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HENLEY, (Géog.) petite ville d’Angleterre, au comté d’Oxford sur la Tamise, remarquable par son commerce de grains germés, pour faire de la biere. Elle est à 4 lieues d’Oxford & de Windsor, 12. O. de Londres. Long. 16. 45. lat. 51. 32. (D. J.)

HENNEBERG, (Géog.) comté d’Allemagne, dans le cercle de Franconie, entre la Thuringe, le landgraviat de Hesse, l’abbaye de Fulde, & l’évêché de Wurtzbourg. Ce pays peut avoir quinze lieues d’orient en occident, & sept ou huit du midi au septentrion. Il échut en 1583 à la maison de Saxe, & a depuis été partagé ; l’évêque de Wurtzbourg y possede quelques fiefs. Voyez les détails dans Imhoff, notit. imper. lib. IV. cap. ij. ou dans Heiss, hist. de l’empire, liv. VI. ch. xxiij. (D. J.)

HENNEBON, (Géog.) petite ville de France en Bretagne, au diocèse de Vannes, à six lieues d’Auray, sur la riviere de Blavet, à cent lieues S. O. de Paris, long. 14d. 22′. 23″. lat. 47d. 48′.

Je ne dois pas oublier d’ajouter que cette petite ville de Bretagne a donné la naissance à un fameux religieux de l’ordre de Citeaux, Paul Pezron, homme plein de savoir, & même de vues fort étendues sur les anciens monumens de l’histoire profane ; il a plus vieilli la durée du monde, qu’aucun autre chronologiste n’a fait avant lui. On trouvera l’exposition de son système dans le livre qu’il a intitulé, Antiquité des tems rétablie, ouvrage imprimé à Paris en 1687, in-4°. & qu’il a défendu contre les objections des PP. Martianay & le Quien. Il avoit entrepris un grand traité sur l’Origine des Nations, origine qu’on ne découvrira jamais, & en a publié la partie qui regarde l’antiquité de la nation & de la langue des Celtes, autrement appellés Gaulois ; cet ouvrage systématique a été imprimé à Paris en 1703, in-4°. L’Auteur est mort en 1706 à 67 ans. (D. J.)

HENNEMARCK, (Géog.) petit pays du royaume de Norvege, dans la province d’Aggerhus.

* HENNIL, s. m. (Myth.) c’étoit une idole des Vandales ; elle étoit honorée dans tous les hameaux ; on la figuroit comme un bâton, avec une main & un anneau de fer. Si le hameau étoit menacé de quelque danger, on la portoit en procession, & les peuples crioient, réveille-toi, Hennil, réveille-toi.

HENNIN, s. m. (Hist. des Modes.) nom d’une coëffure colossale des dames françoises du xv. siécle.

Ce nom bizarre a passé jusqu’à nous, parce que l’attirail de tête étoit si singulier, qu’il n’a échappé à aucun historien de ce tems-là, ni à Juvenal des Ursins, ni à Monstrelet, ni à Paradin, ni aux autres ; mais nous emprunterons seulement le vieux Gaulois de ce dernier, pour peindre au lecteur cette folie de mode, dont il n’a peut-être point de connoissance.

Tout le monde (dit cet Ecrivain dans ses Annales de Bourgogne, liv. III. année 428, pag. 700) « étoit lors fort déréglé, & débourdé en accoutremens, & sur-tout les accoutremens de tête des dames étoient fort étranges ; car elles portoient de hauts atours sur leurs têtes, & de la longueur d’une aulne ou environ, aigus comme clochers, desquels dépendoient par derriere de longs crêpes à riches franges, comme étendarts ».

Un Carme de la province de Bretagne, appellé Thomas Conecte, célebre par son austérité de vie, par ses prédictions & son exécution à Rome, où il fut brûlé comme hérétique en 1434, déclamoit de toute sa force contre ces coëffures monstrueuses. « Ce prêcheur avoit cette façon de coëffure en telle horreur, que la plûpart de ses sermons s’adressoient à ces atours des dames, avec les plus véhémentes invectives qu’il pouvoit songer, sans épargner toutes especes d’injures dont il pouvoit se souvenir, dont il se débaquoit à toute bride contre les dames

usant de tels atours, lesquels il nommoit les hennins.

