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te la putréfaction & séparation ou dissolution.

La hauteur du fourneau sera de trois piés & demi, & la largeur d’un pié & demi inclusivement : le cendrier sera haut d’un pié, y compris la grille & le sol du fourneau. Le foyer sera terminé à la hauteur de neuf pouces par un diaphragme de fer ou de terre, ayant dans son milieu un trou rond de quatre pouces de diametre, pour la communication de la chaleur. On aura trois regîtres ou lames de tôle plus larges que le trou ; ces lames de tôle seront percées & auront, la premiere une ouverture de trois pouces de diametre, la seconde une de deux, & la troisieme une d’un seul ; on appliquera sur le diaphragme celle qu’il faudra ; cela dépendra du degré de chaleur qu’on voudra donner. L’ouvroir aura quinze pouces de haut depuis le diaphragme jusqu’au dôme : sur ce diaphragme on placera un trépié de terre ou de fer, de trois pouces & demi de diametre, & de six de haut ; c’est sur ce trépié qu’on place l’œuf philosophique : le tout est surmonté d’un dôme de fer hémisphérique, haut de six pouces. Le regître du milieu est d’un pouce de diametre, on en approche la main pour régler le feu ; on place sur le trépié une sphere creuse partagée en deux hémi-spheres : cette sphere a sept pouces de diametre ; on y enferme un œuf philosophique de terre.

Le trou du diaphragme sans regître étant de quatre pouces de diametre, passe pour donner une chaleur de quatre degrés. Si l’on ne veut que le troisieme degré, on a recours au regître ayant un trou de trois pouces de diametre, & ainsi de suite. La grille est de beaucoup trop grande pour le premier & second degré : ainsi il faut la changer ou mettre dessus une feuille de tôle qu’on puisse graduer à volonté : Libavius en a fait faire de différentes pour les divers degrés de feu, percées comme la grille d’une rape. Quelques artistes ont un catin où ils mettent du feu ; ce catin est percé de petits trous, & placé sur la grille dont il fait les fonctions ; on lui fait de grands bords. Quand on a fixé le regître l, on lute bien les vuides qu’il laisse. Dans Libavius il y a un tuyau de quelques doigts de haut, attaché au bord du trou du diaphragme ; & le regître se glisse néanmoins entre deux : le trépié l’embrasse & porte dessus à la place des œufs partagés en hémi-spheres. On met encore une cucurbite dans laquelle on renferme l’œuf philosophique, & qu’on scelle quelquefois hermétiquement ; car si la figure de Rupescissa a été faite selon son intention, il y a toute apparence que tantôt il a scellé ainsi sa cucurbite, & tantôt il l’a laissée ouverte. Ce fourneau est portatif & peut être divisé en moins de corps ; on peut encore le faire de différentes grandeurs ; quelques artistes l’ont voulu transporter, comme il arrive aux faux-monnoyeurs de transporter avec eux tous leurs ustensiles : mais le vrai chimiste sera un philosophe sédentaire, pag. 165 de la Scevastique de Libavius. On trouve encore la description & la figure de ce fourneau, pag. 87. tom. I. de la bibliotheque chimique de Manget.

Le fourneau de lampe est appellé fourneau secret des philosophes, & aussi fourneau des arcanes. Ceux qui en voudront davantage là-dessus pourront consulter les descriptions qui en ont été données par Isaac le Hollandois, Paracelse, Despagnette, Raimond Lulle, Bernhard, &c.

Il est évident que le fourneau donné par la Roquetaillade, qui vivoit au quatorzieme siecle, a dû fournir tout naturellement la construction du fourneau de notre fig. 1. qui n’en differe qu’en ce qu’au lieu d’un diaphragme ouvert, elle a deux barres de fer & un trou pour passer le cou de la cornue ; on observe encore qu’il n’y a qu’un regître au dôme.

Nous aurions peut-être dû placer les fourneaux polychrestes après ceux-ci, comme étant censés ser-

vir aussi au grand-œuvre par la généralité qu’ils affectent ; mais nous aurions par-là confondu la philosophie hermétique avec la Chimie positive ; ce que nous avons voulu éviter.

Généralités sur la division des fourneaux. Il est évident que tous les fourneaux qui précedent tirent leur dénomination des opérations auxquelles ils sont destinés.

On eût peut-être souhaité que cette division eût été déduite des qualités intrinseques de chaque espece de fourneau, de même qu’on a distingué les plantes par les pétales, par exemple, &c. mais les fourneaux sont un acte de la raison humaine ; ils sont tous construits sur le même principe, l’action de l’air & du feu ; & leurs accessoires dépendent du corps à traiter ou du vaisseau qui le contient, ou bien de tous les deux ensemble. Ainsi quoiqu’ils puissent absolument être considérés en eux-mêmes, & abstraction faite de ces différentes conditions, elles cessent en quelque sorte de leur être étrangeres, puisqu’elles sont le principe de leur structure ; & l’on ne peut les en séparer, qu’on ne sépare les moyens de la fin qui leur a donné naissance, & qu’on ne réduise alors les fourneaux à de simples êtres chimériques & devant leur origine au hasard, quoique capables de servir à quelques usages. On n’en peut pas dire autant des vertus des plantes, qui ne sont pas des productions humaines ; il a donc fallu diviser les fourneaux, non d’après l’action combinée de l’air & du feu, qui n’y exige par elle-même aucune différence, mais d’après les corps auxquels on veut appliquer le feu.

Telle est la division que nous avons crû devoir établir pour mettre quelque ordre dans ce que nous avions à dire : on la regardera peut-être comme un système de plus qui ne servira qu’à charger la mémoire ; mais il est aisé de ne faire attention qu’aux faits.

Nous avons fait onze sections des fourneaux, d’après l’usage dont ils sont dans les opérations ; ce n’est pas qu’elles se bornent à ce nombre, mais il y en a quantité & même de très-différentes, qui se font dans les mêmes ; & nous entendons parler de celles qui demandent quelque changement particulier dans la construction d’un fourneau, quoiqu’elle soit presque la même quant au fond ; il est bon d’avertir qu’il se trouve dans la plûpart d’entre eux des diminutions ou additions qui les rendent plus propres à remplir les vûes qu’on se propose. Si nous n’avons point parlé des fourneaux de cémentation, par exemple, c’est que cette opération ressemble à une fusion, quant à l’appareil, & que les fourneaux de celle-ci servent à celle-là ; car quoi de plus semblable qu’un creuset à fondre, & un creuset ou pot de cémentation ? cependant on ne confondra pas aisément ces deux opérations.

Les derniers fourneaux n’ont été mis avec les vaisseaux, qu’afin que l’appareil fût complet, c’est-à-dire pour accompagner les vaisseaux & figurer avec eux, de même que ceux-ci ont été représentés au commencement pour accompagner les fourneaux ; avec cette différence toutefois, que les fourneaux sont faits pour les vaisseaux, quoi qu’en dise Manget, qui appelle ceux-ci vaisseaux secondaires. L’utile nous a conduits, l’agréable s’y est trouvé.

Autant que nous avons pû, nous avons fait dessiner d’après nature les fourneaux représentés dans nos Planches ; mais il en est un certain nombre qui ne se trouvent que dans les ouvrages des Chimistes. On s’attend bien de trouver sur tout parmi nos ustensiles, ceux qui sont aujourd’hui en usage ; on pensera même tout naturellement que nous avons dû consulter le laboratoire de M. Roüelle, qui est très-bien fourni en ce genre. Nous n’avions garde de négliger cette ressource, & il nous a été ouvert avec cet