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deux petits murs d’appui : ils s’étendent de bas en-haut.

Quand on veut ranger les fourneaux dans ce four, on met pour les soûtenir, des barres de fer sur les petits murs d’appui, & on les place debout ou couchés ; peu importe : c’est le sens qui permet qu’on en mette davantage, qui décide. Le four étant plein, on ferme le devant avec de grands carreaux ou de grandes pierres plates qui s’étendent d’un côté à l’autre de la porte, avec toutefois la précaution de le laisser ouvert en bas à la hauteur des petits murs d’appui, pour le passage du bois, & en haut d’environ autant dans toute la largeur de la porte, pour le passage de la flamme : on remplit de menu bois tout l’espace compris entre les petits murs, & on entretient le feu de la sorte pendant huit heures ; on consume environ le quart d’une voie de bois. La cheminée de ce four est placée comme celle du four du boulanger, avec cette exception que la sabliere en est presque aussi basse que la partie inférieure de l’ouverture qu’on a laissée pour le passage de la flamme.

L’endroit du four où le feu est le plus vif, c’est la partie de la voûte qui est près du passage de la flamme : le fournaliste met cependant au milieu les grosses pieces qu’il a à cuire, sans doute parce qu’elles sont environnées d’une plus grande masse de feu, & non pas parce que le feu y est plus actif. L’ouverture supérieure ne devroit avoir que la moitié ou les deux tiers tout-au-plus de l’inférieure. Si l’on examine ce qui se trouve dans la cheminée, on voit à la paroi antérieure quantité de cendres bien calcinées ; & à celle qui est mitoyenne avec le four, un noir de fumée fort sec ; ce qui indique que la matiere fuligineuse est mêlée en petite quantité avec beaucoup de cendres.

L’argille de Gentilli est d’un bleuâtre assez foncé ; ce qui, joint aux pyrites qui s’y trouvent fréquemment, peut faire soupçonner qu’elle contient du fer ; aussi est-il inutile d’y ajoûter de la limaille, que quelques artistes regardent comme nécessaire à la composition de leur pâte. Toute argille s’amollit dans l’eau & y devient une pâte ténace & bien liée ; elle se durcit quand on la seche à l’air : si on ne l’expose qu’à un feu médiocre, d’abord elle y devient dure ; mais si on augmente son activité, elle se convertit en un verre demi opaque, d’un verd tirant sur le roux. C’est pour cette raison que les fournalistes ne donnent un feu ni trop long ni trop vif ; car leur argille est d’autant mieux disposée à prendre la vitrification, qu’elle est mêlée d’une matiere (les pots de grais) qui la favorise. On fait par expérience qu’un corps vitrifié veut être échauffé & refroidi lentement ; mais on ne peut pas observer ces précautions à l’égard des fourneaux, dans lesquels il faut pouvoir mettre le feu tout-d’un-coup, de même qu’il faut être le maître de l’en retirer de la sorte : ils ne doivent donc pas être vitrifiés ; il y a plus, c’est qu’il faut qu’ils soient assez poreux pour soûtenir constamment sans altération les vicissitudes de chaleur & de refroidissement qu’exigent l’opération ou la commodité de l’artiste. On n’a pas encore trouvé de matiere qui remplît mieux ces vûes que l’argille mêlée d’un corps étranger tel que le grais. L’argille a assez de consistence pour se lier malgré les obstacles qu’elle trouve ; mais en même tems ses parties ne s’unissent pas assez fortement pour former un corps qui ait les inconvéniens du verre : d’ailleurs le grais, quoique susceptible de se vitrifier avec cette terre, demande pourtant un feu assez vif ; ensorte que celui qu’on donne aux fourneaux ne produit tout-au-plus qu’un petit commencement de liaison.

