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L’opération de la seconde & de la troisieme baguette se fait de même, excepté qu’à chaque changement de baguette on diminue de cinq le nombre des coups, & le massif ne doit être frappé que de vingt coups ; la raison de cette diminution est que la matiere qui augmente d’épaisseur à mesure que la broche diminue, présentant au feu moins de surface, a moins besoin d’être refoulée.

Lorsque la fusée passe 18 lignes de diametre, on augmente le nombre des coups à proportion qu’elle est grosse jusqu’à 50 pour la premiere baguette, & l’on en diminue de même le nombre jusqu’à 25 coups pour les plus petites.

Une fusée doit être chargée en 12 à 13 charges, 9 à 10 pour couvrir la broche, & 2 à 3 pour le massif.

Le massif étant chargé à niveau du moule, on met dessus un tampon de papier chiffonné, & on le frappe d’une douzaine de coups ; puis avec un poinçon dont la pointe soit un peu émoussée, on dedouble la partie du cartouche qui est restée vuide au-dessus du massif jusqu’à la moitié de l’épaisseur du cartouche ; on la replie sur le tampon ; & posant dessus la baguette à rendoubler, on la frappe de vingt coups ; après quoi, sans ôter la fusée de dessus la broche, on perce le carton redoublé de deux à trois trous avec le poinçon à arête, en frappant dessus avec le maillet. L’arête sert à l’empêcher de pénétrer plus avant qu’il ne faut, il suffit qu’il atteigne la composition ; on conçoit que s’il pénétroit trop avant, il affoibliroit le massif, qui donneroit trop tôt feu à la chasse, ces trous étant faits pour y communiquer le feu.

Après cette opération, on retire la fusée de dessus la broche, on délie la corde qui remplissoit l’étranglement, & on rogne la partie du cartouche qui excede le carton rendoublé.

Si les fusées doivent être gardées, il faut coller un rond de papier sur chacun des bouts, pour les garantir de l’impression de l’air & du feu ; en cet état elles se conserveront très-long-tems bonnes, si avec cette précaution on a eu celle de n’employer que des matieres bien seches dans la composition.

Art. VI. Du pot & chapiteau, & comment on garnit les fusées volantes. Le pot doit être fait du même carton que la fusée ; on le roule sur un cylindre de bois que l’on nomme le moule à former le pot ; on lui donne d’épaisseur deux à trois tours de carton, suivant que la fusée est plus ou moins grosse.

Ce moule à former le pot, quoique d’une même piece, a deux parties cylindriques de différens diametres ; l’une sur laquelle on roule le pot, a de diametre un & trois-quarts de celui de la fusée, pris extérieurement, & de longueur, trois diametres.

Le diametre de l’autre partie, sur laquelle on étrangle le pot, est de trois quarts un huitieme, & sa longueur, de deux pareils diametres.

On observera que, pour les fusées de douze lignes, on peut leur donner la hauteur des serpenteaux ordinaires, faits de cartes à joüer, que ces fusées peuvent porter pour garnitures ; & comme les paquets d’étoiles sont beaucoup moins hauts, on réduira le pot à la proportion ci-dessus, lorsque ces fusées en seront garnies.

Le pot étant étranglé à la mesure susdite, on rogne bien droit la partie étranglée, ne lui laissant de longueur que ce qu’il en faut pour le lier commodément sur la fusée : on trempe dans l’eau cette partie, pour la rendre flexible ; & après avoir fait la ligature, on colle dessus une bande de papier brouillard, tant pour la cacher, que pour empêcher qu’elle ne se relâche.

Pour garnir la fusée, on commence à verser dans le pot une pincée de poussier ; & en frappant un peu

contre, on la fait entrer dans les trous qui doivent communiquer le feu à la chasse : on verse ensuite dans le pot une cornée de la même composition dont on a chargé la fusée ; c’est ce qui s’appelle la chasse ; & on arrange dessus les serpenteaux ou étoiles qu’elle doit jetter, en observant de n’en pas mettre plus pesant que le corps de la fusée ; ensorte que la fusée de quatre onces n’en pese pas plus de huit, lorsqu’elle est garnie ; & ainsi des autres. Une fusée dont la garniture seroit trop pesante, ne s’éleveroit qu’à une médiocre hauteur, & retomberoit à terre, en faisant un demi-cercle. On dit d’une telle fusée, qu’elle a arqué, pour exprimer la ligne courbe qu’elle a décrite.

On place quelques petits tampons de papier chiffonné dans les interstices des serpenteaux ou des paquets d’étoiles, pour empêcher qu’ils ne balottent ; & on ferme le pot avec un rond de papier collé dessus : il faut le taillader par les bords pour empêcher qu’il ne fasse des plis.

Avant de mettre les paquets d’étoiles dans le pot, on les passe dans du poussier, pour leur faire prendre feu plus subitement.

Le chapiteau est ce qui termine la fusée en forme de cône ; il est fait d’une simple épaisseur de carton. Pour lui donner la grandeur qui convient, on trace sur du carton un rond au compas, dont l’ouverture doit être d’un diametre un tiers du pot ; on divise ce rond en deux ; & chaque moitié donne de quoi former un chapiteau ; on la mouille, pour en ôter le ressort ; on en colle les extrémités ; & en la contournant, on lui fait prendre la forme d’un cône.

Lorsqu’il est sec, on donne des coups de ciseaux sur les bords de sa circonférence, pour que cette partie joigne mieux sur le pot où elle doit être collée ; & on la mouille pour en ôter le ressort.

Le chapiteau étant placé bien droit sur le pot, on colle sur la scissure une bande de papier brouillard, tant pour la cacher, que pour empêcher qu’elle ne se décole en séchant.

Cette bande de papier doit être mouillée de colle des deux côtés : on observera la même chose pour tout le papier que l’on employera à couvrir les scissures ou jointures des fusées ou porte-feux : le papier en est plus maniable ; & les plis en paroissent moins.

On amorce ensuite la fusée, en prenant un morceau d’étoupille plié double & de grosseur proportionnée, que l’on fait entrer dans le trou qu’a formé la broche, à la hauteur d’un diametre extérieur de la fusée ; & on la colle dans la gorge avec de l’amorce. Il ne faut mettre de l’amorce, que ce qui est nécessaire pour la tenir : une trop grande quantité, qui donneroit beaucoup de feu, pourroit faire crever la fusée.

On finit par coller un rond de papier sur la gorge ; ce que les Artificiers nomment bonneter : cela sert à empêcher, lorsqu’on tire les fusées, que celle qui part ne communique son feu aux autres, & aussi à les garantir de l’humidité.

Bien des Artificiers ne mettent point de pot aux petites fusées de caisse ; ils se contentent de rouler & de coller dessus un quarré de papier gris, qui déborde la fusée de la hauteur de la garniture qu’ils veulent y placer. Après qu’ils y ont mis la chasse & la garniture, ils lient le papier dessus pour la renfermer. Les fusées ainsi garnies montent plus haut, parce qu’elles sont moins chargées : mais comme c’est aux dépens de leur garniture, qui est fort petite, il n’y a rien à gagner, si ce n’est pour l’artificier.

Art. VII. Des baguettes & du chevalet. La baguette que l’on attache aux fusées, sert à les maintenir droites, en contrebalançant leur pesanteur, contre laquelle le feu agit par l’un des bouts, qui doit toûjours être tourné en-bas, & qu’elle force à garder cette situation.