Par-tout où frere Thomas alloit, (ajoute Paradin) les hennins ne s’osoient plus trouver, pour la haine qu’il leur avoit vouée ; chose qui profita pour quelque tems, & jusqu’à ce que ce prêcheur fût parti ; mais après son partement, les dames releverent leurs cornes, & firent comme les limaçons, lesquels quand ils entendent quelque bruit, retirent & resserrent tout bellement leurs cornes ; ensuite le bruit passé, soudain ils les relevent plus grandes que devant : ainsi firent les dames, car les hennins ne furent jamais plus grands, plus pompeux & superbes, qu’après le partement de frere Thomas ; voilà ce que l’on gaigne de s’opiniâtrer contre l’opiniâtrerie d’aucunes cervelles. »

D’Argentré (Hist. de Bretagne, liv. X. chap. xlij.) rapporte pareillement « qu’après le partement du moine Conecte, les femmes reprinrent soudainement les cornes avec arrérages, c’est-à-dire bien de la récompense du passé, &c. »

Je laisse les autres historiens dont le récit ne nous apprend rien de plus particulier, pour passer aux réflexions qui naissent du sujet. Les hommes ont toujours eu du penchant à vouloir paroître plus grands qu’ils ne sont, soit en imaginant des talons fort hauts, soit en se servant de cheveux empruntés, soit en réunissant ces deux choses ensemble. D’un autre côté, les femmes avec plus de raison, ont cherché de tout tems à agrandir leur petite taille, par des chaussures très-élevées, & par des coëffures colossales. Dans le siecle de Juvenal, les dames romaines bâtissoient sur leurs têtes plusieurs étages d’ornemens & de cheveux en pyramide ; en sorte, dit le poëte, qu’en les regardant par-devant, on les prenoit pour des Andromaques, pendant qu’elles paroissoient des naines par derriere.

Tot premit ordinibus, tot adhuc compagibus altum
Ædificat caput. Andromachem à fronte videbis,
Post minor est. Juvenal, Sat. VI. v. 500.

Ajoutez-y ce bon mot de Synésius (Epit, 111.) qui dit en parlant d’une nouvelle mariée : Quippe in diem sequentem tæniis ornabitur, atque turrita quemadmodùm Cybele, circumibit.

Voilà donc dans les modes de l’ancienne Rome, celle des hennins du xv. siecle, qui a été finalement renouvellée par une coëffure semblable, qui parut sous le nom de fontange sur la fin du xvij siecle.

Cette derniere étoit un édifice à plusieurs étages fait de fil de fer, sur lequel on plaçoit quantité de morceaux de mousseline, séparés par plusieurs rubans ornés de boucles de cheveux ; le tout étoit distingué par des noms si fous, qu’on auroit besoin d’un glossaire pour entendre ce que c’étoit que la duchesse, le solitaire, le chou, le mousquetaire, le croissant, le firmament, le dixieme ciel, la souris, &c. qui étoient tout autant de différentes pieces de l’échaffaudage. Il falloit, si l’on peut parler ainsi, employer l’adresse d’un habile serrurier, pour dresser la base de ce comique édifice, & cette palissade de fer sur laquelle les coëffeuses attachoient tant de pieces différentes.

Enfin la ridicule pyramide s’affaissa tout-à-coup à la cour & à la ville, au commencement de 1701. On sait à ce sujet les jolis vers de madame de Lassay (ou plûtôt de l’abbé de Chaulieu sous son nom), à madame la duchesse qui demandoit des nouvelles.

Paris cede à la mode, & change ses parures ;
Ce peuple imitateur, ce singe de la cour,
A commencé depuis un jour,
D’humilier enfin l’orgueil de ses coëffures :
Mainte courte beauté s’en plaint, gronde & tempête,
Et pour se rallonger consultant les destins,