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comme lorsqu’on dit qu’un acte fait foi de telle chose. Avoir foi en Justice, c’est avoir la confiance de la Justice. (A)

Foi, (bonne-) est une conviction intérieure que l’on a de la justice de son droit ou de sa possession. On distinguoit chez les Romains deux sortes de contrats ; les uns que l’on appelloit de bonne-foi, les autres de droit étroit ; les premiers recevoient une interprétation plus favorable. Parmi nous tous les contrats sont de bonne-foi, or la bonne-foi exige que les conventions soient remplies ; elle ne permet pas qu’après la perfection du contrat l’un des contractans puisse se dégager malgré l’autre ; mais elle ne souffre pas non plus que l’on puisse demander deux fois la même chose : elle est aussi requise dans l’administration des affaires d’autrui & dans la vente d’un gage. Chez les Romains elle ne suffisoit pas seule pour l’usucapion ; & dans la prescription de trente ans, il suffisoit d’avoir été de bonne-foi au commencement de la possession, la mauvaise foi survenue depuis n’interrompoit point la prescription. Voyez ci-après Mauvaise Foi, au digeste liv. L. tit. xvij. l. 57. 123. 136. & au code liv. IV. tit. xxxxjv. l. 3. 4. 5. 8. (A)

Foi du Contrat, c’est l’obligation résultante d’icelui ; suivre la foi du contrat, c’est se fier pour l’exécution d’icelui à la promesse des contractans, sans prendre d’autres sûretés, comme des gages ou des cautions. (A)

Foi et hommage, qu’on appelle aussi foi ou hommage simplement, est une soûmission que le vassal fait au seigneur du fief dominant pour lui marquer qu’il est son homme, & lui jurer une entiere fidélité.

C’est un devoir personnel qui est dû par le vassal à chaque mutation de vassal & de seigneur ; ensorte que chaque vassal la doit au-moins une fois en sa vie, quand il n’y auroit point de mutation de seigneur, & le même vassal est oblige de la réiterer à chaque mutation de seigneur.

Anciennement on distinguoit la foi de l’hommage.

La foi étoit dûe par le roturier pour ce qu’il tenoit du seigneur, & l’hommage étoit dû par le gentilhomme, comme il paroît par un arrêt du parlement de Paris rendu aux Enquêtes, du 10 Décembre 1238. Présentement on confond la foi avec l’hommage, & l’un & l’autre ne sont dûs que pour les fiefs.

Il n’y a proprement que la foi & hommage qui soit de l’essence du fief ; c’est ce qui le distingue des autres biens.

Elle est tellement attachée au fief, qu’elle ne peut être transférée sans l’aliénation du fief pour lequel elle est dûe.

Quand il y a mutation de seigneur, le vassal n’est pas obligé d’aller faire la foi au nouveau seigneur, à-moins qu’il n’en soit par lui requis ; mais si c’est une mutation de vassal, le nouveau vassal doit aller faire la foi dès que le fief est ouvert soit par succession, donation, vente, échange, ou autrement, sans qu’il soit besoin de requisition.

La foi doit être faite par le propriétaire du fief servant, soit laïc ou ecclésiastique, noble ou roturier, mâle ou femelle ; les Religieux doivent aussi la foi pour les fiefs dépendans de leurs bénéfices ou de leurs monasteres.

Personne ne peut s’exempter de faire la foi, à-moins d’abandonner le fief ; le Roi seul en est exempt, attendu qu’il ne doit point de soûmission à ses sujets.

Lorsque le vassal possede plusieurs fiefs relevans d’un même seigneur, il peut ne faire qu’un seul acte de foi & hommage pour tous ses fiefs.

Si le propriétaire du fief servant négligeoit de faire la foi & hommage & payer les droits, & que le fief fût saisi féodalement par le seigneur, l’usufruitier pourroit faire la foi & hommage, & payer les droits pour avoir main-levée de la saisie, & empêcher la

perte des fruits : sauf son recours contre le propriétaire pour ses dommages & intérêts ; & comme ce n’est pas pour lui-même que l’usufruitier fait la foi, il seroit tenu de la réitérer à chaque mutation de propriétaire qui se trouveroit dans le même cas.

Quand le fief appartient à plusieurs co-propriétaires, tous doivent porter la foi, mais chacun peut le faire pour sa part, ce qui ne fait pas néanmoins que la foi soit divisée.

La propriété du fief étant contestée entre plusieurs contendans, chacun peut aller faire la foi & payer les droits. Le seigneur doit les recevoir tous, & celui qu’il refuseroit pourroit se faire recevoir par main souveraine.

Il suffit qu’un d’entre eux ait fait la foi & payé les droits, pour que le fief soit couvert pendant la contestation : mais après le jugement, celui auquel le fief est adjugé doit aller faire la foi, supposé qu’il ne l’ait pas déjà faite, quand même il y en auroit eu une rendue par un autre contendant ; autrement il y auroit perte de fruits pour le propriétaire.

Si des mineurs propriétaires d’un fief n’ont pas l’âge requis pour faire la foi, le tuteur ne peut pas la faire pour eux, il doit seulement payer les droits, & pour la foi demander souffrance jusqu’à ce qu’ils soient en âge.

Le mari, comme administrateur des biens de sa femme, doit la foi pour le fief qui lui est échû pendant le mariage, & payer les droits s’il en est dû ; en cas d’absence du mari, la femme peut demander souffrance. Elle peut aussi dans le même cas, ou au refus de son mari, se faire autoriser par justice à faire la foi, & payer les droits.

Quand la femme est séparée de biens d’avec son mari, elle doit faire elle-même la foi & hommage.

Elle ne doit point de nouveaux droits après le décès du mari, mais seulement la foi, au cas qu’elle ne l’eût pas déjà faite.

Pour ce qui est du fief acquis pendant la communauté, la femme ne doit point de foi pour sa part après le décès de son mari, pourvû que celui-ci eût porté la foi ; la raison est que la femme étant conquéreur, il n’y a point de mutation en sa personne.

Il n’est pas dû non plus de foi & hommage par la douairiere pour les fiefs sujets au douaire, la veuve n’étant qu’usufruitiere de ces biens ; c’est aux héritiers du mari à faire la foi : s’ils ne le faisoient pas, ou s’ils ne payoient pas les droits, la veuve pourroit en user comme il a été dit ci-devant par rapport à l’usufruitier.

Lorsqu’un fief advient au Roi par droit d’aubaine, deshérence, batardise, confiscation, il n’en doit point la foi au seigneur dominant par la raison qui a déjà été dite ; mais il doit vuider ses mains dans l’an de son acquisition, ou payer une indemnité au seigneur, lequel néanmoins ne peut pas saisir pour ce droit, mais seulement s’opposer.

Le donataire entre-vifs d’un fief ou le légataire qui en a obtenu délivrance, sont tenus de faire la foi comme propriétaires du fief.

Les corps & communautés, soit laïcs ou ecclésiastiques, qui possedent des fiefs, sont obligés de donner un homme vivant, mourant & confisquant, pour faire la foi & hommage pour eux ; ils peuvent choisir pour cet effet une personne du corps, pourvû qu’elle soit en âge de porter la foi.

Les bénéficiers sont tenus de faire eux-mêmes la foi pour les fiefs dépendans de leur bénéfice, parce qu’en cette partie ils représentent leur église qui est propriétaire du fief.

Quand un fief est saisi réellement, & qu’il y a ouverture survenue, soit avant la saisie réelle ou depuis, pour laquelle le seigneur dominant a saisi féodalement, le commissaire aux saisies réelles ou