. La vieillesse, la maladie, le chagrin, les changemens qu’une passion violente, telle que la terreur, la colere, apportent dans les traits d’un beau visage, peuvent le rendre hideux.

HIDROTIQUE, adj. (Med.) c’est un terme par lequel quelques auteurs ont désigné une sorte de fievre singuliérement accompagnée de grandes sueurs.

Le mot hidrotique est aussi employé pour synonyme de sudorifique (remede) ; ainsi on ne doit pas le confondre avec celui hydrotique, qui signifie la même chose qu’hydragogue.

Hidrotique vient du grec ἱδρὼς, sudor : au lieu qu’hydrotique vient d’ὕδωρ, aqua. Cette observation