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des pieces auxquelles on veuille joindre quelque ornement. Voyez Canon, Cloche. Ces exemples doivent suffire pour faire entendre la fabrique des fontes moulées en terre : nous ajoûterons seulement que pour les grosses pieces, on tire la fonte directement du fourneau, & pour les autres on les coule à la poche, comme celles en sable.

Les moules en terre demandent beaucoup de tems & de travail ; on a imaginé d’y substituer le sable, qui dans peu de tems est rassemblé & desuni. Les grosses pieces auxquelles il ne faut qu’une ouverture, comme les marteaux pour les forges ; les pieces solides, comme les enclumes, les contre-cœurs de cheminées, & toutes autres plaques qui ne demandent des ornemens que d’un côté, se moulent à découvert. Pour une enclume, &c. proche la coulée du fourneau, vous faites une excavation convenable pour enterer le moule de la piece : ce moule est de bois ; vous battez en fond du sable ; posez le moule sur ce sable, qui reçoit & conserve l’empreinte, & battez du fable tout-autour. Le moule ou modele enlevé, vous débouchez la coulée du fourneau, & laissez emplir de fonte le moule : quand il est plein, vous arrêtez la fonte avec un morceau de pâte d’arbue, & la tournez dans un ou plusieurs moules autant que le fourneau en peut fournir. Pour faire l’œil des marteaux ; quand le modele de bois est enlevé, vous avez un chassis monté à crochets, que vous placez où l’œil doit être ; vous emplissez l’intérieur du chassis du sable bien battu ; vous décrochez, & retirez les pieces ; le sable reste ; & la fonte tournant autour, laisse le vuide de l’œil.

Pour les pieces autres que les plates ou solides, il faut qu’un attelier soit fourni de modeles de toutes façons, 2, 3, de sable extrèmement fin & gras ; de tamis 21, pour le passer ; de pelles & de rabots 17, 18, 19, 20, pour le remuer ; de battes 14, 19, 16 ; de maillet 7, pour le battre ; de rappes 8, 9, pour le détacher des pieces ; d’un ecouvillon 12, 13, pour l’humecter ; d’un sac de toile 10, rempli de poussiere ; de charbon tendre pour saupoudrer les chappes & noyaux, pour que la fonte ne s’attache point au sable ; de plusieurs chassis, suivant les différens ouvrages ; de la poche 4, pour couler ; de la manche 5, pour garnir le bras gauche, pour le garantir du feu.

Un sableur qui veut faire le moule d’une marmite (V. la Pl.), ayant sur son banc pour travailler à son aise, son sable humecté & tamise, y pose sa planche AA, & sur cette planche le chassis G ; ce chassis doit être précisément de la hauteur du corps de la marmite, garni des piés dont les empreintes se font séparément, comme nous le dirons ; il renverse dans le chassis le corps de marmite H, met du sable autour, & le consolide avec ses battes ; place la monture des piés, les patins, & la partie de la coulée qui est de la hauteur du chassis ; emplit le tout de sable bien battu : le total doit se trouver au niveau du chassis. L’ouvrier prend & renverse la partie du chassis mm, mettant les crochets en en-haut ; emplit toute l’épaisseur du quadre de sable bien battu au tour d’un morceau de bois figuré, pour faire le reste de la coulée, comme on le voit en X ; cette partie posée sur une planche AA, on la saupoudre de blanc ; le blanc est le sable sans être humecté, que les rappes ont détaché des pieces moulées : on renverse dessus la partie GH, aussi saupoudrée de blanc ; en la renversant, la partie de la coulée & les patins tombent. On poudre les empreintes de poussiere de charbon ; cette partie se rapatronne exactement par les guides mm, qui traversent les ouvertures pratiquées dans le corps du chassis, pour les loger ; & on arrête ces deux pieces par des crochets. TVXY représentent cette partie moulée.

La monture des pieces & le corps de la marmite restant dans le chassis, la marmite se trouve alors les piés en-bas ; elle doit bien affleurer le chassis, comme en ab. On emplit l’intérieur de sable bien battu ; on le rase avec le reglet au niveau du chassis ; & on renverse le tout sur la troisieme partie du chassis, dont le quadre est exactement rempli de sable battu, comme en Z : en soûlevant les deux premieres parties accrochées ensemble, on laisse à découvert le noyau Y ; on frappe sur le modele avec une batte pour le desserrer, & on le retire ; le modele des piés tombe ensuite. La place des anses se fait en perçant le sable dans l’endroit qui leur est destine, y insinuant deux morceaux de bois recourbés qui se rencontrent dans le milieu ; le sable affermi autour de ces morceaux de bois, on les retire, & le vuide reste. On saupoudre tant le noyau que la chappe de poussiere de charbon, dont on les enduit exactement avec les cuillieres, qui sont des morceaux de fer plat & courbé, pour passer sur toutes les parties plates & cintrées, & y comprimer la poussiere du charbon : ensuite on renverse la chappe sur la partie du chassis qui soûtient le noyau : on accroche les pièces ensemble ; elles se trouvent nécessairement dans la précision convenable, au moyen de la justesse du chassis & des guides : on porte le moule en cet état proche la gueule du fourneau pour les emplir de fonte, quand il y a le nombre de moules suffisans.

Tout cette manœuvre demande de l’adresse & de l’habitude : il y a, comme vous le voyez aux différens chassis, des poignées pour que l’ouvrier puisse les tourner commodément. Quand les pieces sont considérables, ils se mettent plusieurs : si la marmite avoit un gros ventre, comme il s’en fait quelques-unes, & comme il pourroit arriver pour d’autres pieces, il ne s’agit que d’avoir un corps de chassis de deux pieces, qui se joindront à la plus grande circonférence ; le modele sera de deux pieces coupées de même ; chaque piece ensablée séparément & rejointe quand les modeles seront retirés. Les couvercles se moulent dans deux pieces de chassis rapprochées ; une porte la coulée, elle se fait dans l’intérieur du couvercle ; & l’autre, l’anneau qui se moule avec deux morceaux de bois courbés qui se joignent au milieu, pour qu’on puisse les retirer aisément.

Quatre sableurs peuvent desservir un fourneau qui produiroit deux milliers en vingt-quatre heures. Quand les sableurs ont la quantité de moules relative à la fonte qui est en fusion, ils enduisent leurs poches d’arbue pétrie avec fiente de cheval, pour que la fonte ne s’y attache pas, & les font chauffer. La poche est composée d’une queue de fer que le sableur embrasse de deux morceaux de bois excavés & arrêtés par un anneau de fer, met la manche à son bras gauche, & va puiser de la fonte dans l’ouvrage. La poche est appuyée sur le bras gauche, tenue & tournée par la main droite pour verser dans les moules, par la coulée. Comme il faut que les pieces soient faites d’un seul jet, quand elles sont considérables, pendant qu’un sableur coule, les autres entretiennent le métal dans sa poche, en y versant les leurs : toutes les pieces en sable se moulent de même. Quand ce sont des pieces solides, comme une hurasse, vous faites l’empreinte moitié sur une partie de chassis, moitié sur l’autre ; en les fermant, vous avez une hurasse entiere : le sable se soûtient dans tout ce travail, quand il est fin, gras, humecté à-propos, & bien battu. Il faut que le fondeur entretienne la fonte toûjours vive ; une fonte bourbeuse ou approchante du fer feroit manquer toutes les pieces, ou les rendroit d’une mauvaise qualité : il faut pour cela des mines convenables. La tympe, dans ces fourneaux, doit être un peu plus éloignée de la dame, que dans ceux à gueuse, afin que les poches puissent