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tances modifient beaucoup l’effet de la direction plus ou moins inclinée des rayons du soleil dans les différens pays.

L’intervalle qui se trouve entre les limites du plus grand chaud & du plus grand froid dans chaque contrée, croît à-mesure qu’on s’éloigne de l’équateur, avec quelques exceptions toûjours dépendantes du sol, & sur-tout du voisinage de la mer. Un pays habité, cultivé, desséché est moins froid : un pays maritime est moins froid à même latitude, & peut-être aussi moins chaud.

A-mesure qu’on s’éleve au-dessus des plaines dans les hautes montagnes, la chaleur diminue & le froid même se fait sentir. Sur les montagnes des Cordelieres la neige, qui recouvre le sommet de quelques-unes, ne fond pas à la hauteur de 2440 toises au-dessus du niveau de la mer, & la chaleur respecte cette limite dans toute l’étendue de la Cordeliere. Dans les zones tempérées, les pays montagneux ont aussi des sommets couverts de neige, & même des amas monstrueux de glace que la chaleur des étés ne fond point entierement ; seulement la ligne qui sert de limite à la neige qui ne fond point est moins élevée dans ces zones que sous la torride.

Mais le froid ne se répand jamais dans les plaines des zones torrides, comme il fait ressentir ses effets dans l’étendue des zones tempérées & glaciales. Les fleuves gelent à la surface des continens, ainsi que les lacs dans une partie des tempérées & dans toute l’étendue des zones glaciales ; mais la salure en préserve les plaines mers à ces latitudes. Ce n’est que vers les côtes, dans les parages tranquilles, dans les golfes ou détroits des zones glaciales, que la mer gele ; & les glaces ne s’étendent pas à une vingtaine de lieues des côtes. La mer gele sur-tout dans les endroits vers lesquels les fleuves versent une grande quantité d’eau douce, ou charrient de gros glaçons qui s’accumulant à leur embouchûre, contribuent à la formation de ces énormes montagnes de glaces qui voyagent ensuite dans les mers plus méridionales ; en sorte que les glaces qu’on trouve dans les plaines mers indiquent de grands fleuves qui ont leurs embouchûres près de ces parages. Par rapport à la température des soûterreins & de la mer à différentes profondeurs, nous ne pouvons offrir aucuns résultats bien déterminés.

Les principales agitations de l’air que nous considérons sont les vents ; en général les courans d’air sont fort irréguliers & très-variables : cependant le vent d’est souffle continuellement dans la même direction, en conséquence de la raréfaction que le soleil produit successivement dans les différentes parties de l’atmosphere. Comme le courant d’air qui est la suite de cette dilatation doit suivre le soleil, il fournit un vent constant & général d’orient en occident, qui contribue par son action au mouvement général de la mer d’orient en occident, & qui regne à 25 ou 30 degrés de chaque côté de l’équateur.

Les vents polaires soufflent aussi assez constamment dans les zones glaciales ; dans les zones tempérées il n’y a aucune uniformité reconnue. Le mouvement de l’air est un composé des vents qui regnent dans les zones collatérales, c’est-à-dire des vents d’est & de nord. A combien de modifications ces courans ne doivent-ils pas être assujettis, suivant que les vents d’est ou de nord dominent ? Le vent d’oüest paroît être même un reflux du vent d’est modifié par quelques côtes.

Sur la mer ou sur les côtes les vents sont plus réguliers que sur terre ; ils soufflent aussi avec plus de force & plus de continuité. Sur les continens, les montagnes, les forêts, les différentes bases de terreins changent, & alterent la direction des vents. Les vents réfléchis par les montagnes se font sentir

dans toutes les provinces voisines ; ils sont très-irréguliers, parce que leur direction dépend de celle du premier courant qui les produit, ainsi que des contours, de la situation & de l’ouverture même des montagnes. Enfin les vents de terre soufflent par reprises & par boutades.

Au printems & en automne les vents sont plus violens qu’en hyver & en été, tant sur mer que sur terre ; ils sont aussi plus violens à-mesure qu’on s’éleve au-dessus des plaines & jusqu’au-dessus de la région des nuages.

Il y a des vents périodiques qui sont assujettis à certaines saisons, à certains jours, à certaines heures, à certains lieux ; il y en a de reglés produits par la fonte des neiges, par le flux & reflux. Quelquefois les vents viennent de la terre pendant la nuit, & de la mer pendant le jour. Nous n’avons point encore assez d’observations pour connoître s’il y a quelque rapport entre les vicissitudes de l’air dans chaque pays. Nous savons seulement par les observations du barometre, qu’il y a plus de variations dans les zones tempérées, que dans les zones torrides & glaciales ; qu’il y en a moins dans la région élevée de l’atmosphere, que dans celle où nous vivons.

En vertu de la chaleur du soleil l’air ayant acquis une certaine température, dissout l’eau & s’en charge ; c’est ce qui produit cette abondante évaporation des eaux de dessus les mers & les continens. Ces vapeurs une fois condensées forment les nuages que les vents sont circuler dans une certaine région de l’air dépendante de leur densité & de la sienne ; ils les transportent dans tous les climats : les nuages ainsi voiturés ou s’élevent en se dilatant, ou s’abaissent en se condensant suivant la température de la base de l’atmosphere qui les soûtient ; lorsqu’ils rencontrent dans leur course l’air plus froid des montagnes, ou bien ils y tombent en flocons de neige, en brouillards, en rosées, suivant leur état de densité & d’élevation ; ou bien ils s’y fixent & s’y resolvent en pluies. Le vent d’est les disperse surtout entre les tropiques ; ce qui cause & les pluies abondantes de la zone torride, & les inondations périodiques des fleuves qui ont leurs sources dans ces contrées.

Quelquefois les nuages condensés au sommet des montagnes s’en trouvent éloignés par des vents réflechis, ou autres qui les dispersent dans les plaines voisines.

Les montagnes contribuent tellement à cette distribution des eaux, qu’une seule chaîne de montagnes décide de l’été & de l’hyver entre deux parties d’une presqu’île qu’elle traverse. On conçoit aussi que le sol du terrein contribuant à l’état de l’atmosphere, il y aura des pays où il ne tombera aucune pluie, parce que les nuages s’éleveront au-dessus de ces contrées en se dilatant.

Enfin nous concevons maintenant pourquoi nous avons trouvé certains points de partage pour la distribution des eaux qui circulent sur la surface des continens : ces points de partage sont des endroits élevés & hérissés de montagnes & de pics qui raccrochent, condensent, fixent & resolvent les nuages en pluies, &c.

Lorsque des vents contraires soufflent contre une certaine masse de nuages condensés & prêts à se résoudre en pluie, ils produisent des especes de cylindres d’eau continués depuis les nuages d’où ils tombent jusque sur la mer ou la terre : ces vents donnent à l’eau la forme cylindrique en la resserrant & la comprimant par des actions contraires. On nomme ces cylindres d’eau trombes, qu’il ne faut pas confondre avec le typhon ou la trombe de mer. On peut rapporter à ces effets ceux que des vents violens & contraires