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ou une feuille ; & les especes qui paroissent les plus analogues entr’elles, sont réellement distinctes par des propriétés médicinales très-différentes. C’est ainsi que l’abricot est regardé par tous les Medecins comme sujet à causer des dyssenteries, des coliques, des fievres intermittentes, &c. & que la pêche est au contraire regardée comme très-saine.

La division que les anciens avoient faite des fruits en fruits d’été, ὡραῖοι, horæi, & fruits d’automne, est on ne peut pas plus mal entendue, plus incomplete, & fondée sur des prétentions plus précaires. Une poire fondante d’été ressemble parfaitement à une poire fondante d’automne ; & deux fruits d’été, savoir une cerise & une amande, sont absolument différens. La circonstance d’être peu durables ou de pouvoir être conservés long-tems, par laquelle les deux branches de leur division étoient spécifiées, ne fait rien aux propriétés diététiques des fruits, & ne peut convenir qu’aux fruits aqueux & pulpeux.

Les propriétés diététiques des fruits varient encore même dans chaque espece selon qu’on les mange dans différens degrés de maturité, frais ou séchés, vieux ou récents, cruds, cuits ou confits, seuls ou assaisonnés avec un peu de sucre, de sel, &c.

Pour toutes ces raisons, nous ne nous arrêterons pas plus long-tems sur ce sujet, & nous reserverons pour les articles particuliers ce que l’on sait de positif sur l’usage de chaque fruit. Voyez ces articles.

Nous rappellerons seulement en deux mots l’observation généralement connue des mauvais effets des fruits verds, que les femmes, les enfans & les estomacs malades appetent par une dépravation de goût, qu’on doit regarder comme vraiment maladive.

Nous ferons encore une observation sur l’usage des fruits en général : c’est que l’opinion commune qui les fait regarder comme une source très ordinaire des maladies épidémiques qui regnent souvent en automne ; que cette opinion, dis-je, n’est vraissemblablement qu’une erreur populaire. On a observé que ces maladies n’avoient été ni plus communes, ni plus dangereuses pendant certaines années qui avoient été très-abondantes en fruits de toute espece.

Ce fait important mérite cependant d’être encore éclairci par de nouvelles observations. (b)

Fruits, (Jurisprud.) ce terme dans sa signification propre ne s’entend que des émolumens qui naissent & renaissent du corps d’une chose, comme les fruits de la terre. Cependant on donne aussi le nom de fruits à certains émolumens qui ne proviennent pas de la chose même, mais qui sont dûs à cause de la chose, tels que les fruits civils.

Les fruits d’un héritage appartiennent au propriétaire, quand même il ne les auroit pas ensemencés : nam omnes fructus jure soli, non jure seminis, percipiuntur ; l. 25. ff. de usuris ; mais il doit rendre les labours & semences.

Le possesseur de bonne foi fait les fruits siens, c’est-à-dire gagne les fruits consumés ; il est seulement obligé de rendre ceux qui sont encore extans, au lieu que le possesseur de mauvaise foi est obligé de rendre même ceux qu’il a perçûs & consumés.

On distingue plusieurs sortes de fruits, savoir :

Fruits ameublis, c’est-à-dire qui sont devenus meubles, soit par la séparation qui en a été faite du fonds, soit après le tems de leur maturité, auquel cas quelques coûtumes les réputent meubles.

Fruits annuels, sont ceux qui se reproduisent chaque année, à la différence des fruits casuels, qui ne viennent qu’extraordinairement.

Fruits artificiels, sont la même chose que les fruits industriaux ; ils sont opposés aux fruits naturels : voyez la loi 22. au code, lib. III. tit. xxxij. On les appelle plus communément fruits industriaux.

Fruits casuels, sont ceux qui n’échéent qu’extraordinairement & par des évenemens imprévûs : tels sont les droits seigneuriaux dûs pour les mutations par succession, vente, ou autrement.

Fruits civils, sont des émolumens que la loi a assimilé à certains égards aux fruits naturels ; de ce nombre sont les loyers des maisons & héritages, les arrérages de rente, les intérêts, & autres profits annuels qui proviennent de la convention des parties ou de la loi ; les fruits casuels sont aussi des fruits civils.

Fruits consumés, sont ceux que le possesseur a perçûs & employés à son usage.

Fruits décimables, sont ceux sujets à la dixme. Voyez Décimable & Dixme.

Fruits échûs, sont des fruits civils dont le droit est acquis à quelqu’un, soit au propriétaire, usufruitier, fermier, ou autre possesseur.

Fruits étroussés : on appelle ainsi dans quelques provinces les fruits adjugés en justice ; étrousse signifie adjudication.

Fruits extans, sont ceux qui subsistent encore, & ne sont pas consumés.

Fruits industriaux, sont ceux que la nature seule ne produit pas, mais qui demandent de la culture & autres soins, comme les blés, & autres grains, le vin, &c. Voyez fruits naturels.

Fruits insolites, sont ceux que l’on ne fait pas venir ordinairement dans le pays, ce qui est relatif à l’usage : car ce qui est insolite dans un lieu ne l’est pas dans un autre ; par exemple, le ritz est un fruit insolite aux environs de Paris : il ne l’est pas en Provence.

Fruits naturels, sont ceux que la nature seule produit, & qui ne demandent aucune culture, comme le foin, le bois.

Fruits ordinaires, sont les fruits annuels ; ils sont opposés aux fruits casuels.

Fruits pendans par les racines, sont ceux qui ne sont pas encore séparés du fonds ; ils sont communément réputés immeubles, excepté dans quelques coûtumes, qui les réputent meubles après le tems de leur maturité, comme celle de Normandie, art. 488.

Fruits perçûs, sont ceux que le propriétaire ou possesseur a recueillis ; il ne faut pas confondre les fruits perçûs avec les fruits consumés. Voyez ci-dev. fruits consumés.

Fruits siens, sont ceux que le possesseur gagne en vertu du droit ou possession qu’il a. Le possesseur de bonne foi fait les fruits siens ; le seigneur dominant qui a fait le fief de son vassal par faute d’homme, droits, & devoirs non faits & non payés, fait les fruits siens pendant la main-mise.

Au digeste lib. XXII. tit. j. le traité de fructibus per jo. copum. Voyez la bibliotheque de Jouet, & les décisions de la Peirere, au mot fruits. (A)

Fruit, en Architecture, c’est une petite diminution de bas en-haut d’un mur, qui cause par dehors une inclinaison peu sensible, le dedans étant à-plomb : & contre-fruit, c’est l’effet contraire. On donne quelquefois du contre-fruit en-dedans, aux murs, quand ils portent des souches de cheminée, afin qu’ils puissent mieux résister à la charge par le double fruit.

Fruits, ornemens de Sculpture, qui imitent les fruits, & dont on fait des festons, des guirlandes, & des chûtes dans la décoration des bâtimens.

Il s’en voit de fort beaux à la frise composite de la cour du louvre. (P)

FRUITÉ, adj. en terme de Blason, se dit d’un arbre chargé de fruits.

Moucy d’Inteville, d’or au pain de sinople, fruité d’or au chef d’azur, chargé de trois étoiles d’or.

FRUITERIE, s. f. (Econ. rustiq.) est le lieu où l’on serre les fruits, bien différent de la serre qui n’est