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été le témoin de son malheur & de l’infidélité de sa femme. Il ne le ruina point, il fit mettre seulement aux deux côtés de Vénus les images de deux autres divinités, celle de Thétis & celle de la déesse Praxidice, comme qui diroit la déesse des châtimens, pour montrer qu’il ne laisseroit pas l’affront impuni ». Tout ce détail de M. la Guilletiere est d’autant meilleur qu’il est tiré de Pausanias.

Il y a eu plusieurs autres lieux nommés Hélene. 1°. Une île de la mer Egée ; 2°. une île de la Grece entre les Sporades ; 3°. une ville de Bithynie ; 4°. une ville de la Palestine ; 5°. une fontaine de l’île de Chio ; 6°. une riviere dont parle Sidonius Apollinaris, & qui est la Canche. (D. J.)

Hélene (Sainte), Géog. île de la mer Atlantique, qui a six lieues de circuit ; elle est haute, montueuse, & entourée de rochers escarpés. Les montagnes qui se découvrent à 25 lieues en mer, sont couvertes la plûpart de verdure & de grands arbres, comme l’ébénier, tandis que les vallées sont fertiles en toutes sortes de fruits, & d’excellens légumes ; les arbres fruitiers y ont en même tems des fleurs, des fruits verds & des fruits mûrs ; les forêts sont remplies d’orangers, de limoniers, de citronniers, &c. Il y a du gibier & des oiseaux en grande quantité, de la volaille, & du bétail qui est sauvage. La mer y est fort poissonneuse ; la seule incommodité qu’on éprouve, vient de la part des mouches & des araignées qui y sont monstrueusement grosses.

Cette île fut découverte par Jean de Nova, Portugais, en 1502, le jour de sainte Hélene. Les Portugais l’ayant abandonnée, les Hollandois s’en emparerent, & la quitterent pour le cap de Bonne-Espérance. La compagnie des Indes d’Angleterre s’en saisit ; & depuis, les Anglois l’ont possédée, & l’ont mise en état de se bien défendre. Long. selon Halley, 11. 32. 30. lat. mérid. 16.

Il y a une autre île de ce nom dans l’Amérique septentrionale au Canada, dans le fleuve de S. Laurent, vis-à-vis de Mont-Réal. (D. J.)

HELENIUM, s. m. (Hist. anc. Botan.) chez les botanistes modernes, la plante qu’ils appellent en Latin helenium ou enula campana, est notre aunée en François. Voyez Aunée.

Mais il est bien étrange que Théophraste & Dioscoride, tous deux Grecs, ayent nommé helenium des plantes entiérement différentes. Théophraste met son helenium au rang des herbes dont on faisoit des couronnes ou des bouquets, & cet auteur remarque qu’elle approchoit du serpolet. Dioscoride, au contraire, donne à son helenium une racine d’odeur aromatique, & des feuilles semblables à celles de notre bouillon-blanc ; de sorte que par-là sa description convient du moins à notre aunée pour la racine, & pour les feuilles, qui sont molles, velues en dessous, larges dans le milieu, & pointues à l’extrémité. Je crois volontiers que l’inula d’Horace peut être l’aunée des modernes ; mais, dira-t-on, la racine de l’aunée des modernes est amere, & Horace appelle la sienne aigre : il dit,

. . . . . . Quum crapulâ plenus
Atque acidas mavult inulas.


La raison de cette différence viendroit de ce que ce poëte parle de l’aunée préparée, ou confite avec du vinaigre & d’autres ingrédiens, de la maniere apparemment que Columelle l’enseigne, lib. XII. cap. xlvj. Il faudroit donc alors traduire le passage d’Horace : « Puni de sa gloutonnerie par le mal qu’elle lui cause, il cherche à se ragouter par de l’aunée préparée ».

Pour ce qui regarde Pline, il a rejetté dans sa description de l’helenium celle de Discoride, a emprunté la sienne de Théophraste, & autres auteurs

grecs, & en même tems il a adopté les vertus & les qualités que Dioscoride donne à la plante qu’il décrit sous le nom d’helenium ; ainsi faisant erreurs sur erreurs, il a encore donné lieu à plusieurs autres de les renouveller d’après lui. Il importe de se ressouvenir dans l’occasion de cette remarque critique, car elle peut être utile plus d’une fois. (D. J.)

HELENOPOLIS, (Géog. anc.) ville épiscopale d’Asie dans la Bithynie, autrement nommée Drepanum, Drépane ; elle étoit située sur le golfe de Nicomédie, entre Nicomédie & Nicée. C’étoit le lieu de la naissance & de la mort de l’impératrice Hélene, & ce lieu n’est plus rien aujourd’hui. (D. J.)

HELEPOLE, s. m. (Art milit. & Hist.) machine militaire des anciens propre à battre les murailles d’une place assiégée.

Ce mot vient du grec ἑλέπολις, qui est composé des mots ἑλεῖν, prendre, & πόλις, ville.

L’hélépole étoit une tour de bois composée de plusieurs étages, qui avoit quelquefois des ponts qu’on abattoit sur les murailles des villes & sur les breches, pour y faire passer les soldats dont cette machine étoit remplie.

Parmi les auteurs qui ont écrit de l’hélépole, il y en a plusieurs qui prétendent qu’il y avoit un bélier au premier étage.

Diodore de Sicile & Plutarque ont donné la description du fameux hélépole de Démétrius le Poliorcete au siége de Rhodes. Voici celle de Diodore.

« Démetrius ayant préparé quantité de matériaux de toute espece, fit faire une machine qu’on appelle hélépole, qui surpassoit en grandeur toutes celles qui avoient paru avant lui. La base en étoit quarrée. Chaque face avoit 50 coudées. Sa construction étoit un assemblage de poutres équarries, liées avec du fer ; les poutres distantes les unes des autres, d’environ une coudée, traversoient cette base par le milieu pour donner de l’aisance à ceux qui devoient pousser la machine. Toute cette masse étoit mise en mouvement par le moyen de huit roues proportionnées au poids de la machine, dont les jantes étoient de deux coudées d’épaisseur, & armées de fortes bandes de fer.

… » Aux encoignures il y avoit des poteaux d’égale longueur, & hauts à peu-près de cent coudées, tellement panchés les uns vers les autres, que la machine étant à neuf étages, le premier avoit quarante-trois lits, & le dernier n’en avoit que neuf ». (On croit que par ces lits il faut entendre les solives qui soutenoient le plancher de chaque étage, c’est le sentiment de M. de Folard.) « Trois côtés de la machine étoient couverts de lames de fer, afin que les feux lancés de la ville ne pussent l’endommager. Chaque étage avoit des fenêtres sur le devant d’une grandeur & d’une figure proportionnée à la grosseur des traits de la machine. Au-dessus de chaque fenêtre étoit élevé un auvent, ou maniere de rideau fait de cuir, rembourré de laine, lequel s’abaissoit par une machine, & contre lequel les coups lancés par ceux de la place perdoient toute leur force. Chacun des étages avoit deux larges échelles, l’une desquelles servoit à porter aux soldats les munitions nécessaires, & l’autre pour le retour. Pour éviter l’embarras & la confusion, trois mille quatre cens hommes poussoient cette machine, les uns par dedans, les autres par dehors. C’étoit l’élite de toute l’armée pour la force & pour la vigueur ; mais l’art avec lequel cette machine avoit été faite, facilitoit beaucoup le mouvement ».

Vegece donne aussi une sorte de description de ces especes de tours, qu’on va joindre à celle de Demetrius. Ceux qui voudront entrer dans un plus grand détail de ces tours & des autres machines de