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empressement qui naît du desir de contribuer au progrès des Sciences. Nous lui devons les figures 1, 2, 3, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 54, 61, 73, 74 & 161. Nous aurons soin en parlant des vaisseaux & ustensiles, de reconnoître aussi ceux que nous aurons fait dessiner chez lui. Par-tout nous avons indiqué nos sources, & nous avons cité de notre mieux en parlant des différens auteurs où l’on peut voir la même figure, afin de satisfaire ceux qui seront curieux d’y recourir, & de reconnoître en même tems ce que nous devons à autrui. Tout devient intéressant pour ceux qui aiment & cultivent une science ; non contens d’être parvenus à ses bornes, ils aiment encore à en examiner les progrès, & savoir à qui l’on est redevable de ceux qui l’ont amenée au point où ils la trouvent. Nous ne devions pas épuiser les matieres, mais nous avons fait ensorte de piquer la curiosité de ceux qui voudroient en savoir autant qu’il est possible.

On ne voit pas, au moins que je sache, que les chimistes qui ont écrit avant Geber, ayent eu soin de nous parler des ustensiles qu’ils ont employés pour leurs opérations ; c’est cependant par-là qu’ils devoient commencer. Est-ce mystere ou ignorance de la vraie méthode ? On peut dire qu’ils font l’extrème de quelques auteurs modernes, qui pour lier un fait à ce qui a été inventé avant eux, commencent leur narration des les élémens de la science, dont leur découverte doit reculer les bornes.

Quoiqu’on puisse faire quantité d’opérations chimiques dans le même fourneau, & qu’il y en ait quelques-uns de ceux qui sont représentés dans nos Planches qui reviennent presqu’au même, nous avons cru devoir rassembler tous ceux qui pouvoient entrer & être nécessaires dans un laboratoire philosophique qu’on voudroit rendre complet, & dans lequel on seroit obligé de faire plusieurs opérations à-la-fois dans différens genres, afin que ceux qui voudroient s’occuper de ce travail, pussent choisir dequoi se satisfaire. La plûpart des auteurs s’accordent sur six, qu’ils regardent comme nécessaires & suffisans : ceux de distillation latérale, le grand fourneau de décoction pour la cucurbite de cuivre, un fourneau à capsule, un fourneau de fusion à vent, un fourneau d’essai, & un athanor.

Nous avons cru devoir nous étendre sur cette matiere avec d’autant plus de raison, qu’on n’en trouve rien dans les autres dictionnaires. Trévoux n’en dit que très-peu de chose, & même ce qu’il y en a n’est pas exact. Le grand dictionnaire de Medecine, où l’on auroit dû trouver cet article très-détaillé, avec de nombreuses planches, n’en donne qu’une mauvaise définition de quatre lignes. MM. Boerhaave & Cramer ont fait l’un & l’autre une faute contre la vraie méthode, en commençant l’un sa chimie & l’autre sa docimastique par la théorie, ou la partie la plus abstraite de ce qu’ils traitoient, & en comprenant dans cette théorie, & encore à la fin, la partie des fourneaux & des vaisseaux, qui sont un sujet très-pratique. On doit écrire comme on doit enseigner ; & dans un livre & un cours de Chimie faits méthodiquement, on doit débuter d’abord par les vaisseaux & fourneaux.

Si quelques personnes croyent que nous avons trop insisté sur le détail de la description de chaque fourneau en particulier, nous les prions de considérer que nous avons cru ne pouvoir être utiles qu’en nous comportant de la sorte ; que tel qui veut construire un fourneau aime à en trouver la description à son article, sans être obligé de l’aller chercher par comparaison dans celle d’un autre fourneau différent, ou dans des généralités inutiles à ceux qui ne savent point & à ceux qui savent ; par la raison que les premiers n’en sauroient faire l’application à des cas particuliers

qu’ils ignorent, & que les derniers n’en ont pas besoin, parce qu’ils les savent. Enfin je serois presque tenté de dire que ceux qui trouveront que nous en avons trop dit, sont précisément ceux pour qui nous n’en avons pas dit assez, & qui seroient incapables d’exécuter la plus étendue de nos descriptions, même quand nous l’augmenterions encore. Une pareille description doit être jugée sur la facilité de son exécution ; il faut pourtant supposer que ceux qui l’entreprendront soient artistes, au moins en général. Nous ne parlons point des autres.

Nous avons rejetté comme insuffisantes les distinctions qui ont été faites des fourneaux en fixes & portatifs, en ronds & quarrés, en simples & composés, en fourneaux à vent, à soufflet, à tour, ainsi que celles qui ont été tirées du vaisseau dans lequel on y traite les corps ; de la maniere dont le feu y est appliqué, du nom de l’auteur, de l’effet de leur matiere, figure, de leur grandeur : ces différens noms doivent être connus ; mais comme ils ne sont dûs qu’à quelques accessoires, à des conventions ou à des qualités communes à quelques fourneaux seulement, ils n’ont pû se prêter à la méthode que nous avons voulu suivre par les raisons que nous allons détailler.

Il n’y a peut-être point d’auteur qui ait parlé des fourneaux, qui n’ait répété machinalement la plûpart des divisions que nous venons de proscrire, sans en mentionner les avantages ni les inconvéniens. Il n’étoit pas étonnant qu’ils ne parlassent point des avantages, nous ne pouvons y en trouver ; mais nous allons indiquer les inconvéniens que nous y voyons.

Les moindres sont un fatras de noms qui ne servent qu’à charger la mémoire. Voici les autres.

1°. La division en fixes & en portatifs n’est d’aucune utilité, en ce qu’elle ne change point la nature du fourneau ; car le même exactement peut être fixe & portatif dans bien des cas. On peut comparer nos figures premiere & trois dans tous les cas où il ne faudra que le degré de feu que le fourneau de la figure premiere pourra supporter ; car alors on pourra toûjours se servir de la figure troisieme, comme de la figure premiere : d’ailleurs il n’est pas toûjours nécessaire qu’un fourneau soit fixe pour soûtenir la violence du feu ; celui de Pott qui est en tôle, en est la preuve.

2°. Que veut dire la distinction entre fourneau rond & fourneau quarré ? La figure extérieure, car c’est d’elle qu’il s’agit ici, influe-t-elle sur les qualités du dedans ? C’est faire trop d’honneur à des distinctions aussi frivoles, que d’en parler.

3°. Celle des simples & des composés a d’abord un air spécieux : mais que signifie-t-elle au fond ? veut-on mettre en comparaison des fourneaux qui servent à plus d’opérations, ou qui ont plus de parties, ou qui ont plus de variétés que d’autres ? Nous avons fait voir que tous les fourneaux pouvoient servir à plusieurs opérations, plus ou moins ; ainsi on ne peut rien dire que de vague sur cet article. En second lieu s’agit-il ici de la différence qui peut être entre un athanor & un fourneau de distillation, quant à la quantité des pieces ? il est vrai qu’il y a de ces derniers qui n’en ont qu’une ; mais il y en a aussi qui en ont quatre & cinq, comme il y a des athanors qui n’ont que la tour & un petit fourneau de décoction pour lequel seul elle a été construite ; & d’ailleurs l’athanor est d’une seule piece.

4°. En fourneaux à vent & fourneaux à soufflet. Sous le nom de fourneaux à vent, on entend tous ceux dont le feu n’est point animé par les soufflets, mais seulement par le jeu de l’air ; ensorte qu’il seroit plus à-propos de les appeller fourneaux à air, si l’usage n’en avoit autrement décidé : ainsi tous ceux que nous avons mentionnés doivent être placés dans