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lame. Voyez Epithalame. Ce mot est dérivé du grec γάμος, mariage. (G)

GAMELLE, s. f. (Marine.) est en général une jatte de bois. Celle des marins est fort creuse, & sans bord ; on y met le potage, ou ce qui est destiné pour le repas de chaque plat des gens de l’équipage. Voyez Plat de l’équipage.

Le nombre de gens qui doivent manger à un même plat n’est pas fixé ; on met six, sept ou huit personnes a chaque gamelle.

Les matelots malades ou blessés sont soignés & servis par ceux qui mangeoient avec eux à la même gamelle.

Manger à la gamelle, c’est être réduit à manger avec les matelots ; ce que l’on ordonne quelquefois comme une punition de fautes legeres, à ceux qui mangeoient à la table du capitaine.

Dans les fontaines salantes, l’écuelle qui sert à puiser l’eau salée dans les poëles, pour s’assûrer si la mure ou muire est bonne, s’appelle aussi une gamelle. (Z)

GAMITES ou GEMITES, (Hist. nat.) pierre dont il est parlé dans Pline & dans d’autres auteurs anciens. On prétend qu’elle étoit blanche, & que l’on y voyoit deux mains qui se joignoient ; ce qui lui a fait donner le nom qu’elle porte, qui signifie pierre de mariage. Il y a lieu de croire que cette pierre étoit factice, du moins elle est entierement inconnue des modernes, qui n’ont peut-être pas l’imagination assez vive pour remarquer les mêmes choses que voyoient les anciens.

GAMME, s. f. GAMMUT ou GAMMA-UT, est en Musique une table ou échelle inventée par Guy Aretin, sur laquelle on apprend à nommer & à entonner juste les degrés de l’octave par les six notes de musique ut, ré, mi, fa, sol, la, suivant toutes les différentes dispositions qu’on peut leur donner ; ce qui s’appelle solfier.

La gamme a aussi été nommée main harmonique, parce que Guy employa d’abord la figure d’une main, sur les différens doigts de laquelle il rangea ses notes, pour montrer le rapport de ses hexacordes avec les tétracordes des Grecs. Cette main a été en usage pour apprendre à nommer les notes, jusqu’à l’invention du si, qui a aboli chez nous les muances, & par conséquent la main harmonique qui sert à les expliquer.

Guy Aretin ayant, selon l’opinion commune, ajoûté au diagramme des Grecs un tétracorde à l’aigu & une corde au grave ; ou plûtôt, selon Meibomius, ayant par ces additions rétabli ce diagramme dans son ancienne étendue, il appella cette corde grave, hypoproslambanomenos, & la marqua par le Γ des Grecs ; & comme cette lettre se trouve à la tête de l’échelle, en commençant par les sons graves, selon la méthode des anciens, elle a fait donner à cette échelle le nom barbare de gamme.

Cette gamme donc, dans toute son étendue, étoit composée de vingt cordes ou notes, c’est-à-dire de deux octaves & d’une sixte majeure. Ces cordes étoient représentées par des lettres & par des syllabes. Les lettres designoient invariablement chacune une corde déterminée de l’échelle, comme elles font encore aujourd’hui ; mais comme il n’y avoit que sept lettres, & qu’il falloit recommencer d’octave en octave, on distinguoit ces octaves par les figures des lettres. La premiere octave se marquoit par des lettres majuscules, de cette maniere, Γ. A. B. &c. la seconde par des caracteres ordinaires, g, a, b, &c. & la sixte surnuméraire se désignoit par des lettres doubles, gg, aa, bb, &c.

Pour les syllabes, elles ne représentoient que les noms qu’il falloit donner aux notes en les chantant : or comme il n’y avoit que six noms pour sept notes,

c’étoit une nécessité qu’au-moins un même nom fût donné à deux différentes notes, ensorte que ces deux notes mi, fa, ou la, fa, tombassent sur les semi-tons ; par conséquent dès qu’il se présentoit un dièse ou un bémol qui amenoit un nouveau semi-ton, c’étoit encore des noms à changer ; ce qui faisoit donner, non-seulement le même nom à différentes notes, mais différens noms à la même note, selon le progrès du chant ; & c’est-là ce qu’on appelloit les muances.

On apprenoit donc ces muances par la gamme. A la gauche de chaque degré on voyoit une lettre qui indiquoit la corde précise qui appartenoit à ce degré : à la droite, dans les cases, on trouvoit les différens noms que cette même note devoit porter en montant ou en descendant par béquarre ou par bémol, selon le progrès.

Les difficultés de cette méthode ont fait faire en divers tems des changemens à la gamme. La figure 10. Pl. I. Musiq. représente cette gamme, telle qu’elle est aujourd’hui en usage en Angleterre. C’est à-peu-près la même chose en Allemagne & en Italie, si ce n’est que chez les uns on trouve à la derniere place la colonne de béquarre qui est ici la premiere, ou quelqu’autre legere différence aussi peu importante.

Pour se servir de cette échelle, si l’on veut chanter au naturel, on applique ut à G ou à Γ de la premiere colonne, le long de laquelle on monte jusqu’au la ; après quoi passant à droite dans la colonne du bénaturel, on nomme fa : on monte au la de la même colonne, puis on retourne dans la précédente à mi, & ainsi de suite. Ou bien on peut commencer par ut au C de la seconde colonne ; arrivé au la, passer à mi dans la premiere colonne, puis repasser dans l’autre colonne au fa. Par ce moyen une de ces transitions forme toûjours un semi-ton ; savoir la, fa, & l’autre toûjours un ton, la, mi. Par bémol on peut commencer à l’ut en C ou F, & faire les transitions de la même maniere, &c.

En descendant par béquarre, ou quitte l’ut de la colonne du milieu, pour passer au mi de celle par béquarre, ou au fa de celle par bemol ; puis descendant jusqu’à l’ut de cette nouvelle colonne, on en sort par fa de gauche à droite, par mi de droite à gauche, &c. Les Anglois n’employent pas toutes ces syllabes, mais seulement les quatre premieres, ut, ré, mi, fa ; changeant ainsi de colonne de quatre en quatre notes, par une méthode semblable à celle que je viens d’expliquer, si ce n’est qu’au lieu de la, fa, & de la, mi, ils muent par fa, ut, & par mi, ut.

Toutes ces gammes sont toûjours de véritables tortures pour ceux qui veulent s’en servir pour apprendre à chanter. La gamme françoise, qu’on a aussi appellée gamme du si, est incomparablement plus aisée ; elle consiste en une simple échelle de sept degrés sur deux colonnes, outre celle des lettres. Voyez fig. 2. Planche I.

La premiere colonne à gauche est pour chanter par bémol, c’est-à-dire avec un bémol à la clé, la seconde, pour chanter au naturel. Voilà tout le mystere de notre gamme.

Aujourd’hui que les musiciens françois chantent tout au naturel, ils n’ont que faire de gamme ; C-sol-ut, ut & C ne sont pour eux que la même chose : mais dans le système de Guy ut est une chose, & C en est une autre fort différente ; & quand il a donné à chaque note une syllabe & une lettre, il n’en a pas prétendu faire des synonymes. (S)

Nous joindrons à cet article quelques observations. Les sons, ou, ce qui revient au même, les cordes des instrumens chez les Grecs, n’étoient à la rigueur, selon M. Burette, qu’au nombre de quinze, dont l’assemblage formoit tout le système de l’ancienne musique. Ce grand système se partageoit na-