On trouve différentes compositions pour les fourneaux dans les auteurs, qui mériteroient de trouver

place ici, parce que ce sont des faits qui peuvent être utiles & qui sont dûs à une longue expérience : mais comme le même lut est applicable à différentes circonstances qui ne se trouvent point dans cet article, nous en ferons un article particulier auquel nous renvoyons. Voyez Lut & Vaisseau.

Des fourneaux à distiller par le côté. Tels sont ceux de nos fig. 1. 3. 7. 67. 69. 73. 145. & 161. celui de la fig. 1. est composé de quatre corps ; il est cylindrique, haut de deux piés cinq pouces, & large de 14 pouces en-dehors : son épaisseur est de deux par-tout, excepté vers le trou de son dôme ou il s’amincit ; son cendrier est haut de six pouces, en comptant l’épaisseur du sol ; le soupirail est large de quatre & haut de trois. Le second corps ou le foyer est haut de neuf pouces ; dans sa partie inférieure, on laisse en le construisant trois ou quatre pitons pour soûtenir la grille ; c’est pour cela que le second corps est plus élevé que le premier. La porte du foyer est haute & large de quatre ou cinq pouces, & demi-circulaire à sa partie supérieure. L’inférieure est élevée de deux pouces au-dessus de la grille : à la partie supérieure de ce corps, ou pratique quatre échancrures pour loger les barres de fer qui doivent soûtenir la cornue, ainsi que nous l’avons dit en parlant de la fig. 74. au commencement de cet article. Ces barres de fer ont communément huit ou dix lignes d’équarrissage. Le troisieme corps ou l’ouvroir est un cercle cylindrique dont le bord supérieur est échancré pour le passage du cou de la retorte : on sait toûjours cette échancrure demi-circulaire plus grande qu’il ne faut, parce qu’on bouche ce que la cornue laisse d’espace avec un lut convenable. Ce corps est haut de sept pouces ; le dôme ou quatrieme corps a la même hauteur ; il est, ainsi que le précédent, échancré demi-circulairement, avec cette différence que son échancrure est moins profonde que celle de l’ouvroir, quoique aussi large ; enfin ces deux échancrures font à elles deux une ovale dont le grand diametre est perpendiculaire : on sent bien que cela étoit nécessaire pour loger commodément le cou de la retorte qui est incliné pour l’ordinaire. Au milieu du dôme est un trou circulaire de deux pouces de diametre ; on le garnit quelquefois de terre qu’on termine en une naissance de tuyau, au quel on en ajuste un autre : ce fourneau le met, ainsi que la plupart des précédens, sur un dez de hauteur convenable. Nous avons déjà parlé de ses portes de soupirail & de foyer, en décrivant la fig. 2. Nous avons ajoûté une troisieme piece de terre tout-près de ces deux premieres ; elle est marquée q : elle sert à boucher l’échancrure du cou de la cornue, du-moins celle de l’ouvroir ; il en faut une seconde pour le dôme, de la grandeur requise : chacune de ces pieces s’emboîte dans son lieu au moyen d’une petite languette de chaque côté qui entre dans une petite rainure pratiquée dans l’échancrure, & elles ont outre cela la languette & la rainure qui se trouvent dans tous les corps de ce fourneau & des autres qui sont de même faits en terre. La grille est d’un fer de huit ou dix lignes d’équarrissage, & laisse entre elle & les parois du fourneau un espace d’un bon doigt, comme nous l’avons dejà dit. Ce fourneau est portatif, comme tous ceux que nous avons décrits, à l’exception de ceux qui sont en briques : on l’appelle aussi fourneau de reverbere ; qualité qui lui est commune avec d’autres bien différens ; il ressemble beaucoup à l’athanor de la Roquetaillade, que nous décrirons en son lieu. Il est le même que celui que Béguin a donné, p. 148. car celui-ci a 4 corps cylindriques & un seul trou au milieu du dôme : il a pourtant cette différence qui le met au-dessus du nôtre ; c’est que son foyer est elliptique par le bas, ensorte que le diametre de la grille n’a que la moitié de celui du fourneau. La cornue y est encore ap-