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& villages du Boulonnois, pour commander aux régimens de s’assembler & de marcher aux rendez-vous généraux, tant au-delà qu’en-deçà de la Lyane.

Cette opération est d’une exécution facile & prompte ; & en douze heures l’officier général qui commande en Boulonnois, peut être sûr d’avoir 7 à 8 mille hommes sous les armes. L’ordre établi en Boulonnois est très-bon, n’est point à charge au pays : l’esprit militaire s’y conserve. Cette province, la plus voisine de l’Angleterre, peut se garder par ses propres forces, sans que la culture des terres en souffre.

Pendant la derniere guerre les troupes enrégimentées étoient fort belles, ont bien servi, & étoient très-bien composées en officiers.

Nous avons plusieurs provinces maritimes où le même ordre seroit très utile à établir.

En tems de guerre tous les postes des gardes-côtes ont un signal qui peut être apperçû des postes de droite & de gauche. Ces signaux s’exécutent pendant le jour avec des drapeaux & des flammes, telles que celles des galeres ; pendant la nuit avec des fanaux & des feux. Dans le Boulonnois, le Roi entretient en tems de guerre un guetteur sur la montagne du Grinéz & sur celle du Blanéz. Ces deux montagnes forment les pointes de la petite baie de Willan, que l’on croit être l’ancien port d’Ictium des Romains ; mais qui n’est plus aujourd’hui d’aucun usage, par la quantité de sables qui l’ont comblé, & qui ont même entierement couvert tout le terrein où l’ancienne ville de Willan étoit bâtie.

Le guetteur du Grinéz se trouve dans le cap de France le plus proche de l’Angleterre : le trajet en droite ligne n’est que de cinq lieues & demie, à 2400 toises la lieue. Ce guetteur découvre avec sa lunette la moindre barque qui sort du port de Douvres : deux cavaliers d’ordonnance restent de garde au Grinéz, pour faire leur rapport à Boulogne.

Le guetteur de Blanéz découvre tout ce qui sort des Dunes, & double la pointe de Danjeneasse ; des ordonnances du Calaisis y restent de garde, & font leur rapport à Calais.

De la tour de Dunkerque le guetteur découvre tout ce qui sort de la Tamise ; toute cette partie des côtes de France voit à l’instant ce qui se passe sur les bords opposés, d’où l’on ne peut découvrir nos manœuvres, nos côtes étant plus basses, & la mer les couvrant ; ce qui se définit, en terme de marine, en disant que la mer mange la côte. Les capitaines des gardes-côtes doivent connoître tous les sondages de l’étendue de la côte qu’ils ont à garder, pour juger sûrement des endroits où il est possible de faire une descente.

Cette connoissance est très-facile à prendre sur les côtes de la Méditerranée, où le flux le plus haut ne monte pas à un pié ; mais sur les côtes de l’Océan il faut évaluer toutes les différentes hauteurs des marées, qui varient selon les saisons & le tems des équinoxes, & deux fois tous les mois régulierement, en suivant les quartiers de la lune ; ce qui fait deux changemens considérables en vingt-huit jours. Les gens de mer nomment ces flux réglés, vive-eau & morte-eau. Tel petit port des côtes de l’Océan ne pourroit recevoir de morte-eau un bâtiment de 60 tonneaux, qui peut en recevoir un de 300 de vive-eau. Cette connoissance paroît avoir été négligée, cette évaluation est cependant très-importante à faire, soit lorsqu’on médite quelqu’embarquement, soit lorsqu’on peut craindre quelque descente.

D’espace en espace il y a des batteries & des redoutes sur le bord de la mer ; quelques-unes sont armées en bronze ; & les canons, leur service & leur garde appartiennent à l’artillerie & aux troupes de terre ; les autres sont armées en fer & appartiennent

à la marine, & sont gardées & servies par des détachemens de troupes de la marine ou des gardes-côtes. En tems de guerre les unes & les autres sont également sous les ordres de l’officier général commandant dans la province.

Ces batteries sont placées, le plus qu’il est possible, dans les endroits où la mer fait échor, terme dont les Marins se servent pour indiquer un point de la côte où le fond est assez profond pour que la mer reste près de la côte à basse mer, même pendant le tems de morte-eau.

Il seroit à desirer qu’on mît plus d’uniformité dans le service des gardes-côtes ; il est facile aussi de perfectionner ce service, qui devient quelquefois tresimportant : il le sera toûjours beaucoup en tems de guerre, de mettre ce service au point que les côtes puissent être défendues par leurs propres forces, & que les armées en campagne ne soient point obligées de détacher des brigades ou des régimens pour remplacer ce qui manque à la défense des côtes. Article de M. le comte de Tressan.

Garde Côtes, (Marine.) on donne ce nom à des vaisseaux de guerre ou des frégates que le Roi fait croiser le long de nos côtes pour la sûreté du Commerce, & protéger les marchands contre les corsaires qui pourroient troubler leur navigation.

Garde-Côtes, Capitaineries Garde-Côtes ; c’est un nombre de villages voisins de la mer, qui sont sujets à la garde d’une certaine étendue de côtes reglées par des ordonnances du Roi, qui fixent l’etendue de chaque capitainerie, & les lieux qui y sont compris. Chaque capitainerie a son capitaine, un lieutenant, & un enseigne : en tems de guerre, ces compagnies sont obligées de faire le guet, & de marcher aux endroits où les ennemis voudroient tenter quelques descentes, ou faire quelques entreprises. Voyez ci-devant Gardes-côtes.

Garde de Feux, (Marine.) ce sont des caisses de bois qui servent à mettre les gargousses, après qu’on les a remplies de poudre pour la charge des canons, & à les garder dans le fond de cale.

Garde-Magasin, (Marine.) c’est un commis chargé de tenir état de tout ce qui entre & sort des magasins qui sont dans un port, soit pour la construction, armement ou desarmement des vaisseaux. L’ordonnance de Louis XIV. pour les armées navales & arsenaux de la marine, du 15 Avril 1689, regle les fonctions des gardes-magasins, & leur prescrit ce qu’ils doivent observer. (Z)

Gardes de la Marine, ou Gardes-Marine ; ce sont de jeunes gentilshommes choisis & entretenus par le Roi dans ses ports pour apprendre le service de la marine, & en faire des officiers.

Ils sont par compagnies, distribuées dans les ports de Brest, de Toulon, & de Rochefort.

Le Roi paye des maîtres pour les instruire de tout ce qu’il est nécessaire de savoir pour faire de bons officiers ; ils en ont pour les Mathématiques, le Dessein, l’Ecriture, la Fortification, la Construction, l’Hydrographie, la Danse, l’Escrime, &c.

On les embarque sur les vaisseaux du Roi, où ils servent comme soldats, & en font toutes les fonctions ; & pour entretenir & cultiver pendant qu’ils sont à la mer les connoissances qu’ils auront prises dans les ports, leur commandant de concert avec le capitaine du vaisseau, marque quatre heures destinées à leurs différens exercices. La premiere pour le Pilotage & l’Hydrographie, la seconde pour l’exercice du mousquet & les évolutions militaires, la troisieme pour l’exercice du canon, la quatrieme pour l’exercice de la manœuvre quand le tems le permettra, qui sera commandée par le capitaine en chef, ou le capitaine en second, & qui la fera commander aussi par les gardes chacun à son tour.